Le site spécialisé dans la révélation d'affaires politico-judiciaires rend compte de sa rencontre avec le ministre délégué chargé de la politique de la ville, qui a tenu, enregistré, des propos très durs contre Mediapart.
"Vous faites une enquête pour savoir si ma femme a un amant ?"
Sur mediapart.fr
Mediapart, le site d’information créé en février 2008 par Edwy Plenel, qui avait été en première ligne dans les révélations d’affaires politico-financières sous la présidence de Nicolas Sarkozy, a publié, dimanche 16 septembre, sa première « affaire » visant un ministre du gouvernement de Jean-Marc Ayrault (lien payant).
En l’occurrence : François Lamy, ministre délégué, chargé de la politique de la ville, et bras droit politique de l’ancienne première secrétaire du Parti socialiste, Martine Aubry.
François Lamy et Martine Aubry à La Rochelle, en août 2012 (photo MaxPPP) :
Le site d’information assure que, en 2007, celui qui était alors député et maire de Palaiseau, dans l’Essonne, "a omis de payer sa taxe foncière et même sa taxe d’habitation en 2007".
Un oubli d’ailleurs reconnu par le service de presse du ministre délégué, qui assure que la situation a été régularisée dès l’année suivante – "cela a été rattrapé et mensualisé" - et met cette erreur sur le compte d’un "souci au niveau de l’adresse".
Le site publie plusieurs documents très personnels dans sa charge contre le ministre délégué :
- attestation des services fiscaux,
- plans cadastraux,
- capture d’écran Google Street View de la façade de la maison du député,
- plans d’architecte, ...
Au-delà de ces publications, le journaliste de Mediapart livre également le récit de sa rencontre avec le ministre délégué, qui s’est déroulée, vendredi 14 septembre, "dans [l]es bureaux du ministère", dont "François Lamy a accepté l’enregistrement", et qui "a duré plus d’une heure".
Mediapart cite, dans ce cadre, des propos très durs tenus par le ministre délégué contre le site d’information :
Le journaliste écrit ainsi :
Après nous avoir demandé si nous cherchions des informations sur "la couleur des murs" de sa maison ou "l’achat de la peinture", puis si nous avions "travaillé dans la police", le ministre n’a cessé de contester le bien-fondé de nos questions, répétant qu’elles s’apparentaient à "un viol de sa vie privée".
Et, citant directement le ministre :
Pourquoi je donnerais suite à l’entretien ?
Après vous faites quoi ?
Vous faites une enquête pour savoir si ma femme a un amant ?
Ou bien encore :
Vous avez fait une enquête avant.
Vous avez été chercher partout dans des éléments qui constituent quand même ma vie privée.
Vous avez passé du temps, vous avez coûté de l’argent à votre journal. Et après vous me racontez que c’est juste une enquête.
Je côtoie beaucoup de journalistes. Soyez sérieux. Ou au moins franc et honnête.
Le ministre délégué assure enfin :
La réponse, elle ira devant le tribunal.
Cela me permettra aussi de dévoiler vos sources.
En juin 2012, la garde des Sceaux, Christiane Taubira, annonçait "une réforme de la loi pour garantir aux sources 'une protection réelle'", regrettant que "les sources ne bénéficient aujourd'hui d'aucune garantie".