Notre éditorialiste Olivier Duhamel analyse les propos du ministre des Outre-Mer sur le défunt président vénézuélien Hugo Chavez et les critiques qu’ils ont déchainées.
Subtil, trop subtil
Victorin Lurel, ministre des Outre-Mer, représentait la France aux funérailles de Hugo Chavez. Deux de ses déclarations font scandale. Et pourtant, elles ne manquent pas d’une certaine pertinence.
Moi je dis, et ça pourra m'être reproché, (...) que le monde gagnerait à avoir beaucoup de dictateurs comme Hugo Chavez puisqu'on prétend que c'est un dictateur. Il a pendant ces 14 ans respecté les droits de l'Homme.
Incontestable que, comparé au Coréen du Nord Kim Jong Un, au Biélorusse Loukachenko, au Turkmène Berdimuhamedow, aux Iraniens Khamenei et Ahmadinejad, au Cubain Raul Castro, Chavez a été élu et réélu par des élections libres.
Toute chose égale par ailleurs, Chavez c'est de Gaulle plus Léon Blum.
De Gaulle parce qu'il a changé fondamentalement les institutions et puis Léon Blum, c'est-à-dire le Front populaire, parce qu'il lutte contre les injustices.
Incontestable que Chavez a instauré un présidentialisme pas si loin du nôtre, et qu’il a développé des programmes sociaux.
Alors, où réside l’erreur ?
Dans l’oubli qu’à l’ère de la vidéocratie, il convient d’éviter les subtilités tant le message est simplifié.
Sur les dictateurs, son propos est ramené à une apologie des dictateurs, alors qu’il veut dire le contraire. Il aurait dû déclarer que nombre de dictateurs feraient mieux d’accepter des élections libres comme Chavez l’a fait.
Sur De Gaulle et Blum, son propos est compris comme un dithyrambe à la Mélenchon. Il aurait dû dire que Chavez s’était inspiré de De Gaulle sur les institutions et de Blum sur le social.
Tout politique doit se rappeler cette règle : avant de parler, comment mes propos risquent-ils d’être résumés et déformés ?