Vous connaissez l'histoire du député qui n'a rien compris à la réponse du ministère ?

Publié à 17h59, le 18 février 2014 , Modifié à 19h14, le 18 février 2014

Vous connaissez l'histoire du député qui n'a rien compris à la réponse du ministère ?
Nicolas Dhuicq (Maxppp).

N’A PAS TOUT COMPRIS - Dans un communiqué diffusé ce 18 février, le député UMP Nicolas Dhuicq dit “se féliciter” des “mesures concrètes” prises par l’administration pénitentiaire concernant le prix des produits, notamment alimentaires, en prison. Des mesures décidées par le ministère de la Justice après ses moult relances, explique-t-il, pour que les prisonniers ne bénéficient plus de “prix avantageux”.

Problème de taille : il n’en est rien. Le député UMP a compris totalement de travers la réponse écrite apportée publiquement par le ministère de la Justice. Et en vient à faire l’éloge, sans s’en rendre compte, de l’accord … pourtant à l’origine de son courroux.

#REPRENONS

Dans son communiqué, Nicolas Dhuicq [que l'on a déjà vu sur le Lab  à cette occasion] dénonce un accord d’avril 2012 qui ferait profiter aux prisonniers “de prix avantageux sur divers produits : pâtes à tartiner, confiseries, allumettes”, estime que les contribuables doivent payer ces avantages de leur poche et explique avoir averti à plusieurs reprises le gouvernement de ce problème par des questions écrites.

L’une d’elle, posée pour la première fois en juillet 2012, a enfin obtenu une réponse du ministère de la Justice le 4 février (à lire ici). Ravi, le député pense avoir été entendu et écrit :

Dans sa réponse, (...) la Ministre de la Justice a reconnu que la Cour des Comptes avait elle aussi constaté “des écarts de prix injustifiables”sur les produits cantinés par les personnes détenues. Il aura fallu de nombreuses relances pour que le Gouvernement réponde sur cette question.

Nicolas Dhuicq se félicite que l’administration pénitentiaire prenne enfin des mesures concrètes pour mettre fin à ces pratiques difficilement justifiables en période de disette budgétaire.

 
Puis il détaille ces "mesures concrètes" obtenues :

Un dispositif permettant d'harmoniser et de rationaliser  les prix de vente des produits commercialisés auprès des détenus dans le cadre du service cantine dans les établissements en gestion publique est désormais mis en place.

Ce dispositif est organisé selon trois critères. Tout d’abord, l’élaboration d’un catalogue harmonisé de 200 produits les plus consommés en détention assorti d'un prix de revente harmonisé sur ce catalogue. Un accord cadre national d'approvisionnement sur les 200 produits du catalogue national a également été mis en œuvre. (...)

Bien. Mais dans cette fin de communiqué Nicolas Dhuicq fait précisément l’éloge des mesures prises … lors de l’accord d’avril 2012 dénoncé un paragraphe plus haut.

Que s’est-il passé ? Le député n’a pas compris la réponse du ministère. Il en reprend les mots mais se trompe dans le sens.

#FAIL NUMBER ONE

La première incompréhension du député réside dans ce passage du texte du ministère :

Dans ses rapports de 2006 et 2010, la Cour des comptes a constaté des écarts de prix injustifiables sur les produits cantinés par les personnes détenues. A titre d'exemple, les écarts de prix étaient de 73 % pour une marque célèbre de pâte à tartiner, de 52 % sur une bouteille d'eau minérale de 1,5 litre.

Dans son communiqué, puis au Lab, Nicolas Dhuicq assure que la Cour des comptes dénonce des prix trop bas … alors qu’il s’agit des prix trop hauts et trop différents selon les prisons. [> voir ici le rapport de la Cour des comptes]. Jusqu’en 2012, les personnes incarcérées subissaient des tarifs bien plus élevés que le marché normal et très disparates selon le lieu de détention.

C’est justement pour lutter contre ces prix excessifs qu’un accord national a été trouvé en avril 2012 et qu’un nouveau dispositif a été mis en place pour fixer les prix sur un panier de 200 produits. Dispositif que le ministère de la Justice entreprend d’expliquer à Nicolas Dhuicq dans sa réponse écrite du 4 février.

#FAIL NUMBER TWO

Ce qui lui vaut une seconde, très grosse, incompréhension. Voici le texte du ministère  :

Afin de mettre fin à ces pratiques, l'administration pénitentiaire a mis en oeuvre un dispositif permettant d'harmoniser et de rationaliser les prixde vente des produits commercialisés auprès des personnes détenues dans le cadre du service cantine dans les établissements en gestion publique.

Ce dispositif est organisé selon trois critères : élaboration d'un catalogue harmonisé de 200 produits les plus consommés en détention assorti d'un prix de revente harmonisé sur ce catalogue et mise en place d'un accord cadre national d'approvisionnement sur les 200 produits du catalogue national.

 
Soit quasiment mot pour mot le communiqué de Nicolas Dhuicq. Sauf que ce dernier pense vanter un nouveau dispositif et non celui d’avril 2012 à qui il attribue tous les maux.

Contacté par le Lab et interrogé sur ce point, Nicolas Dhuicq se dit sûr de lui :

C’est une réponse apportée aux interrogations que je pose depuis des mois. Le ministère dit introduire un nouveau dispositif, je serai attentif à ce qu’il soit mis en place.

 
Le ministère de la Justice est quant à lui formel sur l’erreur du député. Le dispositif décrit est bien celui mis en place deux ans plus tôt, confirme-t-il au Lab :

Il s’agit d’une explication de ce que prévoit l’accord cadre de 2012.

On suggère à Nicolas Dhuicq de poser une nouvelle question écrite au ministère, pour s'en assurer.

Du rab sur le Lab

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