Stéphane Le Foll a publiquement pris position dans le conflit qui oppose les éleveurs laitiers et le groupe Lactalis. Le ministre de l'Agriculture a ainsi considéré samedi 27 août qu'il n'était "pas acceptable" que l'entreprise "paye le prix du lait le plus bas de toutes les laiteries en France". Mais s'il essaye d'encourager les négociations, pour le moment en échec, entre les agriculteurs et Lactalis, il explique dans le même temps ne pas avoir de "moyen de pression direct" sur le PDG de cette entreprise pour lui faire modifier ses prix d'achat.
Ce qui s'est traduit par une séquence légèrement maladroite, ce lundi 29 août sur France Info, au sujet de ce très discret industriel cible de la colère des éleveurs (l'administrateur des Jeunes Agriculteurs Yohann Barbe a souhaité que Stéphane Le Foll "s'implique un peu plus" dans la crise actuelle et a estimé qu'il devait "appeler Lactalis tous les jours") :
"- Stéphane Le Foll : Je suis encore bien sûr disponible pour faciliter ou pour pousser au dialogue. Mais je n'ai pas de moyen de pression direct [sur le PDG de Lactalis, monsieur Besnier].
- France Info : Vous l'avez déjà rencontré ?
- Stéphane Le Foll : On ne le voit jamais. Je ne l'ai jamais vu, je n'ai pas son portable.
- France Info : Ni son fixe ?
- Stéphane Le Foll : Enfin son fixe... je n'ai jamais eu de relation avec...
- France Info : Demandez-lui de venir vous voir au ministère !?
- Stéphane Le Foll : Oui bien sûr, non mais attendez. Je n'ai pas de conseil, ce matin, à recevoir de quiconque et je vais pas me mettre à répondre comme ça, en disant : 'C'est moi qui vais téléphoner à monsieur Besnier, je vais le convoquer'. Monsieur Besnier est un PDG d'une entreprise dont, je vous le répète, je n'ai pas le numéro de téléphone direct - y'en a beaucoup d'autres avec lesquels j'ai des relations, même monsieur Bigard [le PDG du premier groupe de transformation de viande français Bigard, lui aussi avare d'apparitions publiques, ndlr] que j'ai rencontré, mais monsieur Besnier jamais ni ne m'a demandé un rendez-vous, ni ne m'a demandé un contact, ni n'a souhaité me rencontrer.
"
.@SLeFoll ne connaît pas le président de #Lactalis : "je ne l'ai jamais vu, je n'ai pas son portable" https://t.co/i8YjvcyZnq
— franceinfo (@franceinfo) 29 août 2016
Une sorte d'aveu malvenu qui donne le sentiment que le ministre en charge du dossier est à l'écart des acteurs de terrain, tel François Hollande cherchant désespérément le numéro personnel de Marine Le Pen. Cette sortie intervient après l'échec de deux sessions de négociations sur le prix du lait entre Lactalis et les principaux syndicats agricoles, qui reprochent au numéro un mondial des produits laitiers de payer un prix trop bas. Pour autant, le ministre de l'Agriculture a expliqué faire son possible dans cette crise, agissant pour que les négociations aboutissent. Mais il ne lui revient pas de fixer les prix du lait.
"Là où j'ai des responsabilités, là où le droit me donne des possibilités d'agir, j'agis, a-t-il fait valoir. Là, on est dans des relations commerciales directes. Dire au ministre de l'Agriculture qu'il va être celui qui va négocier les prix, je l'ai déjà dit une dizaine de fois, ou on change d'économie complètement - c'est possible - mais dans le cadre de cette économie aujourd'hui, je n'ai pas directement de moyen de pression sur Lactalis."
"N'empêche que nous avons bien sûr des contacts avec cette entreprise et nous avons poussé à ce qu'elle reprenne les négociations", a ajouté le ministre, qui présentera mardi aux professionnels du secteur laitier le plan de régulation de la production française demandé par la Commission européenne en juillet, en contrepartie de nouvelles aides financières. Et Stéphane Le Foll d'asséner :
"Le gouvernement ne regarde pas passer les trains. Comment on peut dire des choses comme ça ? Depuis le temps, en 2014, quand il y avait eu la première crise [laitière], le médiateur avait joué son rôle. La France et le gouvernement ont agi à l'échelle européenne pour sortir des quotas laitiers et remettre, pour la première fois depuis 2008, de la régulation laitière à l'échelle européenne. Vous croyez que les inerties, la capacité politique à se mobiliser pour changer les choses, c'est on se croise les bras ? On attend ? Je ne ferais rien ? C'est pas acceptable de dire des choses comme ça.
"