Emmanuel Macron veut une Allemagne plus keynésienne

Publié à 00h05, le 05 avril 2013 , Modifié à 00h38, le 05 avril 2013

Emmanuel Macron veut une Allemagne plus keynésienne
Emmanuel Macron, jeudi 4 avril, à Science Po.

COUCOU ANGELA - Emmanuel Macron, le secrétaire général adjoint de l'Elysée s'est prononcé ce jeudi 4 avril pour une Allemagne plus keynésienne, prête à mettre au pot européen une partie des dizaines de milliards de son excédent commercial.

Invité à un forum organisé par Libérationà Science Po Paris, le trentenaire assure en préambule qu'il ne parle qu'en son "nom propre" et ne porte "pas de parole officielle".

Puis ce très proche collaborateur du président de la République, chargé des questions économiques, se lance dans un exposé d'une petite demi-heure sur ce qu'il appelle le "labyrinthe de la défiance" en Europe. Et ce qu'il a à dire ne va pas forcément plaire outre-Rhin.

L'ancien associé-gérant chez Rothschild en vient rapidement à la complexe relation diplomatico-économique entre la France et l'Allemagne : 

Le débat aujourd'hui qui est interdit, et c'est pour ça que je prenais ces précautions en entrant, c'est le couple Franco-Allemand. J'entends souvent des idioties disant qu'il n'y a pas de couple franco-allemand, ce n'est pas vrai puisqu'il n'y a pas d'Europe sans le couple Franco-Allemand. Et d'ailleurs la France ne pourrait pas avancer sans l'Allemagne.

Donc il y a une intimité quotidienne dans nos relations.

Mais il y a un tabou au niveau européen qu'on aborde de manière bilatérale, très ouverte, vive mais ouverte, c'est savoir ce qu'on doit faire du surplus allemand.

"Monsieur superlatif" comme le surnomme Le Monde a laché les deux mots fatidiques. Le surplus allemand. Un excédent commercial de 188 milliards d'euros en 2012.

Le grand copain du ministre du Redressement productif poursuit en utilisant une image sportive tout en taclant, l'air de rien, la chancelière allemande : 

Les allemands ont fait des efforts par le passé. Leur intelligence et leur chance pour partie -  car ce n'est pas madame Merkel qui a fait ces efforts, c'est son prédécesseur [Gerhard Schröder, ndlr] - c'est que les efforts structurels ont été faits avant la crise.

Donc ils sont dans une situation bien meilleure que la nôtre. Et dans un contexte où les séances de musculation étant faites avant le régime qu'on impose à tout le monde, ils aspirent aujourd'hui toute l'énergie du reste de la zone. 

Et le secrétaire général adjoint de l'Elysée de poser une série de questions purement rhétoriques : 

Dans la mesure où on impose une cohérence budgétaire à beaucoup d'états qui font des efforts très durs, comment utiliser l'excédent allemand ?

Est-ce qu'ils ne doivent pas faire de la relance ?

Est-ce que les allemands ne doivent pas être un peu plus keynésiens en ce moment alors que nous devrions être sans doute plus ricardiens et de manière générale plus brutaux ou plus allemands que nous ne l'avons été par le passé ?

C'est un vrai débat. Mais c'est celui là qu'on doit mener et qui nous permettra de sortir de l'impasse.

Sur un autre vrai débat, celui du fédéralisme européen, Emmanuel Macron a aussi un avis. Tranché : 

Aller devant les peuples faire le fédéralisme...ils vous diront non ! Et ils vous diront non pour de bonnes raisons : on ne leur vend que de l'austérité et de la misère. 

Sous le jargon de l'énarque, Emmanuel Macron pense pour l'Europe comme Pierre Reverdy pour la vie "qu'il n'y a pas d'amour mais des preuves d'amour". Et de fustiger les eurosceptiques "criminels" : 

Il faut en finir avec une espèce d'irresponsabilité -si je puis dire - criminelle que longtemps les différents politiques nationaux ont eu qui consistait à dire vos problèmes viennent de là-bas : à Bruxelles, les bureaucrates.

On continue à le faire trop souvent et tant qu'on arrêtera pas ça on pourra pas construire grand chose sur l'Europe et l'euro.

Invité le 28 mars sur France 2, François Hollande avait diplomatiquement évoqué une "tension amicale" avec la chancelière.

On est dans cette tension amicale avec l’Allemagne qui, comme vous le savez, madame MERKEL n’a pas les mêmes idées que moi mais nous avons une obligation tous les deux : faire que l’Europe puisse avancer. Nous avons maintenant un débat [...] sur l'austérité.

Emmanuel Macron vient d'en flécher le "tabou".

Du rab sur le Lab

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