Le rapport de la commission Jospin a été livré, vendredi 9 novembre. Sur 35 propositions, douze concernent le Parlement. Le Perchoir fait le point sur ce préconise ce rapport à propos de l’Assemblée nationale et du Sénat.
Les douze propositions qui concernent le Parlement
> Toucher au calendrier électoral
Les premières propositions du rapport Jospin qui touchent au Parlement concernent le calendrier électoral.
Partant du constat que l’inversement du calendrier des élections présidentielles et législatives en 2002, en concomitance avec l’instauration du quinquennat est source de critiques, la commission Jospin avance deux propositions, les n°5 et 6 qui sont "deux aménagements limités".
La première préconisation envisage d’avancer les deux scrutins, présidentiels et législatifs, de deux mois afin de permettre "à la nouvelle législature de commencer ses travaux avant l’expiration de la session ordinaire" pour "donner au Gouvernement la faculté d’engager et de conduire ses premières réformes dans de meilleures conditions."
La deuxième préconisation touchant au calendrier propose de "réduire le délai entre l’élection présidentielle et les élections législatives", et ce "d’une ou deux semaines" contre cinq actuellement.
"Une telle mesure permettrait de limiter la période pendant laquelle le travail gouvernemental est susceptible d’être perturbé par la campagne électorale législative", explique ainsi le rapport.
> Un Parlement plus représentatif
Le rapport Jospin consacre tout un chapitre, constitué de sept propositions, portant sur la représentativité du Parlement.
Ainsi, la commission de rénovation et de déontologie de la vie publique souhaite tout d’abord renforcer le pluralisme à l’Assemblée nationale et formule en ce sens trois propositions :
- "Introduire une part de proportionnelle pour l’élection des députés" : réclamée par de nombreux partis et recueillant une relative unanimité, l’introduction de la proportionnelle, promesse de campagne du candidat Hollande, butait sur le pourcentage envisagé. Le rapport propose ainsi l’introduction de 10% de proportionnelle, soit pour 58 députés.
- "Réformer les modalités d’élection des députés représentants les Français de l’étranger" : jugeant "peu pertinent" l’utilisation actuelle du scrutin uninominal majoritaire, le rapport propose d’élire ces députés "au scrutin proportionnel".
- "Eviter les seconds tours à un seul candidat dans le cadre du scrutin majoritaire" : le rapport estime tout d’abord qu’il "ne paraît pas opportun" de supprimer la possibilité de triangulaires. En revanche, en cas de désistement ou de candidat unique qualifié pour le second tour, le rapport propose que le candidat "venant immédiatement après les candidats" qui remplissent les conditions, à savoir 12,5% des inscrits, puisse participer au second tour.
Pour le chambre haute, la commission Jospin envisage trois pistes pour "améliorer la représentativité du Sénat", afin que le "corps électoral" soit "une juste représentation des différentes collectivités territoriales" et évite "une surreprésentation écrasante des communes par rapport aux départements et aux régions" :
- Première préconisation d’ampleur : "assurer une représentation plus juste des collectivités territoriales au Sénat par une pondération des voix des grands électeurs et retirer les députés du collège électoral."
- "Etendre le recours au scrutin proportionnel" pour élire les sénateurs : la commission propose ainsi "l’extension du scrutin proportionnel de liste aux départements élisant trois sénateurs". Et de préciser que "25 départements seraient concernés par cette extension", s’ajoutant aux 30 départements où la proportionnelle est déjà appliquée.
- "Abaisser à 18 ans l’âge minimum d’éligibilité au Sénat" afin de l’aligner sur les critères en vigueur sur les autres scrutins.
> "Progresser vers la parité"
La commission Jospin constate que les résultats obtenus en matière de parité depuis les années 2000 demeurent "insuffisants". Ainsi propose-t-elle de "compléter les effets de l’extension de la proportionnelle sur le respect de la parité en renforçant le dispositif de modulation des aides financières aux partis politiques".
> "Limiter strictement le cumul des mandats parlementaires"
Partant du constat que "le cumul d’un mandat parlementaire avec des responsabilités loales est devenu une habitude française", la commission Jospin propose, conformément à l’engagement présidentiel de François Hollande, de "rendre incompatible le mandat de parlementaire avec tout mandat électif autre qu’un simple mandat local simple à compter des prochaines élections locales".
Cette réforme favoriserait "le renouvellement du personnel politique" et "impliquerait des changements profonds dans les comportements et les équilibres institutionnels".
D’autre part, la commission "écarte l’idée d’un traitement différencié entre députés et sénateurs", comme le demandent plusieurs sénateurs socialistes, à commencer par leur chef de file et proche de François Hollande, François Rebsamen.
> Prévenir les conflits d’intérêts
Enfin, le rapport accorde une grande part à ses préconisations en matière de conflits d’intérêts dont deux dispositions concernent les parlementaires.
Rappelant les efforts faits dans le sens de la transparence et de la prévention des conflits d’intérêt par les deux assemblées (déontologue à l’Assemblée nationale depuis 2011 et comité de déontologie au Sénat depuis 2009), le rapport Jospin propose d’inscrire "dans la loi organique le principe de l’obligation des déclarations d’intérêts" et que cette déclaration d’intérêts soit fusionnée avec la déclaration d’activité. Déclaration qui "devrait recenser les activités ou fonctions" ainsi que les intérêts détenus par les parlementaires dans "les cinq années précédant" leur élection.
Cependant, "la Commission ne juge pas souhaitable" que ces mesures s’appliquent aux déclarations de patrimoine, "qui doivent rester confidentielles".
Aussi propose-t-elle surtout un changement de paradigme et donc d’inverser "la logique du régime actuel, qui est celle de la compatibilité a priori des activités professionnelles" : "le mandat parlementaire étant une activité à plein temps, il serait a priori incompatible avec toute activité professionnelle, sauf exception prévue par la loi."
Si le rapport considère que "les dispositions actuelles relatives aux activités de conseil ne sont pas satisfaisantes", il juge en revanche "nécessaire de ne pas autoriser l’accès à la profession d’avocat en cours de mandat".