FACT-CHECKING - On ne la lui fait pas. Marine Le Pen ne veut pas croire que les milliers de migrants tentant d'entrer en Europe depuis des mois sont des réfugiés, c'est-à-dire des personnes fuyant le conflit armé ou la persécution, au sens de l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR). La présidente du Front national assure qu'il s'agit en réalité d'une immigration économique cachée. Et elle a une preuve pour appuyer ses propos : "99%" de ces personnes seraient des hommes, d'après ce qu'elle a pu voir sur "les images". Or, affirme-t-elle, quand on est un réfugié, on débarque en famille.
C'est la démonstration qu'a voulu faire Marine Le Pen ce 8 septembre sur RMC. Une démonstration qui, une fois confrontée aux statistiques, ne tient plus la route.
Voici ce qu'a expliqué la candidate aux régionales :
"- Marine Le Pen : Une toute petite minorité d’entre eux sont réellement des réfugiés politiques. Ils sont ultra-minoritaires, vous m’entendez ? J’en veux pour preuve les images que je vois à la télévision. Moi j’ai vu les images des clandestins qui descendaient, qui étaient emmenés en Allemagne, de la Hongrie, etc. Eh bien sur ces images il y a 99% d’hommes.
- Jean-Jacques Bourdin : Il y a beaucoup de familles !
- Marine Le Pen : Non, pas beaucoup monsieur, une ultra-minorité ! (...) Des hommes qui quittent leur pays en laissant leurs familles là-bas, ce n’est pas pour fuir la persécution c’est évidemment pour des raisons économiques. Arrêtons de se raconter des histoires. Nous sommes confrontés à une immigration économique, une immigration d’installation.
"
Il n'y aurait donc pour ainsi dire que des hommes parmi les migrants arrivant en Europe - en Allemagne dans l'exemple cité par Marine Le Pen - originaires principalement de Syrie, d'Afghanistan et d'Érythrée. Pourtant, les chiffres de l'UNHCR contredisent cette affirmation.
Comme le montrent ces statistiques , plus de 350.000 personnes sont pour l'instant arrivées en Europe par la mer en 2015. Parmi elles :
- 72% d'hommes
- 13% de femmes
- 15% d'enfants
S'ils sont bien minoritaires, les femmes et les enfants comptent donc pour près de 30% des migrants et des réfugiés qui ont traversé la Méditerranée en 2015. Le chiffre est de 34% lorsqu'on s'intéresse à ceux qui ont transité par la Grèce. Ils ne sont en revanche plus que 22% à passer par l'Italie.
Comme le note le Huffington Post , l'Unicef souligne pour sa part que le nombre d'enfants cherchant refuge en Europe a augmenté de 75% par rapport à 2014.
Marine Le Pen assure également "qu'une toute petite minorité sont des réfugiés politiques". L'UNHCR est la première à expliquer qu'il existe effectivement des "migrations mixtes" qui mélangent les réfugiés et les migrants économiques. Mais le profil de ces migrants en 2015 est bien précis.
Selon l'UNHCR, 80% des arrivées proviennent des 10 pays générant le plus de réfugiés politiques ("World's top 10 refugee-producing countries") : 51% fuient la Syrie, 14% l'Afghanistan, 8% l’Érythrée, 4% le Nigeria ou encore 3% l'Irak. Ce qui fait dire au Haut commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Anthonio Guterres :
"Il s'agit principalement d'une crise de réfugiés et non pas seulement d'un phénomène migratoire. La majorité des arrivants en Grèce proviennent de régions où sévissent des conflits comme la Syrie, l'Irak ou l'Afghanistan. Ils fuient tout simplement afin de rester en vie.
"
Ajoutons que près de 3.000 migrants sont morts ou ont été portés disparus en mer en 2015.
Mais pour Marine Le Pen pas de doute, ces 350.000 déplacés viennent "évidemment pour des raisons économiques".
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