François Hollande est-il assez offensif et pugnace ? Ses propositions sont-elles assez "fracassantes" ? C'est la question que se pose notre blogueur Guy Birenbaum, incroyable réminiscence historique à l'appui...
Soyez fracassant François !
Samedi le Figaro racontait comment vendredi soir, à Laguenne, non loin de Tulle, le candidat socialiste à la présidentielle avait livré quelques détails sur sa campagne. Une phrase entre guillemets à propos de son futur programme m'a marqué, ce d'autant que le Figaroen faisait son titre : "Il n'y aura pas d'annonce fracassante qui sera faite".
"Fracassante"... Ce mot, je l'avais déjà entendu quelque part.
J'étais prêt à parier qu'il s'agissait d'une expression de François Mitterrand.
Après de multiples recherches infructueuses, c'est grâce à la collaboration de mon compère Laurent Guimier que j'ai fini par retrouver ce que je cherchais...
La réminiscence historique m'a donné le vertige. Que François Hollande ait utilisé le terme "fracassante" au hasard ou pas, que son inconscient ait parlé ou pas.
Le 31 mai 1991, le président François Mitterrand était en visite à Grenoble pour le congrès de la Mutualité française. Il y a prononcé un discours fameux qui fit alors énormément parler (lisez-le).
Fiché au cœur de ce discours brillant et offensif un long dégagement du président sur la nécessité absolue en politique du débat, du dialogue, fut-il..."fracassant".
... Mais il est très important que cette discussion ait lieu partout, qu'elle se prolonge, que la vie civique s'aiguise, que un peu partout l'on reprenne goût à la chose publique. Quand je rencontre des adversaires politiques - et je n'en manque pas - moi, cela me fait plutôt plaisir, dans la mesure où ils gardent un peu raison ; enfin beaucoup la gardent et les autres ne sont pas intéressants. Cela m'intéresse beaucoup de pouvoir discuter, parce que nous sommes ensemble. La démocratie, nous la faisons. C'est de notre dialogue, fût-il aigu, que naît la vie républicaine. Il faut l'entretenir à tout prix, il faut éviter les excès ou les sectarismes qui l'empêcheraient. Mais il faut avoir, comment dirais-je, l'orgueil de ce que l'on est, et je crois, moi, toujours à la victoire de ceux qui croient dans ce qu'ils croient et pas simplement à une vague apparence, circonstance, ou émotion. Il faut qu'il y ait véritablement combat des idées et que tous ceux qui peuvent peser sur l'accroissement des injustices ou au contraire sur leur réduction, que tous ceux-là engagent un grand dialogue, quelque fois fracassant, afin de passionner les masses et de mobiliser un pays comme le nôtre - croyez-moi, il s'en portera mieux - plutôt que de mettre de côté ce que l'on a en soi-même de plus fort, et je crois de meilleur, par un souci qui comporte aussi ses vertus mais qui finirait par annihiler la vie profonde d'une République...
Forcément.
Quand on lit cet hymne inspiré à la politique, à la mobilisation, au "combat des idées" et au "dialogue fracassant", forcément, on regrette un peu de lire que le candidat Hollande a décidé qu'il n'y aurait "pas d'annonce fracassante"...
Surtout, surtout, en ce 8 janvier 2012 où François Hollande se rend sur la tombe de François Mitterrand, à Jarnac, pour la date anniversaire de sa mort, le 8 janvier 1996.
Quand le hasard ou l'inconscient croisent l'Histoire...
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