"On s’attaque à des choses qui n’ont jamais été faites, on s’attend à faire du bruit. On veut marquer." Ainsi s'exprime David Masson-Weyl, président du Collectif Marianne lié au FN. Le jeune homme de 22 ans évoque sur RTL la future création au sein de Sciences-Po Paris d'une association d'étudiants sympathisants du Front national. Une première pour la célèbre école de la rue Saint-Guillaume.
L'autre originalité de cette structure – dont la reconnaissance devra être validée par un vote des étudiants de Sciences-Po, début octobre – tient dans l'origine politique des personnes qui en sont à l'initiative : quatre étudiants en Master qui viennent du FN mais aussi de l'UMP, du PS et du Front de gauche. "J'ai rencontré Marine Le Pen en octobre 2014 et je lui ai fait part de ma volonté de lancer une antenne du FN à Siences-Po", raconte au Lab Aymeric Merlaud, adhérent frontiste et ancien candidat aux départementales en Maine-et-Loire.
Il ajoute :
"A partir du moment où elle a validé cette option, j'ai commencé à travailler en sous-marin pour me rapprocher de certains militants désabusés.
"
Viennent ensuite Thomas Laval, ancien adhérent UMP, Antoine Chudzik, ex-Parti socialiste et Davy Rodriguez, ancien militant du Front de gauche. Tous trois sont, comme Aymeric Merlaud, étudiants en Master. Ils ont tous, depuis, adhéré au FN. "Ce ne sont pas du tout des profils d'étudiants de Sciences-Po classiques assis sur un balai mais des purs produits de la méritocratie républicaine", confie au Lab un proche de Marine Le Pen. De fait, d'après Aymeric Merlaud, trois des quatre étudiants suscités bénéficient d'une bourse au mérite.
Encarté à l'UMP dès 2011, Thomas Laval a participé à la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy. "J'étais derrière lui au meeting de Dijon", s'amuse-t-il auprès du Lab. Mais, explique-t-il, il s'est très vite interrogé sur le positionnement de son parti concernant l'Europe ou de l'immigration. Exactement comme Antoine Chudzik, adhérent au PS et membre des MJS à partir de 2011. Lui a voté Ségolène Royal lors de la primaire de la gauche. "Puis j'ai fait la campagne de François Hollande et j'ai voté pour un candidat qui promettait d'arrêter l'austérité en Europe et critiquait les hausses d'impôts menées par Nicolas Sarkozy. Et il a fait l'inverse", se justifie-t-il.
Prenant de plus en plus leurs distances avec leurs partis respectifs, les deux étudiants se découvrent une tentation frontiste. Ils décident alors de contacter Marine Le Pen.En mai dernier, Florian Philippot les reçoit et, dans la foulée, ils prennent leur carte au Front national. "À partir de là, certains amis m'ont dit qu'ils n'étaient pas sûrs qu'on puisse rester en contact, raconte Antoine Chudzik. Mais le FN a changé. Par exemple, le fait que Marine Le Pen se soit très clairement démarquée de toute provocation antisémite me rassure."
C'est justement pour "faire changer ce regard sur le FN" que ces étudiants, épaulés par David Masson-Weyl, veulent donc créer une antenne du parti à Sciences-Po Paris. Aymeric Merlaud précise :
"Notre but, c'est de montrer que les jeunes qui votent FN ne sont pas débiles. On veut aussi prouver qu'il y a une jeunesse qui soutient Marine Le Pen. Et puis pourquoi le premier parti de France ne pourrait pas être représenté à Sciences-Po alors que tous les autres, même Nouvelle Donne, le sont ?
"
Ils reconnaissent néanmoins que leur tâche ne sera pas facile. "Il y a beaucoup d'opposition au FN à Sciences-Po, admet Thomas Laval. Mais il y a un vrai vivier d'étudiants patriotes." Antoine Chudzik va plus loin. Il dit :
"À Sciences-Po, cela reste des enfants de bourgeois. Ce ne sont pas des gens qui ont vécu dans la difficulté. Moi, ce qui m'inquiète par exemple, c'est ce qu'on peut faire pour les ouvriers. Et parfois, je me retrouve en face de personnes qui sont obsédées par le droit de vote des étrangers. Mais moi j'en ai rien à faire du droit de vote des étrangers !
"
Sciences-Po n'est qu'une étape. Le FN pourrait ensuite vouloir intégrer HEC et Normale Supérieure.