Manuel Valls est-il de droite ?

Publié à 15h46, le 21 août 2012 , Modifié à 15h54, le 21 août 2012

Manuel Valls est-il de droite ?
Manuel Valls, en juillet 2012. (Maxppp)

Notre blogueur Vogelsong s'interroge sur l'orientation politique du ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, à travers une série d'ambiguïtés qu'il détaille. 

  1. "Il a choisi la gauche tout en se positionnant sur des thématiques conservatrices ou libérales"

    De gauche ? De droite ? Ce type de question ne devrait pas être soumis à examen. Manuel Valls (ou quiconque) s’il le revendique, appartient au camp qu’il choisit. En y apportant sa sensibilité, ses préférences. Manuel Valls s’est toujours revendiqué comme tel, de gauche. Avec une certaine force d’ailleurs. Clamant son appartenance, son amour à ce champ politique. Évoquant aussi sa famille, républicaine fuyant le franquisme. Pourtant à l’occasion de l’affaire des expulsions de Rroms, la question, déjà ancienne, revient. Parce qu’elle titille, elle gêne, elle exaspère même. Est-ce que finalement ce ministre appartient à la "gauche" ? Et bien au-delà des thématiques sécuritaires dont il a fait sa vitrine, de quel bois est-il fait ?

    Sur le blog de Laurent Mucchielli, Jacques Le Bohec dresse un portrait au vitriol du ministre de l’Intérieur du gouvernement Ayrault. Dans la même lignée que ses prédécesseurs de droite. Il esquisse aussi un profil plus général de l’homme. De ses prises de positions sociales, sociétales.

    Manuel Valls dans la grande tradition des pragmatiques de la politique française"veut rompre avec la magie du verbe". C’est à l’occasion du débat sur les retraites initié par Eric Woerth qu’il prendra position pour l’augmentation de la durée de cotisation. Il ne fut, bien sûr, pas le seul à gauche, surtout au sein du PS. La magie du verbe qu’il vilipendait, cette ritournelle qui fustige les promesses déçues de la gauche n’est pas nouvelle. Mais Manuel Valls, innove en bon moderniste qu’il se croit. Cette fois c’est à usage interne, au sein même de la gauche qu’il opère. Début juin 2012, Jean-François Copé aux abois après la défaite de la droite à la présidentielle dénonçait les folies "que constituent les cadeaux électoraux" du gouvernement, le retour partiel à la retraite à 60 ans, qui vont conduire à "une hausse massive des impôts". On est ici, à peu près au même endroit.

    Pas si loin non plus dans son approche économique, il prône la "responsabilité individuelle", et le "refus de l’assistanat" pour finalement "réconcilier la gauche avec la pensée libérale". Que le libéralisme économique se soit largement diffusé au sein PS est une évidence. Mais il restait une différence dans la structuration argumentaire avec la droite. Une sorte de réticence à promouvoir l’hostilité générale au sein de la société. Une conscience, peut-être, des dégâts que cela causerait aux citoyens dont ils se pensent représentatifs. Une sorte d’hygiène mentale rétive à l’inéluctable, des rémanences d’une jeune insoumission. Or Manuel Valls, lui, se jette corps et âme dans la caricature gauchisante tel un Eric Brunet qui déclarait dans une émission de TV, bêtise en bandoulière : "C’est l’assistanat qui appauvrit la France".

    Le gouvernement dispose aussi de bon nombre d’adeptes pro nucléaire ou pro OGM. Manuel Valls se retrouve étonnement dans les deux camps. Il fera même un "abécédaire optimiste" dans une vidéo (assez singulière) pour chanter une ode aux OGM et au progrès. Reprenant termes pour termes les éléments de langage des groupes industriels visant à abolir toute tentation alternative. On trouve peu ou pas de gens à droite anti OGM ou antinucléaire. Non pas que cette condition soit exclusive pour être classé conservateur, mais il s’agit d’un marqueur fort. Un marqueur qui va au-delà du progrès, qui favorise surtout des intérêts industriels, ceux du capital.

    Sociétalement, il épouse la rigidité supposée de son pays. Opposé à la proposition de Daniel Vaillant sur la légalisation du cannabis, il parfait ainsi son profil d’homme à poigne anti laxiste. Car comme tout le monde le sait, les drogues douces sont un fléau social et le premier sas vers les substances dévastatrices. Même si c’est faux, c’est ce que pense la plupart des experts ayant pignon sur rue (et sur médias) et dont on inonde de leur pensée l’espace public. C’est aussi la posture simpliste de la droite sur ce thème. Une posture consensuelle qui convient parfaitement à Manuel Valls.

    Manuel Valls a choisi la gauche tout en se positionnant sur des thématiques conservatrices ou libérales. Des lignes qu’il partage avec certains de ses camarades socialistes, certes, mais dont lui s’est fait une spécificité. Une marque de fabrique. Un système. C’est en cela qu’il est très apprécié des médias. Avec Manuel Valls on est rarement déçu, puisqu’il pose invariablement son empreinte "droitière" sur les affaires de "gauche" dont il a la charge. Suscitant ainsi remous, commentaires, indignation.

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