Vincennes, La Concorde : j'y étais

Publié à 19h51, le 15 avril 2012 , Modifié à 21h38, le 15 avril 2012

Vincennes, La Concorde : j'y étais
Nicolas Sarkozy et François Hollande, à Paris, le 15 avril 2012. (Maxppp)

Deux meetings, deux points de vue. Nos deux blogueurs Romain Pigenel et Rémi Bétin livrent leurs impressions, eux qui ont vécu de l'intérieur ce dernier grand rendez-vous avant le premier tour.

  1. Récit des meetings

    Ce dimanche 15 avril, François Hollande et Nicolas Sarkozy ont organisé deux grands meetings. L'un sur l'esplanade du château de Vincennes, l'autre sur la place de la Concorde. 

    Nos deux blogueurs Romain Pigenel, un des animateurs de la campagne internet de François Hollande et Rémi Bétin, conseiller municipal Démocratie locale et Nouvelles technologies à Longjumeau, collaborateur parlementaire et étudiant à Sciences Po y étaient. 

    Ils racontent.

  2. A Vincennes, "On n’a jamais été aussi proche"

    Romain Pigenel est l'un des animateurs de la campagne internet de François Hollande.

    D’abord le vent. Froid. Qui souffle autour du château de Vincennes aux environs de midi, lui donnant des allures de lande automnale. La crainte que ces conditions météorologiques peu clémentes ne découragent le public de venir au grand rassemblement. "Météo nationale, météo du capital !". Longue remontée des pelouses qui longent le fort pour atteindre l’esplanade. La scène, monumentale, surplombe les baraques à frites et les véhicules de chantier qui terminent l’installation.

    Puis les gens. D’abord un petit filet, qui devient un flux de plus en plus dense, se déversant depuis le métro, le RER, les arrêts de bus, les trottoirs. Une foule mélangée, des jeunes, des vieux, des moins jeunes, des moins vieux, de toutes les couleurs de peau et de vêtements, seuls, en groupes d’amis, avec des poussettes, des victuailles pour piqueniquer, des nappes, des chaises pliantes. "La fête à Neuneu", s’était gaussé auparavant un responsable du camp sarkozyste. Plus exactement, un rassemblement populaire, ce fameux "peuple de gauche" qui sort au grand jour pour se rassembler, réchauffer son cœur (à défaut de son corps) dans cette euphorie festive qui fait que la gauche reste la gauche.

    Puis la musique. En face, à l’autre bout de la ligne 1 du métro, on a appelé "la majorité silencieuse"à venir se compter. Ici, c’est une joie simple et bruyante qui se manifeste. Sur scène un orchestre de bal populaire rivalise avec les fanfares et battucadas qui cheminent au milieu de la foule en formation. Une clameur accueille l’arrivée de la troupe du Théâtre du Soleil, apportant avec elle l’immense marionnette de la justice qui avait déjà illuminé les manifestations contre la réforme des retraites. Elle se trémousse au son du zouk de Kassav’, qui, hasard ou coïncidence, joue sous le soleil qui arrive enfin à percer les nuages.

    Puis la marée humaine. Les ruisseaux d’arrivants ont finir par gonfler jusqu’à déborder le lit des parcours balisés. Vu de la scène ou du talus qui mène au fort, les images sont impressionnantes. Combien sont-ils, 80.000, 100.000, plus ? Les discours politiques commencent. Bertrand Delanoë rappelle à ceux qui l’avaient oublié ses impressionnants talents de tribun. Une émotion dramatique imprègne sa voix. Ici, dit-il, nous sommes venus nous rassembler sans haine, contre personne. Chacun comprend l’allusion à la Concorde, où l’on va faire huer les syndicats et la "minorité agissante". Lui aussi a mis fin au règne sans partage de la droite, au plan local. Il y a dix ans il appelait à un "changement d’ère"à Paris. Les militants se souviennent.

    Puis le candidat. On s’inquiète souvent de sa voix, de plus en plus éraillée, qui serait le signe de sa fatigue. Malgré le froid et le vent qui s’abat sur la scène, il démontre à ses détracteurs qu’il a en a encore "sous le pied". Une autre pratique du pouvoir, une France à rassembler, la nécessaire … rupture avec le désordre économique, politique et moral qui a régné en France depuis 5 ans. Les thèmes sont désormais connus et le ton peut-être moins vibrant qu’au Bourget. La situation a changé : "je suis prêt", il le dit et le répète, et c’est effectivement déjà plus un pré-discours de Président qu’un propos de candidat au destin mal assuré. La route s’est affirmé, le chemin s’est éclairci.

    Puis l’appel. Rien n’est fait, tout reste ouvert, tout va se jouer dans une semaine, au moment du vote. Donnez-moi la force, harangue-t-il le public, donnez-moi la force d’être le plus haut possible au premier tour, pour vous offrir l’alternance à l’issue du second. La Marseillaise explose. La foule suit. La température semble avoir repris quelques degrés depuis mon arrivée, quatre heures auparavant. Chacun repart, plus décidé que jamais, pour une dernière semaine de campagne avant la phase finale. "On n’a jamais été aussi proche", me souffle un collègue blogueur, les yeux perdus dans le lointain. Une pensée partagée par 100.000 esprits.

  3. Place de la Concorde, "Je n'ai pas vu de peur, je n'ai pas vu de doute"

     Un billet de Rémi Bétin - Blogueur Le Lab

    Conseiller municipal Démocratie locale et Nouvelles technologies à Longjumeau, collaborateur parlementaire et étudiant à Sciences Po.

    Le grand rassemblement de la Concorde restera pour moi la parfaite représentation de cette campagne présidentielle. D'abord annoncé comme impossible, il restera dans les mémoires comme un grand moment de ferveur populaire. Depuis des mois en effet, toute initiative de Nicolas Sarkozy est présentée comme une aventure impossible. Sa candidature ? Un suicide politique. Il insiste et se présente ? Trop tard, le rejet de sa personne serait si grand qu'un 21 avril à l'envers apparaîtrait très probable. Puis les gros titres sur le "match à 4" sont vite apparus délavés, à mesure que la dynamique de Nicolas Sarkozy apparaissait évidente. Aujourd'hui, on dit les soutiens du Président dépassés, en proie au doute, et on annonce un candidat socialiste déjà élu, si bien qu'il finit par le croire.

    Ce dimanche, le scénario s'est répété. La "majorité silencieuse" mobilisée par Nicolas Sarkozy ne devait pas se déplacer : la météo était trop incertaine, la gauche davantage habituée des manifestations de rue, l'événement prétendument improvisé (jusqu'à ce que Michaël Darmon révèle le contraire).

    Pourtant, aujourd'hui, je n'ai pas vu de peur, je n'ai pas vu de doute. J'ai vu des dizaines de milliers de personnes affluer de toute la France et converger place de la Concorde. J'ai vu l'enthousiasme sur le visage des enfants, des femmes, et des hommes de tous âges, convaincus qu'après toutes ces crises, se représenter un chemin pour la croissance était permis.

    J'ai entendu un Président serein, expérimenté, qui a appris des difficultés du monde et de ses maladresses. J'ai partagé la vision d'un candidat qui parle à tous les Français, et non à un camp. Le candidat d'une France du mérite, des droits et des devoirs, de la justice et de la liberté ; qui nous invite à construire ensemble la France du XXIe siècle, à la pointe de l'écologie et du numérique.

    J'ai surtout vibré en partageant l'hommage aux bâtisseurs de notre civilisation française - Molière, Voltaire, Chateaubriand, Césaire, Hugo -, cette civilisation tant reconnue dans le monde pour son engagement auprès des peuples en quête de liberté.

    Il y a quelques jours, j'assistais à un spectacle aux Invalides qui me rappelait la grandeur de notre Histoire de France, et j'en sortais avec à l'esprit que cette campagne s'en était bien éloignée. Aujourd'hui, dans une marée de drapeaux français entonnant la Marseillaise a capella, j'ai constaté qu'avec la hauteur nécessaire, Nicolas Sarkozy a su nous rappeler cet héritage glorieux pour mieux parler d'avenir, car c'est plus que jamais ce qui doit guider cette campagne.

    Dans l'isoloir, le 22 avril et le 6 mai, il n'y aura plus de sondages, plus de commentaires, plus de petites phrases. Chaque Français aura un choix décisif à faire, pour que la France continue à rayonner en Europe et dans le monde. À la Concorde, ce choix était évident.

Du rab sur le Lab

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