Le ministère du Travail porte plainte contre X après la publication par Libération de documents sur la réforme du Code du travail

Publié à 14h28, le 09 juin 2017 , Modifié à 17h33, le 09 juin 2017

Le ministère du Travail porte plainte contre X après la publication par Libération de documents sur la réforme du Code du travail
La ministre du Travail, Muriel Pénicaud © ALAIN JOCARD / AFP

"Code du travail : ce que prépare vraiment le gouvernement" : c'est sous ce titre que Libération publiait, mardi 6 juin au soir, certaines pistes du gouvernement concernant cette réforme à haut potentiel explosif. Des mesures qui allaient bien plus loin que celles annoncées officiellement par le Premier ministre Édouard Philippe et la ministre du Travail Muriel Pénicaud quelques heures plus tôt. Le lendemain, alors que la ministre minimisait ces révélations, le quotidien publiait le document en question, un texte issu de la direction générale du travail (DGT), daté du 31 mai et détaillant les "réformes demandées par le cabinet" de Muriel Pénicaud. Deux jours plus tard, cette dernière contre-attaque frontalement, accusant la source de nos confrères d'avoir "enfreint la loi" et mis en cause "l'honneur" de l'administration du ministère, et annonçant une plainte contre X pour vol et recel de documents.

Auprès de franceinfo vendredi 9 juin, la ministre du Travail répète que ces éléments publiés dans la presse "n'engagent pas le gouvernement" et dénonce "une ou quelques personnes qui ont enfreint la loi, qui ont enfreint la violation [sic] du secret professionnel, qui ont volé ou divulgué des documents". Elle ajoute :

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L'administration du ministère du Travail a décidé de porter plainte contre X parce que cela porte atteinte à l'honneur et l'intégrité de toute l'administration. L'administration du ministère du Travail est engagée, compétente. Elle est très mobilisée et je peux vous dire que chez les agents du ministère, c'est très très mal perçu. J'ai vu plusieurs équipes ce matin, j'ai vu différentes administrations, ils se sentent très atteints que l'un des leurs puisse faire une chose qui est si contraire aux lois de la République.



Donc je pense que cette plainte dit ce qu'elle veut dire. Ça ne concerne pas le gouvernement, mais en revanche, l'administration a son honneur à défendre.

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Parmi les "pistes" évoquées dans le document publié par Libération : la possibilité de négocier, à l'échelle de l'entreprise, le motif du licenciement, le niveau des indemnités légales de licenciement ou encore les critères de recours aux CDD. Autant de mesures qualifiées de "pas acceptables" par les syndicats, mais balayées dans la foulée par Muriel Pénicaud.

Cette dernière avait assuré mercredi sur France Inter n'avoir "pas de plan caché" pour réformer le Code du travail, affirmant s'en tenir au "programme de travail" remis mardi aux partenaires sociaux, tout "autre document", comme celui révélé par Libération, n'ayant "aucun intérêt". Le document évoqué par le quotidien "émane de quelqu'un de la direction du travail, ce n'est pas signé par la direction du travail", "ce n'est pas un document officiel", martelait-elle.

Certains journalistes de Libération ont réagi à cette information sur les réseaux sociaux, notamment l'auteur de ces révélations :

[Edit 17h30]

Dans un billet de réponse à cette démarche de Muriel Pénicaud publié sur le site de Libération, le directeur de la publication du journal Laurent Joffrin se demande si "la ministre du Travail travaille du chapeau". Pointant le fait que cette plainte "vise à la fois notre journal (pour recel), et ses sources (pour vol)", le journaliste dénonce une volonté d'opacité de l'action gouvernementale, estimant que ces méthodes sont peut-être inspirées à Muriel Pénicaud par son expérience passée dans le privé :

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Madame Pénicaud est sans doute habituée aux us et coutumes du secteur privé, qui cherche à réprimer par tout moyen juridique ou moral ceux qui rendent publiques ses menées diverses et variées, y compris s’il s’agit d’un lanceur d’alerte. On comprend certes qu’un gouvernement souhaite étudier les différentes hypothèses qui s’offrent à lui sans encourir à l’avance la réprobation publique. Mais l’obligation d’informer qui incombe à la presse veut aussi que le citoyen soit mis au courant des projets qu’on agite, le cas échéant pour les combattre. Dans cet entre-deux, on doit choisir entre la transparence du débat public et le secret dont tout pouvoir cherche à s’entourer. La ministre a choisi. Elle exige le secret. Quitte, pour l’obtenir, à recourir immédiatement à l’arme ultime, la répression judiciaire. Si on la suit, les ministères français seront transformés en autant de boîtes noires, inaccessibles au commun des mortels, protégées par les juges et les policiers. Ainsi les détenteurs du pouvoir travailleront à l’abri de la dérangeante curiosité de l’opinion, comme le veut, dans le privé, l’establishment managérial. Par exemple chez Danone, où la ministre a longtemps officié. De toute évidence, madame Pénicaud confond Danone et la République.

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