Julien Dray : "La méthode Aubry-Ayrault n'est pas la bonne"

Publié à 18h09, le 18 juillet 2012 , Modifié à 18h22, le 18 juillet 2012

Julien Dray : "La méthode Aubry-Ayrault n'est pas la bonne"
Julien Dray, alors qu'il était encore député, à l'Assemblée nationale en 2010. (Maxppp)

INTERVIEW. L'ex-député, qui revendique une position de "sage" au sein du PS, l’assure : la solidarité et l'unité à tout prix, prônées par Jean-Marc Ayrault et Martine Aubry ne sont pas une bonne méthode. Auteur d’une contribution "théâtrale", il plaide au contraire pour une ouverture au débat, lors du prochain congrès de Toulouse.

  1. "Aujourd'hui, la direction du PS a l'angoisse de voir le débat partir dans tous les sens"

    Pourquoi avoir présenté votre contribution sous forme d'une pièce de théâtre ? 

    J'ai essayé de trouver une forme qui ne soit pas lassante, qui soit ludique. Je sais ce que c'est qu'un congrès du Parti socialiste, c'est difficile pour les lectrices et les lecteurs d'avoir à lire des textes formatés de la même manière. Ca me permet aussi de rentrer plus directement dans les sujets. On n'est pas obligé de faire dans les prudences de langage. 

    Vous dites qu'il faut répondre à l'urgence en donnant du sens, comment donne-t-on du sens concrètement ? 

    La première question que j'essaie de poser, c'est : "est ce que la gauche c'est simplement une alternance ?Est ce que c'est juste un vote contre Sarkozy ?" C'est la première des angoisses des militants. Je demande si on est une simple alternance, ou si on peut être une véritable alternative. 

    J'évoque les expériences passées de la gauche au pouvoir. Et c'est important car tout se joue au départ. On ne peut pas croire que 2 ou 3 ans après on va retrouver des marges des manoeuvre pour changer la société. C'est un congrès décisif. 

    Et concrètement, que faire ? 

    Une grande partie du texte est consacrée à l'Europe. L'Europe, c'est le noeud et le levier de nos problèmes. Si on reste dans la contrainte budgétaire, on n'a pas de marge de manoeuvre. En termes concrets, il faut desserrer la contrainte budgetaire européenne. Il faut un plan de relance européen dix fois supérieur à l'actuel. Et derrière il y a toute une méthodologie pour répartir les gains de productivité. Je souhaite poser des actes fondateurs, pour pouvoir discuter de l'alternative à l'échelle de la planète. Je ne veux pas être uniquement dans le débat théorique. 

    Vous êtes le seul signataire de votre contribution, pourquoi ?

    C'est une nouvelle démarque que j'entreprends. Je ne suis pas dans le débauchage, je n'expose pas les biceps. Je ne suis pas dans une négociation interne. Là, je suis dans une démarque idéologique. Une gauche qui ne débat pas c'est une gauche qui se paralyse, je souhaite que mes questions suscitent un débat. 

    Mais on vous dit très isolé, grillé, comment voyez vous votre place au sein du PS aujourd'hui ? 

    Cela conforte ceux qui pensent que je suis seul dans leurs certitude, tant mieux pour eux. Aujourd'hui, j'ai plutôt une position de sage. L'avantage c'est l'expérience, j'essaie de la transmettre. Je sais qu'elles sont les erreurs du passé et ce qu'on peut éviter. Mon rôle est d'interpeler. Et je peux le faire parce que je n'ai aucune chapelle, aucune contrainte. 

    Vous pensez que la démarche de Martine Aubry et Jean-Marc Ayrault va dans le bon sens ? 

    Si tout est joué à l'avance avant le congrès, ce n'est pas la bonne méthode. Cela assèche le parti qui a besoin d'être un acteur. On nous dit qu'on ne va pas être un parti godillot, mais dans ce cas, il ne faut pas tuer le débat au nom du rassemblement. Les débats ne doivent pas se faire dans l'obscurité des cabinets. 

    Vous allez présenter une motion lors du congrès ?

    On verra, chaque chose en son temps. Step by step. On verra ce qu'il se passe d'ici là. 

    Qu'est ce qui pourrait vous amener à porter une motion ? 

    Si le débat n'a pas lieu, cela pourrait me pousser à présenter une motion. Ou si on présente des synthèses molles, des textes avec des formules bien écrites mais sans conséquences. Tout ça, je pense que ce n'est pas bien. 

    Quel est votre scénario idéal pour l'avenir de la direction du Parti socialiste ? 

    Pour la présidence, ils se débrouillent entre eux. Je n'ai pas envie d'entrer dans ce jeu. Si le seul argument c'est "solidarité et discipline", on peut le faire avec d'autres qu'avec moi. A l'époque où j'étais à la direction du PS, nous n'avions pas verrouillé les discussions. Mais aujourd'hui, ils ont l'angoisse de voir le débat partir dans tous les sens. Je pense que c'est une erreur.

    Vous militez aujourd'hui à Saint-Michel-sur-Orge, vous comptez vous présenter aux municipales en 2014 ?

    La vie réserve beaucoup de surprises, c'est ce qui fait son charme … mais ce n'est pas le moment d'évoquer cela. Je ne suis pas dans un calcul, je ne suis pas dans une démarche électorale.

     

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