[making-of] C’est une nouvelle forme de relation entre deux acteurs de l’écosystème politique : sur twitter, les échanges directs et publics entre journalistes et responsables politiques se multiplient, qu'il s'agisse pour les politiques d'exprimer des coups de gueule (souvent) ou de coups de coeur (rarement).
Le Lab en a fait l’expérience, vendredi 23 mars : en publiant un petit article signalant une sortie de Cécile Duflot, secrétaire générale d’EELV, puis en recevant d’icelle une véritable avoinée.
Nouvelle forme de relation politique ? Dans ce petit droit de suite, on vous explique que la modernité est sans doute beaucoup plus cosmétique qu’il n’y paraît.
"Manip’", "méchanceté", "mensonge"
Sur twitter.com
Dans le langage propre au petit monde de twitter, on appelle cela un "tweetclash".
Vendredi 23 mars, vers midi, et en moins de 30 minutes, Le Lab d’Europe 1 a essuyé un véritable tir nourri, de la part de la patronne d’Europe Ecologie Les Verts.
L’air de rien, et en quelques tweets rageurs, Cécile Duflot lance des accusations lourdes, remettant en question notre honnêteté journalistique. Nous y avons évidemment répondu en direct, pour faire valoir notre travail, nos choix éditoriaux.
Pour ceux qui auraient raté cet épisode absolument capital, petit rappel de l’objet de l’ire de la patronne des Verts.
Dans notre article intitulé : "Duflot soutient Eva Joly comme la corde le pendu", nous nous sommes attardés sur une petite phrase nous ayant fortement marqué, repérée dans un entretien accordé par la patronne d'EELV au quotidien régional Nice Matin, et diffusé vendredi 23 mars dans la matinée.
En court et en résumé, la citation suivante y était attribuée à la patronne des Verts :
"Et le monde tel qu'il est, c'est qu'Eva Joly a été désignée par notre primaire."
Pas : "Nous avons désigné", non. Mais bien suivant une forme passive.
Dans un contexte où, au sein d’EELV, les prises de position évoquant un possible retrait de la candidature d’Eva Joly se multiplient, on peut rêver plus ferme, comme soutien.
C’est ce que nous avons expliqué dans notre article, fidèle à notre promesse éditoriale de "lire entre les lignes" - et nous revendiquons encore aujourd’hui ce parti-pris éditorial.
Jadis – comprendre : au XXè siècle – ces échanges auraient probablement eu lieu par coups de téléphones énervés. Et vous n’en n’auriez rien su.
Aujourd’hui, ils ont lieu en mode public et vous, internautes, lecteurs, êtes aux premières loges pour les suivre.
Est-ce que cela change vraiment quelque chose ?
Oui, forcément : vous voyez notre relation aux politiques en train de s’écrire, en direct. Et c’est forcément quelque chose de novateur. On a par exemple vu des internautes prendre position – pour nous défendre, ou pour appuyer Cécile Duflot.
Mais n’imaginez pas pour autant que tous les codes de la politique "à la papa" s'en trouvent subitement balayés.
A la lecture de cet échange - que nous avons reconstitué ci-dessous - les recettes adoptées par l’une des plus fines utilisatrices de twitter du "paysage politique français" se révèlent somme toute … très classiques.
- A plusieurs reprises au cours de l’échange sur twitter, Cécile Duflot esquive notre question précise, tactique argumentative ... vieille comme les relations entre journalistes et politiques.
- Surtout, la revendication que, in fine, fait valoir la patronne des Verts reste ultra-classique : elle explique, somme toute, que Nice Matin n’a pas souhaité lui faire relire pour validation et amendement la retranscription de l’entretien qu'elle leur a accordé. Et en conteste donc l’authenticité, la fidélité.
Que retenir de cet échange en dix twitts ?
Une extension des moyens à disposition pour échanger ? Oui, assurément.
Une évolution fondamentale des lignes, et des positions des uns et des autres ? Certainement pas.
Duflot - Le Lab : l'intégralité de l'échange
Sur twitter.com
Cécile Duflot : Alors la @leLab_E1 vous dépassez les bornes de la mauvaise foi, de la méchanceté et du mensonge. Le buzz n'excuse pas tout, nom de .. !
Le Lab : "Et le monde tel qu'il est, c'est qu'Eva Joly a été désignée par notre primaire"> #okéwé, on dépasse les bornes ...
Cécile Duflot : une interview itw : 4 fois la question "Est-ce que Eva Joly pense que ? ..." À la 4ème tu dis en rigolant "Regardez moi je ne suis pas blonde" [...]
[...] Et ça devient une phrase en exergue dans @nice-matin Repris par le @LeLab_E1 une attaque en règle. Faut supporter en souriant ?
Le Lab : Ah c'est pour la phrase "blonde et lunette", que vous râlez ? Pas pour votre soutien de @evajoly "comme la corde blabla" ?
Cécile Duflot : C'est parce que vous faites de la manip et j'en donne un exemple. Mais votre problème, c'est le buzz, pas le journalisme.
Le Lab : Le soutien light d'un chef de parti à son candidat, c'est tout sauf du buzz : c'est de l'info, du décryptage. Aucune "manip".Cécile Duflot : Il est où le soutien light ? un élément de preuve ? Ou comme l'édito "elle fait le job avec talent et intense conviction donc fourbe"
Le Lab : "Le monde tel qu'il est, c'est qu'Eva Joly a été désignée par notre primaire" : vous appelez ça un soutien enthousiaste ??
Cécile Duflot : C'est la fin d'un développement. Coupé Pas possible de relire la retranscription : "choix de la rédaction" CQFD qd on lit l'édito.
Cécile Duflot : Oui j'ai dormi 4 heures. Oui je suis agacée par le magouillage des propos. Non je ne m'habitue pas.
Cécile Duflot : Pas relire les retranscriptions ok mais @Nice_Matin vous mettez en ligne l'enregistrement entier de notre "face à la rédaction" #chiche #grrrLe Lab : Ce qui vous énerve, c'est donc de ne pas avoir relu & amendé l'interview de NM. Ce qui ne fait pas de nous des "magouilleurs".
C'était le 3 janvier 2012 : Cécile Duflot invitée de #DCDC
Sur dailymotion.com
Le 3 janvier 2012, l'équipe de l'émission Des Clics et des Claques recevait la patronne d'EELV. Un échange un peu moins tendu que celui que nous avons engagé sur twitter ...