Il y a peu de points communs entre Jean-Luc Mélenchon et Fabrice Luchini. L'un représente la gauche de la gauche et l'autre fustige "la gauche qui ne symbolise plus les grands idéaux et les grands projets, la gauche du ressentiment" et trouve François Fillon "pas inintéressant".
Pourtant, les deux ont été à la même table la semaine passée, réunis par le magazine GQ qui les avait nommés hommes de l'année.
Et Jean-Luc Mélenchon raconte cette rencontre dans un de ses longs billets de blog. L'histoire d'une "mutuelle attraction, l’assaut du jeu des cabotinages, la joute serrée des mots et des références littéraires", explique-t-il.
Pourtant, la chaleur du rapport entre les deux hommes n'était pas garantie. Tout d'abord pour des raisons politiques. Jean-Luc Melenchon parle de Fabrice Luchini comme d'un "réactionnaire assumé". Lui se considère comme un "vagabond idéologique", dans L'Express.
Entre les deux hommes, un sujet principal de discussion, raconte le co-président du Parti de gauche : la Révolution française. Un sujet sur lequel Jean-Luc Mélenchon et Fabrice Luchini ne partage pas la même lecture :
Luchini n’aime pas Robespierre à qui il me compare autant par jeu que pour se situer. Ce fut notre sujet.
Et pour séduire le comédien, Jean-Luc Melenchon lui donne des conseils de lecture sur la question :
Il me demanda conseil pour lire sur la Grande Révolution parce que je crois que je la lui ai présentée sous un jour nouveau. J’hésitais. Lui proposer Jaurès, Soboul ou plus directement Hazan me sembla trop anguleux pour lui. Je suggérais Michelet quoique je ne sois pas du même angle que celui-ci, et de très loin.
Plutôt que des lectures marquées à gauche, Jean-Luc Mélenchon préfère conseiller à Fabrice Luchini une vision plus lyrique de la Révolution française. "Mais je me suis dit qu’un acteur et un littéraire entrerait plus facilement dans la beauté de ce moment de l’histoire par une évocation fortement teintée de lyrisme comme celle-là", précise-t-il.
Le second volet de la séance de séduction est plus politique. Jean-Luc Mélenchon le lettré a laissé sa place au pédagogue. Au menu des explication : le revenu maximum annuel à trois cent mille euros :
Je lui explique que la tranche à cent pour cent est inclue dans le barème de l’impôt. Les trois cent mille euros restent acquis ! Peut-être l’ai-je rassuré ! Pourquoi cette somme, comment, et ainsi de suite. Je ne dis pas que j’ai convaincu mais je vois bien que l’idée est alors comprise dans son sens exact : ni une punition ni une aigreur sociale mais un choix de vie en société où il est mis une limite à l’accumulation et aux consommations ostentatoires.
[mise à jour, 22/01] - BONUS : le stand-up de Jean-Luc Mélenchon.
Lors de la cérémonie de remise de prix de GQ, Jean-Luc Mélenchon a fait le spectacle lors de sa prise de parole. Il s'est notamment exprime en anglais, "la langue de l'occuprant".
Par ailleurs, celui qui s'est présenté comme un "humble roturier, devant la noblesse de l'entresoi" est revenu sur sa rencontre avec Fabrice Luchini, "il n'y a qu'à lui que je peux me comparer".