"Redressement dans la justice", "intégration solidaire", "destin commun". Ces mots-clés, Jean-Marc Ayrault les a utilisés dans le cadre de sa déclaration de politique générale, le 3 juillet, devant l'Assemblée nationale.
Des concepts qui ne peuvent pas être compris par tous. Et en particulier par les personnes avec un handicap mental, soit plus de 600.000 personnes en France.
Pour cela, le gouvernement, via le ministère délégué aux personnes handicapés, a mis en ligne une version "facile à lire et comprendre".
C'est le 24 juillet, soit trois semaines plus tard, que ce texte a été disponible dans sa version accessible. Si le temps de traduction a été long, c'est une première pour un discours gouvernemental.
Pour mieux comprendre, voici un extrait du discours originel, sur la dette :
Mesdames, Messieurs les Députés, je vous l’ai dit, le rétablissement des comptes publics est un enjeu majeur et le président de la République a fixé des priorités : la jeunesse, la sécurité et la justice. Elles seront respectées sans pour autant creuser nos déficits et notre dette. Cela exigera des choix dans tous les autres secteurs. Ces efforts dépendront non pas d’une règle mathématique, d’une règle mathématique aveugle et absurde, mais de l’évaluation des politiques conduites mission par mission et de leur efficacité.
Et là, ce qu'on peut dire sur la dette, après traduction :
Rembourser la dette
La France a emprunté de l’argent pendant très longtemps. Cet argent a été emprunté pour faire fonctionner le pays.
La France dépense plus d’argent qu’elle en a.
On dit que la France a une dette. La dette de la France est très importante.
Aujourd’hui, la France doit rembourser sa dette.
Le remboursement de la dette coute très cher et empêche le pays de faire d’autres choses comme :
construire des écoles
construire des hôpitaux
développer les transports
Le Gouvernement veut résoudre le problème de la dette. Il faut dépenser moins d’argent. J’ai demandé aux Ministres de faire des économies.
Avec l'aide de l'Unapei, fédération d’associations de défense des intérêts des personnes handicapées mentales, le ministère de Marie-Arlette Carlotti a pu rendre accessible aux personnes ayant une déficience mentale.
Plus de 90 minutes de discours, avec de nombreux concepts abstraits, à traduire, c'est la tâche qui a été confiée à cette fédération et à l'association Nous aussi. Une équipe de quatre personnes a été mobilisée et formée par les associations.
Bénévolement pour le moment, et sur proposition de l'Unapei. "C'est bénévole, je ne peux pas mobiliser l'Unapei trop longtemps", regrette la ministre Marie-Arlette Carlotti qui espère pouvoir convaincre ses collègues du gouvernement d'en faire de même.
Elle explique :
Convaincre ses collègues, c'est commencer par le faire soit même. Il faudrait que je le fasse plus souvent sur le site du ministère, et m'appuyer sur ce qu'a dit le Premier ministre : la question des personnes handicapées ne concernent pas uniquement la ministre des personnes handicapées.
Le 29 octobre, le ministère délégué aux personnes handicapées a publié un autre discours en version "facile à lire et à comprendre". Un discours de Marie-Arlette Carlotti, prononcé le 2 octobre et diffusé dans cette version le 29 du même mois.
De l'avis de la ministre, comme des associations, systématiser cette opération ne pose pas un réel problème financier."Les moyens financiers ne doivent pas être si lourds que ça", songe la ministre. "Pour l'instant ca marche sur du bénévolat, mais ca ne peut pas dureré, précise-t-elle.
Thierry Nouvel, directeur général de l'Unapei ajoute que "dans l'état actuel des choses, cela coûte simplement du temps. Soit du temps de bénévolat, qui n'a pas de prix, si on devait aller plus loin, ça aurait forcement un coût." Mais la fédération a lancé des recherches pour faire développer un système informatique automatisant ces opérations.
Mais l'objectif de la ministre est de pouvoir rendre accessible de cette manière les sites gouvernementaux ainsi que les démarches administratives. "La loi de 2005 parle d'accessiblilité universelle. On a plutôt tendance à parler de l'accessibilité dans les transports par exemple, liée à des handicaps visuels ou auditifs. Mais les personnes avec un handicap mental ont besoin d'avoir accès aux formalités". Un constat partagé par Thierry Nouvel qui se lamente qu'ils ne puissent eux-mêmes "remplir des formulaires pour percevoir leurs allocations".
Pour cela, la ministre déléguée se montre confiante. "Je pense que j'aurai le soutien du Premier ministre", espère-t-elle. Précisant : "Il me faut trouver des traducteurs, j'en cherche … il faudrait quelqu'un qui puisse faire ça à plein temps."