Du temps pour préparer la loi sur le mariage pour tous. C'est ce que demande Jean-Jacques Urvoas, le président de la commission des lois, ce 18 octobre. Résultat, au lieu d'être débattu au Parlement fin décembre, le texte passera entre les mains des députés et sénateurs fin janvier 2013.
Un délai qui ne devrait pas mécontenter le gouvernement. Si le projet de loi sera bien examiné en conseil des ministres le 31 octobre, un délai supplémentaire pour le vote ne sera pas de trop. Le texte suscite des tensions, tout particulièrement sur la procréation médicalement assistée (PMA). Du temps, il leur en faut donc pour se positionner.
Voici la situation: Jean-Marc Ayrault ne veut pas inclure dans le projet le droit pour les couples de femmes à recourir à la PMA. Son premier soutien sur ce plan est Christiane Taubira, une des deux ministres chargées du dossier. L'autre ministre, Dominique Bertinotti, n'a pas une vision aussi tranchée sur la question.
Puisque le gouvernement n'en veut pas dans son propre texte, les députés socialistes s'en sont saisis. Le président du groupe socialiste à l'Assemblée, Bruno Le Roux, veut déposer un amendement pour autoriser la PMA. Astuce : même s’il n’y en a pas trace dans le projet de loi, le gouvernement peut très bien soutenir la PMA via l’amendement de ses députés. Une façon de la faire rentrer par la fenêtre. Mais à l'heure actuelle, Jean-Marc Ayrault ne laisse rien savoir de ses projets.
Le temps supplémentaire avant le vote lui sera profitable pour prendre le pouls de l'opinion. En attendant, le chef du gouvernement pèse ses mots dans ses interviews : le projet de loi ne parlera pas de la PMA, point. Rien sur un soutien ou un refus de l'amendement. Exemple le 16 octobre sur Europe 1 :
Le projet du gouvernement, celui présenté en conseil des ministres, c’est à la fois le mariage pour tous et l’adoption, et sera limité à cette question. Après, le débat parlementaire aura lieu. Il y a des points de vue, c’est aussi un débat dans la société.
Quant à Dominique Bertinotti, seconde ministre chargée du dossier, elle fait comprendre de plus en plus clairement sa position. Très évasive au départ, elle s'est montrée bien plus précise sur RFI le 15 octobre, appelant à voter une "belle loi sociétale" pour "résoudre le maximum de situations" :
A partir du moment où on parle du mariage et de l’adoption, on aborde la parentalité, alors il faut traiter toutes les formes de parentalité et la PMA en fait partie. Le fait qu’on puisse apporter une réponse à la PMA est une façon de répondre à la diversité des situations.
Elle est tout à fait autorisée en Belgique et en Espagne, c'est-à-dire à deux heures de vol ou de train.Cela traduit une évolution de la société. Si l’Espagne et la Belgique ont fait la PMA, c’est que eux aussi ont réfléchi.
Il faut faire une belle loi sociétale, c’est celle qui va pouvoir résoudre le maximum de situations aujourd’hui.
Selon Europe1.fr, cette initiative des députés PS arrange bien François Hollande qui ne veut pas brusquer les Français [52% seraient par exemple contre l'adoption par les couples homosexuels selon un sondage Ifop pour Le Figaro]. L'amendement sur la PMA serait donc une sorte de "ballon d'essai".