Notre éditorialiste Olivier Duhamel présente trois arguments contre l’interdiction des spectacles de Dieudonné.
Que Dieudonné soit antisémite, seuls ceux qui le sont en doutent.
Que l’antisémitisme soit détestable, seuls ceux qui le sont le contestent.
Et pourtant, dans une démocratie, interdire ses spectacles serait très contestable. Pour trois raisons.
> Raison de principe : on n’interdit pas a priori
En matière de libertés publiques, une démocratie réprime a posteriori, elle n’interdit pas a priori. Nul ne peut garantir que tel spectacle contiendra des propos antisémites, puisqu’il n’a pas encore eu lieu. La liberté d’expression s’impose a priori. Son abus contraire à la loi ne peut être sanctionné qu’a posteriori.
> Raison juridique : une interdiction générale violerait la loi
En l’état du droit, telle ou telle réunion peut être interdite pour trouble grave à l’ordre public. Si des manifestations violentes sont annoncées, ou si des propos racistes sont ouvertement programmés, l’interdiction est possible ponctuellement. Une interdiction absolue ne l’est pas.
> Raison pratique : les interdictions le servent
Il en fait le sel de ses spectacles. Ses partisans y voient la preuve de la réalité des complots qu’il dénonce. Plus on l’interdit, plus le nombre de ses fans augmente.
Condamnons ses propos, s’ils le méritent. Ignorons-les, ce qui serait peut-être plus efficace. Mais n’en faisons pas un martyr du système qu’il dénonce.