Rude après-midi pour Gilbert Collard. S'il est engagé en politique et député RBM du Gard, il n'en reste pas moins avocat de formation, profession par laquelle il a acquis sa notoriété. C'est donc à double titre qu'il s'exprime, en particulier sur les sujets juridiques. Or, il semblerait qu'il ait commis une *légère* boulette, lundi 2 mai.
En début d'après-midi, l'élu très proche du FN fait cette annonce sur Twitter : "Je vais proposer le droit à l'aide juridictionnelle sans aucune condition pour les victimes d'un acte de terrorisme !"
Je vais proposer le droit à l'aide juridictionnelle sans aucune condition pour les victimes d'un acte de terrorisme !
— Gilbert Collard (@GilbertCollard) 2 mai 2016
L'aide juridictionnelle permet aux personnes à faibles revenus "de bénéficier d'une prise en charge totale ou partielle par l'État des honoraires et frais de justice (avocat, huissier, expert, etc.)", selon la définition donnée par service-public.fr. L'idée de l'avocat/député frontiste est donc de supprimer cette condition de ressources pour les victimes d'actes terroristes.
Aussitôt, des avocats blogueurs et présents sur Twitter s'amusent de ce qui ressemble à s'y méprendre à... une disposition qui existe déjà en droit français depuis une loi de 1991 :
"et on l'appellerait l'article 9-2 de la loi du 10 juillet 1991 sur l'aide juridictionnelle" https://t.co/rt5lH0gVvmhttps://t.co/JW3mW851hA
— Maitre Eolas ✏️ (@Maitre_Eolas) 2 mai 2016
Waou c'est super, c'est déjà le cas ! (Art. 9-2 de la loi du 10 juillet 1991) https://t.co/7lYaBIS6Vi
— Eric Morain (@EricMorain) 2 mai 2016
Contacté par Le Lab, Gilbert Collard précise alors qu'il "sait évidemment" tout cela, mais qu'il parle en fait des "actes de terrorisme commis à l'étranger et dont des ressortissants français seraient victimes", ce qu'il n'avait pas la place d'écrire en un seul tweet. "Ça n'existe pas" à l'heure actuelle, soutient-il, ajoutant aussitôt : "Sauf erreur de ma part, mais je n'ai pas vu de texte à ce sujet."
Quelques minutes plus tard, il rédige donc ce second tweet : "Je vise tout acte de terrorisme commis sur des Français aussi à l'étranger qui, eux, n'ont pas d'aide pour l'avocat hors de France !"
Je vise tout acte de terrorisme commis sur des Français aussi à l'étranger qui,eux,n'ont pas d'aide pour l'avocat hors de France !
— Gilbert Collard (@GilbertCollard) 2 mai 2016
Et de s'en prendre en retour aux mauvais esprits qui moquent sa proposition :
La précipitation, dans la mauvaise foi, des donneurs de leçons de droit sur l'aide juridictionnelle internationale est énorme !
— Gilbert Collard (@GilbertCollard) 2 mai 2016
Mais là encore, des spécialistes affirment qu'à l'heure actuelle, tout acte de terrorisme commis à l'étranger et faisant des victimes françaises génère l'ouverture d'une instruction en France. Ce qui rend la proposition de Gilbert Collard pour le moins inutile, puisque les victimes peuvent alors bénéficier de l'aide juridictionnelle.
Une instruction a été systématiquement ouverte en France pour ce type de faits (Karachi, etc) #perseverarediabolicumhttps://t.co/MJ645Nw4Aj
— Eric Morain (@EricMorain) 2 mai 2016
Et pour cause puisque les juridictions françaises sont compétentes.Ainsi le dossier Karachi est instruit en France. https://t.co/OJkxb2SBA5
— Maitre Eolas ✏️ (@Maitre_Eolas) 2 mai 2016
Quand @GilbertCollard essaye de se raccrocher aux branches après un tweetfail. pic.twitter.com/ZTEqPHwXbF
— Maitre Eolas ✏️ (@Maitre_Eolas) 2 mai 2016
Également interpellé par d'autres internautes, Gilbert Collard leur fait cette réponse systématique :
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Puis, comme il l'avait fait auprès du Lab plus tôt, il affirme que le bâtonnier de Paris soutient cette proposition... ce que le compte de l'intéressé a démenti, toujours sur Twiter :
.@NormacolSuppo faux
— Bâtonnier de Paris (@batonnierparis) 2 mai 2016
Quand ça veut pas...
[Edit 21h05 : au micro de Sud Radio après que Gilbert Collard a formulé sa proposition, le même bâtonnier de Paris, Frédéric Sicard, avait pourtant apporté un sobre "pourquoi pas" qui semblait avaliser cette idée. Il mettait seulement en garde contre le coût de cette mesure et invitait les parlementaires, au cas où ils devraient la voter, à "en assumer les conséquences" budgétaires. C'est à réécouter ici, à partir de 16'45"]