REPORTAGE - "Quoi ? Ils combattent NKM en tant que droite ?" La jeune femme qui passe a du mal à comprendre. Les militants UMP qui tractent à la sortie du métro Pernety sont bien les adversaires de Nathalie Kosciusko-Morizet, pourtant candidate à la Mairie de Paris investie par le parti. Ces militants revendiquent surtout leur soutien à Marie-Claire Carrère-Gée, responsable de la section du 14e arrondissement de Paris, préssentie pour prendre la tête de liste aux prochaines municipales avant que NKM ne décide de prendre la place.
Marie-Claire Carrère-Gée est là, avec sa petite équipe de sept militants. Juchée sur des talons, elle porte une doudoune sans manche au-dessus de sa veste. L'automne s'est rafraîchi ces derniers jours, et la candidate est un peu malade ce 11 octobre. Mais n'en fait pas toute une affaire lorsqu'un passant s'approche d'elle pour l'embrasser: "bon, j'ai des miasmes, mais allez !"
Là où Nathalie Kosciusko-Morizet est décrite par ses détracteurs comme hautaine et distante, sa dissidente joue à fond la carte de la proximité. Elle tutoie tout le monde ici, devant le métro Pernety, où les hommes en costard se mêlent aux jeunes du quartier. Elle rigole volontiers et ne se formalise pas lorsque les passants lui refusent sèchement le tract qu'elle distribue.
Parfois, Marie-Claire Carrère-Gée parvient à accrocher l'attention d'un passant. Comme cet habitant du quartier intéressé par la démarche de l'équipe :
"On n'a pas besoin de NKM ! Ce ne sont que des opportunistes !
Je sais que Paris apparaît comme un tremplin, mais là, c'est trop énorme. Ça pue le parachutage et maintenant ça ne passe plus.
"
L'homme avec qui Marie-Claire Carrère-Gée échange se dit "de sensibilité à gauche, mais de par son travail, à droite". "On est les gaullistes de l'UMP, ça devrait le faire", blague la candidate, avant de lui donner sa carte et son "mail perso".
On interroge Marie-Claire Carrère-Gée sur son combat. Elle qui raille "les méthodes qui ont fait échoué la droite en 2001" et qui maintient sa candidature, au risque d'affaiblir son propre camp. Elle qui dit qu'on ne peut pas trouver "plus discipliné, plus loyal" qu'elle mais qui est partie en dissidence la fleur au fusil quelques heures après l'annonce de l'arrivée de NKM dans son arrondissement. Elle qui dit ne pas faire grand cas de son avenir personnel, mais pour qui la place de tête de liste n'est pas négociable.
Face à ces contradictions, Marie-Claire Carrère-Gée préfère exposer celles de NKM:
"Aujourd'hui, le seul argument de NKM contre nous, c'est qu'on a perdu en 2008 dans le 14e. Mais elle a désigné des gens qui ont fait des scores pitoyables en 2008 !
"
Et si Nathalie Kosciusko-Morizet prenait la première place sur la liste tout en lui promettant la mairie d'arrondissement en cas de victoire, pourquoi n'accepterait-elle pas ? Marie-Claire Carrère-Gée campe sur ses positions: NKM est la bienvenue, mais en troisième position sur sa liste.
Les deux femmes sont toutes les deux droites dans leurs bottes, et c'est bien l'un des rares points en commun qu'on peut leur trouver. Car jusque dans leur physique, NKM et MCCG n'ont rien à voir : là où la star de l'UMP parisienne est élancée et a le teint diaphane, sa dissidente n'est pas bien grande, porte les cheveux bruns et passe visiblement de longues minutes à se maquiller le matin.
Chemise à jabot et grosses boucles d'oreille, cette ancienne secrétaire générale adjointe de l'Elysée époque Chirac connaît la politique et ses coups bas. Et ne s'en formalise pas :
"Chez NKM, ils ont fait des comptes Twitter anonymes contre nous.
Quelqu'un nous a décrits comme des militants 'fanatisés'. Mais on est juste soudés. C'est très simple
"
La nuit est tombée, Marie-Claire Carrère-Gée va se réchauffer dans un bar et commande une margarita. Les sept militants autour de la table lui ont juré fidélité. Lorsqu'ils répondent au journaliste face à eux, les hommes de son équipe la regardent elle, comme pour parler sous son contrôle. L'une des militantes raconte même recevoir des appels du pied par texto de ses anciens amis passés chez NKM. La patronne écoute et refuse de commenter.
Son fils l'appelle pour lui dire qu'il part au Parc des Princes. La sonnerie de son téléphone ? Une chanson du groupe de rock Arctic Monkeys. Etonnant pour celle qui a plutôt des airs de la chanteuse Julie Pietri . "Je t'embrasse mon doudou", conclut sa mère. Marie-Claire Carrère-Gée finit sa margarita, et lèche le sucre collé sur le dessus de son verre.
L'anti-NKM, une fois de plus.