La joie n’était pas forcément visible sur le visage de François Fillon dimanche 27 novembre, mais le député de Paris a bien remporté, avec plus de 66 % des suffrages, la primaire de la droite et du centre, face à Alain Juppé. Désormais, le pire scénario pour le candidat vainqueur est… la balladurisation. Autrement dit : caracoler en tête des sondages pendant des mois et finir par perdre la présidentielle. Le même scénario qu’Édouard Balladur face à Jacques Chirac en 1995, ou Alain Juppé face à François Fillon pour cette primaire.
"Il n’est pas du tout favori", s’est donc empressé de démentir Bruno Retailleau sur Franceinfo: ce lundi, alors qu’un premier sondage post-primaire donne François Fillon vainqueur de l’élection présidentielle. Le sénateur filloniste a ensuite présenté son poulain comme… le candidat anti-système. Pourquoi ? Voici son explication :
"- Bruno Retailleau : Je crois qu’il s’est installé, on l’a vu cette semaine, un peu comme un candidat anti-système. [...] Le système, c’est une petite élite - pas toute l’élite, c’est pas ce que je veux dire du tout, une sorte de microcosme, comme disait Raymond Barre - qui, dès lors qui veut secouer le cocotier, vous caricature. Quand je vois un éditorialiste…
- Franceinfo: : Ah, c’est les journalistes ?
- Bruno Retailleau : pas tous, il y a aussi les élus… - qui compare François Fillon à 'Tariq Ramadan des sacristies' [dans Libération, ndlr], je rigole. Ces gens-là, en réalité, cette semaine, nous ont rendu un très grand service. Ils ont mobilisé l’électorat - et je pense qu’aujourd’hui les Français sont un peu plus libres - qui ne se laisse pas dicter ses choix, c’est très bien. Si François Fillon, avec la joie très contenue qu’il avait hier soir, avait triomphé, il se serait peut-être installé dans le rôle qu’on voulait lui assigner. Mais c’est pas du tout son cas il est très concentré. Et encore une fois, la campagne présidentielle sera dure.
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Le terme de "caricature" a été largement répété par François Fillon lui-même entre les deux tours de la primaire. D’abord le 21 novembre, pour dénoncer les attaques d’Alain Juppé qui tentait selon lui de "remonter la pente". Ensuite à l’adresse des journalistes Alexandra Bensaïd (France Inter) et Gilles Bouleau (TF1) lors du débat face au maire de Bordeaux. Questionné sur le programme de réforme de la sécurité sociale, l’ancien Premier ministre avait répondu : "Gardez vos caricatures pour vous !" Un peu plus tard, interrogé sur l’augmentation du temps de travail (jusqu’à 48 heures par semaine), il avait lancé : "Ça y est, encore la caricature, on va y avoir droit toute la soirée". De même pour la critique du microcosme, réitérée lors de son dernier meeting de campagne parisien.
On notera tout de même que les candidats dits "anti-système" représentent désormais la quasi totalité des prétendants à l’Élysée : de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen, en passant par Emmanuel Macron, Arnaud Montebourg, et désormais François Fillon. Même si ce dernier est élu depuis qu'il a 27 ans.
Concernant les autres, on ne sait pas, mais Bruno Retailleau n’est pas tout à fait d’accord avec le fait que le Front national soit anti-système. Car selon le président de la région Pays de la Loire, le parti d’extrême droite se complaît parfaitement dans ce système. Il a poursuivi :
"Le Front national a le plus grand intérêt à ce que le système ne change pas. Le Front national prospère lorsque la droite se renie. Le Front national a besoin d’un système qui perdure pour pouvoir croître. Voilà. C’est une des leçons de la semaine aussi. Et franchement, le système de casse sociale, c’est le programme du Front national : 'sortez de l’euro, remettez les retraites à 60 ans'. Ce sont les Françaises et les Français les plus fragiles qui seraient les premiers atteints.
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