Payez la mondialisation, achetez français !

Publié à 10h53, le 13 décembre 2011 , Modifié à 09h49, le 14 décembre 2011

Payez la mondialisation, achetez français !
François Bayrou, chantre du "fabriqué en France", le 10 décembre à Pau. (Maxppp)

En cette période pré-électorale, le "made in France" est en vogue dans la classe politique française. En visite ce mardi chez le fabricant de skis Rossignol à Sallanches, en Haute-Savoie, Nicolas Sarkozy ne fait pas exception à la règle.

Sauf, souligne notre blogueur Vogelsong, que derrière l'objectif de produire - et consommer - français, se cachent surtout des réflexes chauvins, voire nationalistes. Signes de l'impuissance des politiques à contenir les méfaits de la mondialisation.

  1. "Made in France", le commerce équitable franchouillard

    Le "made in France" comme seule réponse à la désindustrialisation du territoire, aux ravages de la mondialisation, cette bienfaitrice. On s’en remet, et ce n’est pas nouveau, aux psalmodies des agences de communication. De Bruno Le Maire à François Bayrou, en passant par le Parti socialiste normalisé à la sauce Pascal Lamy. Face à la crise économique et à la paupérisation massive des foyers français, les élites politiques ressortent la vieille antienne.

    Mais les réponses concrètes manquent. S’en remettre à l’impossibilité de faire autrement conduit à annoncer la mort du politique. En période électorale c’est suicidaire. D’autant plus que Marine Le Pen et les souverainistes occupent le terrain et surtout proposent quelque chose…

    Comment faire du neuf avec de l’antique, du clinquant avec du ressassé ? C’est à cette triste besogne que se livre la fine fleur de l’économie française. Tentant de réussir le grand écart entre la totale soumission au modèle de globalisation économique, et une réponse au malaise de plus en plus prégnant des dévastations sociales qu’elle induit. Même si le cercle de la raison n’est pas impacté par la baisse du niveau de vie, il ne peut ignorer que la montée du chômage, mais surtout l’absence totale de perspective conduisent le pays sur des sentiers dangereux. Trente années de mondialisation (dite) heureuse, pour constater, édifié, que l’automobile hexagonale, ce fleuron, ferme ses pôles de R&D. Sur la longueur, l’entourloupe commence à se voir.

    Pour faire bonne figure, on ne trouve rien de mieux que le slogan "acheter français". Un badge, un sticker, une cocarde épinglée au produit pour rappeler au consommateur de se comporter en citoyen : préserver l’emploi hexagonal. Une sorte de commerce équitable franchouillard.

    On imagine que les foyers dont le pouvoir d’achat tend à diminuer achèteraient des produits plus onéreux "sur la base du volontariat" comme se plaisent à le signifier les communicants après avoir inculqué pendant des décennies la froide concurrence par les prix et les vertus économiques du salarié à bas coûts, mineur et sans protection sociale.

    La situation en deviendrait saugrenue si elle n’était pas sordide.

    Finalement, le "made in France" comporte beaucoup d’avantages. Les propriétés du nationalisme, bien en vogue, sans en avoir les contraintes. Elle permet à moindres frais de flatter le cortex reptilien tricolore, de s’occuper de la mondialisation, sans rien y changer dans le fond. C'est-à-dire d’en faire porter la charge aux mêmes, consommateurs, classe moyenne, classe populaire.

    L’hypothèse protectionniste a été écartée par les élites dirigeantes pour raisons de cryptoxénophobie. C'est pourtant une hypothèse qui nait d’une volonté de rééquilibrage du commerce mondial, hors du présupposé nationaliste et égotique (relire Walter Bello). Appliquer une taxe européenne à l’entrée du territoire pour que, sur l’étal, le consommateur n’ait pas à choisir entre le coût du travail misérable d’un pays en développement et sa propre protection sociale.

    La stigmatisation xénophobe du protectionnisme permet la pirouette sémantique du pis-aller "made in France". Elle cantonne les partisans de la "démondialisation"à partager le même banc que Marine Le Pen. Elle accrédite la thèse chauvine de la régulation économique. On lui préfère donc le vain "made in France", indolore, inodore, inefficace socialement. Cet authentique placebo électoral.

  2. Un rapport sur le "Made in France" commandé par l'Élysée en 2010 déjà

    Sur lesrapports.ladocumentationfrancaise.fr

    Le député Yves Jégo a remis un rapport sur le "Made in France"à Nicolas Sarkozy le 6 mai 2010. Le Lab vous propose de le lire.

     

  3. "Made in France" : Georges Marchais, déjà...

    Sur Rue89.com

    Le site Rue89 s'est penché sur la propagation du "made in France", un concept qui transcende aujourd'hui l'échiquier politique de François Bayrou à Marine Le Pen. Une vieille idée communiste popularisée par Georges Marchais lors de la campagne de 1981.

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