Le Sénat se prononce sur l'élargissement de l'accès aux données de connexion par les services de renseignement

Publié à 16h33, le 10 décembre 2013 , Modifié à 08h49, le 11 décembre 2013

Le Sénat se prononce sur l'élargissement de l'accès aux données de connexion par les services de renseignement
Sénat (Maxppp).

LIVE - Le Sénat examine en deuxième lecture ce mardi 10 décembre la loi de programmation militaire dont l'un des éléments fait se lever les acteurs du numérique : l'article 13.

>> Edit: A 20h26, l'amendement de suppression de l'article 13 est rejeté par les Sénateurs. Dans la foulée, la Chambre haute adopte l'article de la loi sans l'avoir modifié.

Passé totalement inaperçu lors de son examen en première lecture au Sénat et à l'Assemblée, cet article légalise l'accès administratif - sans autorisation judiciaire préalable - aux données de connexion, notamment issues de la géolocalisation, pour des raisons de sécurité intérieure.

Ces données, stockées par les fournisseurs d'accès à internet et les hébergeurs, pourront être consultées par les services de renseignements. Le texte s'aligne sur le régime des écoutes téléphoniques, appelées "interceptions de sécurité".

Le champ d'action est également plus vaste : ces données pourront être demandées pour prévenir les actes de terrorisme mais aussi, et c'est la nouveauté, en invoquant "la sécurité nationale" ou "la sauvegarde des éléments essentiels du potentiel scientifique et économique de la France".

Plusieurs acteurs du numérique comme le Conseil national du numérique (CNN) ou l'IAB France ont dénoncé une atteinte à "la protection de la vie privée et à la liberté du commerce et d'entreprendre".

A l'inverse, les défenseurs du texte, comme le président de la commission des lois au Sénat Jean-Pierre Sueur, expliquent que l'article "encadre la pratique actuelle des services de renseignements" et rend "plus strict" le régime juridique de la géolocalisation en temps réel en imposant par exemple l'autorisation écrite du Premier ministre.

[>> voir à ce sujet cette vidéo du Sénat]

Lors du passage du texte à l'Assemblée en première lecture, un député UMP, Lionel Tardy, a voulu alerter contre cet article en déposant une vingtaine d'amendements. Il dénonçait des "mesures intrusives et insuffisamment encadrées". Il s'est vu opposer une fin de non recevoir par le gouvernement.

Ce mardi, seuls des sénateurs écologistes reviennent à l'attaque avec un amendement demandant de supprimer l'article 13.

Le gouvernement espère à l'inverse un vote conforme du Sénat qui permettrait de ne pas retourner à l'Assemblée et d'adopter définitivement la loi pour le 1er janvier 2014.

>> Le Lab propose ses morceaux choisis des débats de ce mardi 10 décembre.

#S'adapter aux "technologies modernes"

(image videos.senat.fr)

Le ministre de la Défense salue le "dialogue fructueux" entre les deux assemblées qui a permis d'aboutir à "un régime juridique complet". Jean-Yves Le Drian estime en effet absolument nécessaire l'élargissement de l'accès aux données de connexion par les services de renseignement :

Leur capacité doit être adaptée au développement des technologies modernes. Ne pas leur donner ces moyens serait manquer à notre devoir élémentaire.

Quatre mois, 10 jours ... plusieurs périodes ont été envisagées pour autoriser l'accès aux données issues de la géolocalisation. Le texte examiné par le Sénat s'arrête finalement sur une durée maximale de 30 jours. Au-delà de ce mois, les services de renseignement n'auront plus accès à ces données ciblées.

#Une "pseudo polémique"

(image videos.senat.fr)

Jean-Louis Carrère, président socialiste de la commission des affaires étrangères au Sénat, dénonce une "pseudo polémique portée par des gens qui permettent beaucoup d'écoutes sur un spectre très large et qui viendraient nous reprocher d'être liberticides" :

Je suis quelque peu perturbé par le fait que je vois de grands opérateurs se poser des questions sur l’éthiqueet le côté liberticide de ce que nous aurions produit.

Mais mes chers amis, nous sommes dans le droit fil du respect des libertés et de l’accroissement des libertés individuelles ! Et ces braves gens qui s’en emparent, et disent qu’il pourrait y avoir un accès liberticide, feraient mieux de lire nos conclusions et nos débats pour s’imprégner du sens des responsabilités qui est le notre.

#Les écolos veulent la suppression de l'article 13

(image videos.senat.fr)

Elle n'y consacre qu'un petit mot lors de la discussion générale mais Corinne Bouchoux représente le groupe écologiste - qui votera contre la loi de programmation militaire - et demande la suppression de l'article en question par amendement :

Nous pensons aujourd’hui qu’au vu de la polémique, [l'article 13] n’offre peut-être pas toutes les garanties dans une démocratie telle que nous la souhaitons.

#Majors du web, balayez devant votre porte !

Avant le vote des articles, Jean-Pierre Sueur, président de la commission des lois, s'emporte contre les "majors du web" qui ont voulu créer "un emballement" avec "une série de déclarations sur les réseaux sociaux" pour monter l'article 13 en épingle alors que tout le monde avait au préalable salué cet aspect de la loi. Il leur adresse ce message :

C’est un texte qui ne comprend que des garanties nouvelles et on nous accuse de porter atteinte à la liberté. Nous disons à ces majors du web qu’il serait bien qu’elles balaient devant leur porte ! (...)

Je rappelle que ces majors du web ont d’abord nié avoir fourni des informations à la NSA et au programme PRISM.

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