Non-cumul des mandats : entre première lecture et adoption définitive, quels députés ont changé d’avis ?

Publié à 17h17, le 23 janvier 2014 , Modifié à 17h24, le 23 janvier 2014

Non-cumul des mandats : entre première lecture et adoption définitive, quels députés ont changé d’avis ?
Captures d'écran des détails du vote sur le cumul des mandats en 2013 et 2014 (Assemblée nationale).

Treize voix de plus. C'est le résultat du vote définitif de la loi sur le non-cumul entre un mandat parlementaire et une fonction exécutive locale, adoptée à la majoritée absolue par l'Assemblée nationale le 22 janvier.

Treize voix, issues des bancs de la gauche mais aussi de la droite, sont venues s'ajouter à celles de juillet 2013, lorsque les députés avaient voté le même texte en première lecture. Le Lab s'est penché sur le détail des votes pour comprendre d'où venaient ces voix supplémentaires.

>> A l'UMP, ils sont cinq à être venus gonfler les rangs des "pour". Trois d'entre eux étaient absents lors du premier scrutin et n'avaient pas délégué leur vote : Sylvain Berrios, Laurent Marcangeli et Lionel Tardy.

(Thierry Solère - Maxppp)

Les deux autres avaient choisi de s'abstenir en juillet mais ont donné leur aval mercredi : Jean-Luc Moudenc et Thierry Solère. Un "choix stratégique", décrypte ce dernier, député des Hauts-de-Seine, au Lab :

Je suis profondément favorable au non-cumul mais j'aurais aimé qu'on aille plus loin. J'ai déposé des amendements notamment pour qu'il soit appliqué dès maintenant, et pas en 2017.

Voter "pour" dès la première lecture m'aurait empêché de continuer à amender lors des lectures suivantes. C'est une partie à deux ou trois manches.

Il ne faut pas se dire favorable immédiatement sinon les discussions s'arrêtent tout de suite.

Pour le député de Haute-Garonne Jean-Luc Moudenc, la logique est la même. Dans un communiqué, il regrette que les socialistes ne "mettent en oeuvre ces dispositions qu'en 2017" mais assure qu'on ne peut pas "raisonnablement être à la fois député, maire de grande ville et président de communauté urbaine".

>> Ca a bougé également au Parti socialiste, et ce dans les deux sens. Treize élus supplémentaires ont voté "pour" le 22 janvier alors qu'ils s'étaient abstenus ou n'avaient tout simplement pas voté (ni délégué leur vote) en juillet 2013.

(Jean-Louis Gagnaire - Maxppp)

Parmi eux Jean-Louis Gagnaire, élu de la Loire, explique au Lab s'être abstenu en guise "d'alerte". Il aurait aimé que les villes de moins de 1.000 personnes soient épargnées et demandait également un non-cumul dans le temps. Aujourd'hui, le député estime que cette loi est "une première pierre" mais qu'elle "ne suffira pas" :

Voter le non-cumul, c'est aller dans le sens de l'histoire mais on ne s'en sortira pas qu'avec cette mesure.

Il faut qu'on réorganise le travail du Parlement, qu'on le modernise, que Claude Bartolone accélère dans ce sens. Il faut également réduire le nombre de députés, aux environs de 400 et les occuper utilement.

C'est le corollaire au non-cumul. Sinon ça va tourner au pugilat si on enferme tout le monde à Paris ! (rire)

Parallèlement à ces treize nouveaux convaincus, cinq autres ont changé leur vote positif de juilletpour une abstention ou une absence de vote : Jérôme Lambert, Ibrahim Aboubacar, Jean-Louis Touraine, Christophe Bouillon et Jean-Luc Drapeau.

Au final, entre les gains et les pertes, ce sont huit socialistes de plus qui ont dit "oui" au non-cumul des mandats.

>> Le "cas" Jérôme Lambert

(Jérôme Lambert - Maxppp)

A en croire les deux votes du député de Charente, Jérôme Lambert a changé d'avis. Favorable en 2013, abstentionniste en 2014 ? Pas du tout explique-t-il au Lab : le vote de juillet ne correpond pas à son opinion, il est le fruit d'une délégation de vote automatique au groupe PS.

Un député absent confie en effet son vote par défautà son groupe, qui vote alors selon la position officielle arrêtée par le groupe. S'il ne le souhaite pas, l'élu doit faire savoir qu'il refuse cette délégation automatique ou entreprendre une démarche (plus lourde) pour confier son vote personnel à un collège député.

C'est ainsi que Jérôme Lambert, en déplacement à l'étranger le 9 juillet, s'est retrouvé dans la liste des "pour". Un épisode qui lui fait dire aujourd'hui au Lab qu'il va mettre fin à la délégation automatique.

Sur le fond, Jérôme Lambert est opposé au non-cumul pour deux raisons:

Premièrement, les élus des petites et des grandes collectivités, ceux qu'on appelle les barons locaux, jouent un rôle d'équilibre au pouvoir central. Leur interdire le cumul reviendra à un affaiblissement du Parlement.

Ensuite, on se prive d'une force d'expertise importante, notamment dans les multiples textes qui ont rapport avec les collectivités locales. Etre conseiller municipal, ce n'est pas comme être maire de ce point de vue là.

Malgré cette forte opposition, Jérôme Lambert n'a pas voulu se prononcer contre. Un vote trop radical pour ce député qui s'est souvent abstenu mais ne s'est opposé véritablement à son parti que lors de la loi sur le mariage pour tous. Il reconnait :

C'est un peu lourd de voter contre son groupe. Et il n'y a pas de tribune pour s'expliquer véritablement.

>> Dans les plus petits groupes, les changements sont moins nombreux. Notons tout de même le député radical de gauche de Haute-Corse, Paul Giaccobi qui avait voté "pour" ... pour finalement voter "contre" lors de l'adoption définitive.

L'élu UDI de Seine-et-Marne, Yves Jégo, a également transformé son abstention de juillet en un vote négatif le 22 janvier.

Pour accéder au détail du vote du 9 juillet 2013, c'est par ici.

Pour accéder au détail du vote du 22 janvier 2014, c'est par .

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