Amendement rejeté sur les mosquées salafistes : la grosse intox du FN sur l’"irresponsabilité" des députés PS

Publié à 18h32, le 21 juillet 2016 , Modifié à 19h48, le 21 juillet 2016

Amendement rejeté sur les mosquées salafistes : la grosse intox du FN sur l’"irresponsabilité" des députés PS

Ce jeudi 21 juillet, plusieurs cadres du FN relaient la liste des députés qui ont voté contre deux amendements identiques présentés par la droite, lors de l’examen du projet de loi relatif à l’état d’urgence, mardi soir. Il s’agit de l’amendement n°8 de Guillaume Larrivé et du n°89 de Christian Jacob (LR), visant à fermer les mosquées salafistes.

Le secrétaire national frontiste Jean-Lin Lacapelle a suggéré aux députés ayant voté contre l’amendement d’avoir "honte" :

Le conseiller régional FN de Bourgogne-Franche-Comté Julien Odoul, ainsi que le maire de Béziers apparenté FN, Robert Ménard, ont pointé l’"irresponsabilité" de ces députés :

Le député européen FN Jean-François Jalkh a invité à partager la liste de ceux qui avaient voté "contre" :

Le secrétaire départemental FN de Haute-Garonne Julien Leonardelli est allé jusqu'à diffuser les coordonnées des députés PS de son département, invitant les internautes à les contacter, comme l'a repéré France 3 Midi-Pyrénées .

# Que proposent les amendements ?

Les amendements 8 et 89 sont identiques et ainsi formulés :

 

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Le ministre de l’intérieur, pour l’ensemble du territoire où est institué l’état d’urgence, et le préfet, dans le département, peuvent ordonner la fermeture de tout lieu de culte lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser que ce lieu de culte constitue une menace pour l’ordre public, ainsi que la dissolution de l’association ou du groupement de fait responsable de ce lieu de culte.

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Lors du débat à l’Assemblée nationale, Guillaume Larrivé l’a défendu en arguant que les "dispositions actuelles" ne permettent pas de "procéder véritablement à la fermeture" des mosquées extrémistes :

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Nous considérons que l’état du droit, qu’il s’agisse du code de la sécurité intérieure avec des vieilles dispositions héritées d’un décret-loi de 1938 ou même des dispositions actuelles de la loi relative à l’état d’urgence, n’est pas satisfaisant, car il n’a pas permis aux différents gouvernements, jusqu’alors, de procéder véritablement à la fermeture non pas seulement de certaines, mais bien de toutes les mosquées extrémistes qui constituent une menace pour l’ordre public.

Avec cet amendement et l’amendement suivant, nous souhaitons permettre un exercice de vérité. Chacun doit prendre ses responsabilités. Si vous souhaitez, comme nous, dissoudre ces associations et groupements, et fermer ces mosquées salafistes, alors il faut donner au ministre de l’intérieur et aux préfets des pouvoirs exceptionnels dans le cadre de la loi sur l’état d’urgence.

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Le député LR Jacques Myard a renchérit :

 

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En effet, il faut regarder les réalités en face et se donner les moyens de lutter contre des prêches tenus dans des mosquées, qui vont à l’encontre de l’ordre public français, c’est-à-dire des lois de la République. Cet amendement n°89 a pour objectif de donner au ministre de l’Intérieur et aux préfets les moyens d’ordonner la fermeture de tout lieu de culte lorsqu’il existe des raisons sérieuses de penser que celui-ci constitue une menace pour l’ordre public. Si nous avons aujourd’hui un slogan à reprendre, c’est celui-ci : les libertés républicaines ne sauraient être utilisées par des activistes pour agir contre les principes et les valeurs de la République. Si nous devons, bien entendu, respecter les cultes, nous devons être d’une très grande vigilance et d’une très grande fermeté à l’égard des prêches de haine, qui vont contre la République.

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# Que dit le rapporteur ?

Sauf que le député PS Pascal Popelin a expliqué que ces dispositions étaient déjà prévues par la loi :

 

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Je reviendrai en particulier sur les amendements n°8 et n°89, considérant que pour les précédents, les arguments de rejet restent les mêmes. Ces deux amendements posent des questions intéressantes et les préoccupations qui y sont exprimées doivent être prises en considération. Mais l’état de notre droit en matière d’état d’urgence fait que ces amendements sont totalement satisfaits. En effet, l’article 8 de la loi de 1955 autorise la fermeture provisoire des lieux de culte, et plus généralement de tout lieu de réunion, pendant la durée de l’état d’urgence. C’est d’ailleurs sur ce fondement que quatre mosquées ont été fermées depuis le début de l’état d’urgence. L’amendement doublonne également à 99 % avec la partie de la loi relative à la dissolution d’associations cultuelles, la seule différence proposée étant que la décision ne serait plus prise en conseil des ministres, mais par le ministre de l’intérieur ou le préfet. On va regarder si l’on peut, au cours de la navette, à trouver un dispositif plus adapté à l’objectif que vous fixez, mais en l’état actuel, votre proposition apporte très peu par rapport à ce que le droit permet déjà.

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Après un avis du gouvernement allant dans le même sens, la majorité a voté "contre" .

Contacté par le Lab après les accusations du Front national, Pascal Popelin réagit vivement :

 

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C'est une manipulation grossière. Il n'y a pas besoin de voter quoi que ce soit parce que c'est déjà possible - et déjà fait. Faire voter une généralité, que tout le monde peut trouver juste, mais qui n'a aucun effet en droit, c'est une ineptie !

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Le rapporteur du texte explique que les amendements étaient mal rédigés, trop vagues et n’avaient aucune portée juridique.

Par ailleurs, il a été trouvé un accord sur l’article 8 en Commission mixte paritaire (les modifications sont entre crochets) :

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Le ministre de l'intérieur, pour l'ensemble du territoire où est institué l'état d'urgence, et le préfet, dans le département, peuvent ordonner la fermeture provisoire des salles de spectacles, débits de boissons et lieux de réunion de toute nature, [en particulier des lieux de culte au sein desquels sont tenus des propos constituant une provocation à la haine ou à la violence ou une provocation à la commission d’actes de terrorisme ou faisant l’apologie de tels actes] dans les zones déterminées par le décret prévu à l'article 2.

Peuvent être également interdites, à titre général ou particulier, les réunions de nature à provoquer ou à entretenir le désordre.

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Ce qui, pour Pascal Popelin, ne change pas grand chose.

Du rab sur le Lab

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