BOULETS ROUGES – Longtemps, Jean-Claude Martinez a été un cadre du Front national. Mais ça, c’était jusqu’en 2008. Cette année-là, il s’est présenté face à Louis Aliot aux européennes, un choix qui a entraîné son exclusion du parti.
Jean-Claude Martinez mène aujourd’hui la liste Force Vie - le mouvement de Christine Boutin - dans le Sud-Ouest pour les élections européennes. À nouveau dans la place, l’ex-frontiste dézingue à tout va dans une interview accordée à Roads Magazine fin avril et repérée par Libération ce mercredi 21 mai. Un entretien qu'il dénonce aujourd'hui, assurant à Libération qu'il s'agissait "d'une conversation privée" avec le journaliste.
Sa cible privilégiée au cours de cette interview ? Christine Boutin :
"Nous n’avons rien en commun. […] Disons qu’ELLE utilise MON appellation, ce qui n’est pas clair, et comme Boutin est la plus médiatique de nous deux, elle se l’approprie, en y insérant ses obsessions, telles que 'l’homosexualité est une abomination'. […] Le concept de 'Force Vie' par Boutin en télévision, c’est d’un niveau dramatique.
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Bonne ambiance au sein de Force Vie. On est loin des sourires affichés lors de la présentation des listes, en février. Sur la photo, Jean-Claude Martinez se tient tout à côté de Christine Boutin (Crédit MaxPPP)
Mise à jour, 21 heures - Contactée par le Lab, Christine Boutin indique avoir eu une explication, en avril, avec Jean-Claude Martinez sur cette interview. Ce dernier lui a assuré s'être fait piéger. Christine Boutin passe l'éponge :
"Je ne suis pas femme à créer des polémiques. Jean-Claude Martinez est un personnage attachant, au langage fleuri.
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Mais Christine Boutin n’est pas la seule à faire les frais des attaques de Jean-Claude Martinez. Il s’en prend également violemment à son ancien camp frontiste. "A l’époque de Le Pen, on pouvait encore discuter franchement. Maintenant, le Front, c’est de la merde", résume-t-il.
Et les ténors du FN ne sont pas mieux lotis.
Marine Le Pen est ainsi présentée comme une future présidente qui fera passer la France "sous le cap du zéro" :
"Je l’ai amené par la main s’inscrire à Assas [Université Paris 2, ndlr] et je l’ai même eu comme étudiante. Elle est du même niveau que Nadine Morano ou Rachida Dati. Elle n’était pas si différente des autres jeunes ; elle écrit en phonétique, ses devoirs étaient dramatiques.
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Voilà pour la présentation personnelle. Le regard n’est pas plus *amical* lorsqu’il s’agit du programme de la présidente du Front national, "un programme qui mixe un peu d’euthanasie, un peu de bougnoules à la mer, un peu de guillotine, un peu de sortie de l’euro, etc… En fait, elle mélange le programme de Nicolas Dupont-Aignan avec celui des S.A. d’Hitler", juge Jean-Claude Martinez.
Et quid de Florian Philippot ? Un "Juppé avec une surcharge pondérale" :
"Philippot est tout sauf brillant. Il est bon élève, il récite bien sa leçon, mais il est loin d’être brillant. Je ne vois aucun éclair de génie en lui. […] Philippot est un bon chevènementiste : con, obsolète et étriqué comme son mentor.
"
Bruno Gollnsich ? Un opportuniste qui a préféré "être député européen à vie" plutôt que de quitter le FN version Marine Le Pen :
"C’est drôle que certaines personnes pensent que Gollnisch est une personne indépendante, qui serait guidé par le Christ et la voie lactée… Non, quand il rentre dans Jérusalem, sur son bourricot, il choisit d’être roi de Jérusalem. C’est la différence avec le Christ.
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En dehors du FN, Nicolas Dupont-Aignan est aussi visé. Pour Jean-Claude Martinez, NDA est une "girouette" :
"Toute cette bande de cons, Marine Le Pen ou Nicolas Dupont-Aignan, proposent des idées incohérentes. […]Nicolas Dupont-Aignan est en contact tous les jours avec Florian Philippot, alors idéologiquement, ils ne doivent pas être très éloignés l’un de l’autre…
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Deux semaines la publication de cet entretien, Jean-Claude Martinez a déposé un référé en atteinte à la vie privée. Il réclame le retrait de l’interview et 10.000 euros de dommages et intérêts. "Il dit avoir rencontré l’intervieweur "dans la salle des profs de la faculté d’Assas", précise-t-il à Libération. "Il m’a demandé mon avis sur un peu tout, j’ai soliloqué, parlé à bâtons rompus. C’était une conversation privée. Ce n’est qu’ensuite que j’ai découvert mes propos sur Internet, présentés comme une interview", ajoute-t-il.
"Bâtons rompus". C’est le mot.
Du côté de l’intervieweur, on dément toute tromperie. "Notre client et M. Martinez ont échangé des SMS où il se présentait explicitement comme journaliste. La discussion a duré 1h30 et nous en avons produit les enregistrements : on y entend notre client indiquer qu’il s’agit d’une interview", précisent ses avocats à Libération.
> Edit 23 mai, 12h45 :
Afin de répondre aux accusations de Martinez, le journaliste et son avocat ont mis en ligne les enregistrements des conversations . Dans l'un deux, le journaliste indique clairement qu'il s'agit là d'une "interview" :