Publié à 16h55, le 08 décembre 2011 , Modifié à 12h28, le 09 décembre 2011

Vote des étrangers : le raisonnement simpliste de l'UMP

En plein débat sur le droit de vote des étrangers aux élections locales - actuellement en cours d'examen au Sénat - notre blogueur Romain Pigenel dénonce la vision simpliste de la droite sur le sujet. D'accord, pas d'accord, débattez-en sur le Lab !

  1. Vote des étrangers et naturalisation : vente flash à l’UMP !

    La nouvelle majorité de gauche au Sénat a décidé de marquer son arrivée en s’attaquant au dossier du droit de vote des étrangers aux élections locales. La droite s’en est saisie pour ouvrir une polémique dure avec l’opposition, au prix d’un certain nombre de sottises et d’approximations.

    Les conceptions qui s’opposent sont les suivantes. D’un côté, la gauche se place sous le signe du pragmatisme, en pointant le fait qu’il est absurde d’écarter de la vie civique des étrangers absolument intégrés dans la vie quotidienne de notre pays. Le vote favoriserait même l’intégration. D’un autre côté, la droite se revendique de la logique républicaine et explique qu’il n’y a pas de raison de dissocier droit de vote et citoyenneté à part entière – que cette dernière ne "s’achète pas" en payant des impôts.

    A titre personnel, j’estime que les deux positions sont entendables. Mais il y a les principes – et il y a les faits. Et c’est sur ce dernier point que l’actuel positionnement de l’UMP ne tient pas. Que disent les chefs de file de la droite ? Que si les étrangers veulent voter, ils n’ont qu’à se faire naturaliser. Nicolas Sarkozy : "Si une personnalité de nationalité étrangère qui réside dans notre pays, qui respecte nos lois et nos valeurs, veut participer aux choix politiques de notre nation, alors […] une voie lui est ouverte, cette voie c'est l'accès à la nationalité française. " Claude Guéant : "Si une personne étrangère souhaite voter et s'impliquer dans la vie de la cité, elle peut demander sa naturalisation. On ne peut découper la citoyenneté en tranches. "

    Guéant  et Sarkozy partagent le même raisonnement : vous voulez voter, très bien, demandez votre naturalisation, ce sera encore mieux ! Comme si cette opération était aussi envisageable que le simple droit de vote façon PS; comme si elle était aussi simple.

    Venons-en aux faits. Sous Nicolas Sarkozy, la procédure de naturalisation a été régulièrement rendue plus malaisée. Il y eut d’abord la réforme Besson de 2009, décentralisant la gestion des naturalisations au niveau des préfectures, générant un grand risque d’arbitraire et de localisme (comme l’expliquait alors Patrick Weil ) tant les attitudes, et même les chiffres varient d’une préfecture à l’autre.

    Plus récemment, en octobre, Claude Guéant a annoncé le durcissement des exigences en matière de connaissance de la culture et de la langue française. On peut discuter du bien-fondé de ces décisions, mais une chose est claire : elles vont dans le sens d’un malthusianisme, et non d’une ouverture ou même d’un maintien, des naturalisations.

    La position de la droite sur le vote des étrangers est donc malhonnête. Elle confond deux problèmes : celui, philosophique et constitutionnel, du droit de vote, et celui de l’attitude concrète face aux étrangers. La gauche défend le droit de vote des étrangers et une ouverture à leur égard. La droite combat le droit de vote des étrangers tout en laissant penser qu’elle partage l’ouverture de la gauche à leur égard – ce que démentent quatre années de sarkozysme. Comment peut-on présenter la naturalisation comme une alternative au droit de vote, quand le nombre de personnes concernées par l’une et l’autre options n’est pas comparable ?

    Nicolas Sarkozy et Claude Guéant me font penser à deux patrons de centre commercial en concurrence avec l’hypermarché PS. Ils déclarent : "Le PS vous propose un baril de lessive, et nous pour le même prix, on vous en offre deux !". Peut-être, déjà, n’avez-vous besoin que d’un paquet (le vote sans la naturalisation). Mais surtout, quand vous arrivez au centre commercial UMP, vous découvrez qu’il y a une rupture de stock sur l’offre promotionnelle : il n’y a plus de lots de deux barils, et pas de baril simple non plus. C’est ballot. Je me suis toujours méfié des promos de bout de gondole; merci à la droite, sur ce débat, de me conforter dans mon intuition.

    Variae, le site de Romain Pigenel

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