Le très prévisible enterrement "sans état d'âme" de l'écotaxe par Ségolène Royal

Publié à 11h44, le 10 octobre 2014 , Modifié à 16h50, le 17 octobre 2014

Le très prévisible enterrement "sans état d'âme" de l'écotaxe par Ségolène Royal
Ségolène Royal © IP3 PRESS/MAXPPP/Christophe Morin

NON, RIEN DE RIEN... - Ségolène Royal est droite dans ses bottes. La suspension "sine die" de l'écotaxe, officialisée jeudi 9 octobre, elle l'assume pleinement. Interrogée sur le sujet vendredi sur BFMTV, la ministre de l'Écologie a expliqué qu'elle renonçait "sans aucun état d'âme" à cette taxe "inapplicable" et aux "effets tout à fait pervers" :

"

L'écotaxe était inapplicable pour plein de raisons, en plus de détruire plus d'emplois chez les transporteurs routiers qu'elle n'en créait. J'y renonce sans aucun état d'âme.

"

Surtout, Ségolène Royal répète à l'envi que "l'écologie ne doit pas être punitive". Voilà pour la réponse aux écologistes, littéralement outrés par cette mise à mort de l'écotaxe (après avoir multiplié les déclarations d'amour à son encontre lors de leurs journées parlementaires, la semaine dernière).

Sur le fond, la ministre a également rappelé que ce système de péage de transit pour les poids lourds avait été décidé sous le gouvernement Fillon, "qui s'est bien gardé de l'appliquer car il était inapplicable. On a fait un essai malgré tout car les contrats [avec les sociétés chargées de collecter l'écotaxe, ndlr] avaient été signé avant, on a essayé de sauver le dispositif." 

Ségolène Royal n'a d'ailleurs jamais caché son opposition à l'écotaxe et sa décision de l'enterrer n'est en rien surprenante. En novembre 2013, alors présidente de la région Poitou-Charentes, elle conseille ainsi au gouvernement - qui vient d'annoncer la suspension de l'écotaxe après les manifestations des Bonnets rouges - d'en reporter l'application "sans date", disant "assumer une certaine liberté de parole" :

"

Le gouvernement pourrait annoncer le report de l’écotaxe, sans date. Jusqu’à ce qu’il y ait des alternatives aux transports routiers car la taxe écologique ne doit pas être punitive.

"

À peine nommée ministre, elle indique, le 3 avril dernier, qu'elle souhaite "remettre à plat les choses" afin d'étudier d'"autres possibilités que nous avons pour dégager des financements". Douze jours plus tard, en interview, elle cible explicitement les camions étrangers :

"

Vous avez aujourd’hui des camions français qui payent déjà la TIPP [taxe sur les produits pétroliers, ndlr], qui sert à entretenir les routes, et des camions étrangers qui ne payent rien car ils n’achètent pas l’essence en France et ils se débrouillent en plus pour ne pas prendre les autoroutes.

"

Parmi les "pistes" qu'elle évoque alors, elle imagine un système permettant de forcer les camions étrangers à emprunter les autoroutes et à en reverser les profits ainsi tirés vers l'entretien des routes. Elle préconise également de supprimer les portiques destinés à collecter l'écotaxe et de les remplacer par une vignette spécifique pour les camions étrangers.

Fraîchement installé à Matignon, Manuel Valls doit rapidement tempérer les ardeurs de sa ministre, l'appelant "à la prudence et au respect du rôle et du travail du Parlement". Une mission d'information mise en place par le gouvernement précédent était en effet chargée de plancher sur le sujet. 

Le rapport rendu au mois de mai prône un nouveau nom pour l'écotaxe, devenue "éco-redevance poids lourds", et 13 mesures pour aménager le dispositif afin de le rendre moins pénalisant pour les sociétés de transport routier. La mission parlementaire écarte cependant l'idée de la ministre de mettre à contribution les sociétés d'autoroute.

Mais Ségolène Royal ne lâche pas le morceau. Elle veut faire payer les sociétés autoroutières qui, à son sens, ont jusqu'ici "bénéficié d'un système exorbitant et très privilégié". Elle l'a expliqué en ces mots, ce vendredi :

"

Depuis la privatisation, elles ont distribué - écoutez-moi bien - 15 milliards de dividendes à leurs actionnaires.[...] Elles doivent maintenant contribuer aux travaux. [...] Les automobilistes et les transporteurs routiers ont déjà suffisamment payé. Je considère que ces sociétés, qui ont gagné beaucoup d'argent, doivent maintenant avoir la responsabilité, à partir du moment où cet argent appartient aux Français qui ont payé des tarifs autoroutiers trop élevés, il faut les mettre autour de la table et leur montrer que c'est aussi leur intérêt. Parce qu'à un moment, on est tous ensemble pour défendre les intérêts d'un pays.

"

En 2007, elle était certes favorable à une "éco-redevance", "mais à condition qu'une taxe entraîne la diminution d'une autre taxe", a-t-elle encore expliqué.

Du rab sur le Lab

PlusPlus