ANALYSE DU SCRUTIN - Mardi 2 décembre, les députés étaient invités à voter solennellement sur une proposition de loi UDI. Celle-ci allongeait de 20 à 30 ans le délai de prescription des crimes sexuels contre les mineurs. Pour les délits, la prescription, actuellement de 10 à 20 ans, selon les cas, serait passée de 20 à 30 ans.
Un sujet délicat sur lequel il était difficile de polémiquer. Mais le texte a été rejeté, en particulier du fait des voix socialistes. Ces derniers, gênés aux entournures pour justifier leur vote, ont ainsi expliqué, à coups de communiqués de presse et d’un argumentaire envoyé aux députés pour défendre la position du groupe, qu’ils préféraient privilégier une réforme plus globale du droit à la prescription.
Toujours est-il que le vote – voir ici le détail du scrutin - a révélé des alliances surprenantes, transpartisanes et dépassant largement les clivages classiques de la politique française.
Tour d’horizon.
#L’UDI
Logiquement, l’UDI, qui avait fait passer ce texte dans sa niche parlementaire, jeudi 27 novembre, a voté pour sa proposition de loi à l’unanimité. Carton plein, trente parlementaires sur trente du parti désormais présidé par Jean-Christophe Lagarde ont ainsi voté pour.
#L’UMP
Rien d’illogique à ce que l’UMP soutienne ce texte de leur allié centriste. Cependant, le groupe était divisé. Et 14 parlementaires du parti de Nicolas Sarkozy ne l’ont pas voté. Sept (parmi lesquels Bernard Accoyer ou Henri Guaino) ont ainsi voté contre tandis que sept autres ont privilégiés l’abstention (comme Dominique Bussereau ou Bernard Debré).
#EELV
Eh oui. Une fois n’est pas coutume, les écolos se sont rangés derrière l’opposition parlementaire. A la quasi-unanimité. 17 députés EELV ont voté pour ce texte prévoyant de revoir le délai de prescription pour les agressions sexuelles tandis qu’une seule élue s’est abstenue. Et par n’importe laquelle puisqu’il s’agit de Cécile Duflot.
#FRONT DE GAUCHE
Comme pour les Verts, les communistes ont voté en compagnie de la droite dans l’hémicycle. Enfin, en partie. Au groupe GDR, présidé par André Chassaigne, dix députés ont voté pour le texte tandis que trois autres se sont abstenus.
#RADICAUX
A l’inverse des socialistes qui ont fait tomber le texte, les radicaux, alliés de la majorité PS et membres du gouvernement, ont également apporté leur écot à la proposition de loi de l’UDI. Huit députés ont voté pour (dont les ex-PS Olivier Falorni et Jérôme Lambert) et trois contre, dont Alain Tourret.
#PS
Depuis le passage du texte en commission, les députés PS étaient gênés par ce texte qu’ils n’avaient pas réussi à rejeter avant la discussion en séance. Comment allaient-ils justifier leur vote opposé à cette proposition de loi ? Pour cela, un argumentaire a été envoyé aux députés. Mais tous n’ont pas suivi la consigne de groupe. Neuf élus se sont abstenus et six "frondeurs" ont voté pour ce texte avec la droite, les écologistes et une partie des communistes. Parmi eux, Delphine Batho, Jean-Louis Gagnaire ou encore Maud Olivier.
Mais le texte n’est pas passé du fait des 241 socialistes qui ont voté contre. Dans un communiqué, le groupe PS a souligné le risque d’inconstitutionnalité du texte et l’insécurité juridique qu’il contenait :
"Pour faire sens, la révision du droit de la prescription ne peut être accomplie de façon parcellaire : en 20 ans elle a fait l’objet de 6 lois dérogatoires et a généré une jurisprudence fluctuante. Distinguer les agressions sexuelles de l’ensemble des crimes et délits au risque de les aligner avec les crimes contre l’humanité ne peut être une solution satisfaisante.
"
"Pour ces raisons, le Groupe SRC engagera son vote contre la PPL, dans le but de donner ultérieurement une réelle chance au droit de la prescription d’être revu dans de bonnes conditions et dans sa globalité", ajoute la députée PS Colette Capdevielle.