Un fait divers = une loi : la méthode Sarkozy

Publié à 12h01, le 22 novembre 2011 , Modifié à 15h41, le 22 novembre 2011

Un fait divers = une loi : la méthode Sarkozy

Tout est prêt. Mercredi, en conseil des ministres, le garde des Sceaux, Michel Mercier, présentera de nouvelles mesures contre la récidive. Une réponse au meurtre d'Agnès à Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire), en fin de semaine dernière, qui entre en plein dans la stratégie Sarkozy : un fait divers = une loi. Le Lab revient sur l'ensemble de ces textes législatifs édictés sous le coup de l'émotion et jauge leur efficacité.

  1. Ce que propose Michel Mercier

    Suite au drame de Chambon-sur-Lignon, le gouvernement souhaite réagir. Mercredi, en conseil des ministres, Michel Mercier avancera les propositions suivantes :

    • Placement en centre fermé jusqu'au jugement. Tout mineur ayant commis "un crime sexuel particulièrement grave" devra dorénavant être placé en centre éducatif fermé (CEF). Jusqu'à présent, la durée de placement en centre éducatif fermé ne pouvait excéder six mois, renouvelable une fois. Dorénavant, "pour les crimes les plus graves, le garde des Sceaux demandera aux parquets de requérir le placement en centre éducatif fermé jusqu’au jugement".
    • Augmentation de "50%" de la capacité des CEF. Lundi soir, sur TF1, Claude Guéant a indiqué que le gouvernement allait "accroître le nombre de centres éducatifs fermés". "Il y a actuellement 500 places, la capacité va être augmentée de 50%", a précisé le ministre de l'Intérieur.
    • Meilleur partage de l'information. Le gouvernement demande que les inscriptions scolaires pour les élèves sous contrôle judiciaire "dans des cas aussi graves" que celui du meurtrier présumé d'Agnès ne soient plus possibles sans avoir fourni une information "complète" notamment au chef d'établissement et au "psychiatre chargé du suivi, en cas de placement sous contrôle judiciaire dans des cas aussi graves, dans le respect des règles sur le secret des enquêtes".
    • Renforcement du suivi des délinquants sexuels. L'objectif du gouvernement est de renforcer le suivi des personnes présentant un risque de récidive, en particulier des délinquants sexuels, d’améliorer la prise en charge des mineurs délinquants en accroissant la capacité d’accueil" dans les CEF et de développer un suivi pédopsychiatrique dans ces centres".
  2. Les faits divers bougent les lignes sur la récidive

    Sur europe1.fr

    Avant de nouvelles annonces pour lutter contre la récidive, Europe1.fr revient sur ces événements tragiques à l'origine d'un nouveau cadre législatif : 

    • décembre 2005 : affaire Nelly Crémel = renforcement de la répression contre la récidive et nouvelles mesures de suivi des condamnés "dangereux". La nouvelle loi incorpore l'utilisation du bracelet électronique, inséré dans le droit positif en 1997 et qui sera étandu aux conjoints violents dans le cadre d'une loi de 2010.

    DANS LES FAITS
    En 2010, près de 6.500 individus portaient un bracelet électronique. Lire ici le bilan contrasté de son efficacité.

     

    • 2008 : affaire Francis Evrard = instauration de la "rétention de sûreté". Cette mesure permet de retenir dans des centres fermés des condamnés jugés particulièrement dangereux et qui ont été condamnés à une peine supérieure à 15 ans. 

    DANS LES FAITS
    Après retoque du Conseil constitutionnel, cette mesure ne sera finalement applicable qu’en 2023.

    • 2010 : affaire Hodeau = introduction de la possibilité d'une "castration chimique" d’un délinquant sexuel récidiviste. 

    DANS LES FAITS
    Cette loi reste très peu appliquée à ce jour. En outre, son efficacité reste très aléatoire.

  3. Les autres lois inspirées de faits divers

    Sur lexpress.fr

    En dehors des faits de récidives, mais des événements ont inspiré les hommes de Nicolas Sarkozy. L'Express cite quelques exemples : 

    • mai 2006, affaires des meutres de Madison et Mathiasconservation des traces des condamnations sexuelles sans qu'une prescription automatique ne s'applique à ces faits, maintien dans le casier judiciaire les actes commis avant la majorité quand il s'agit de faits de violence grave.
    • novembre 2008, un étudiant poignardé par un schizophrène de 56 ans, plan de sécurisation des hôpitaux psychiatriques impliquant la multiplication des structures d'enfermement.

    DANS LES FAITS
    Créés en 2002 par la loi Perben I, les centres éducatifs fermés (CEF) accueillent les mineurs délinquants multirécidivistes de 13 à 18 ans. C'est une alternative à l'incarcération et viennent toujours après l'échec de mesures éducatives. Il en existe aujourd'hui 44, d'une capacité totale de 500 places. Régulièrement, le gouvernement souhaite augmenter leur nombre. 

    • juillet 2010, photographie primée à Nice mettant en scène le drapeau français, publication d'un décret prévoyant une amende de 1500 euros pour "outrage au drapeau". 

    DANS LES FAITS : 

    Un an après son vote, la loi a pu s'appliquer. Le Conseil d'Etat a rejeté un recours de la Ligue des Droits de l'Homme (LDH) contre le décret élargissant le délit d'outrage au drapeau mais l'a nuancé en précisant qu'il ne s'appliquait pas à l'expression d'idées politiques, philosophiques et à la création artistique.

    • juillet 2010, violences urbaines à Grenoble, réduction de moitié le nombre de camps de Roms, augmentation des reconduites à la frontière
  4. En 2003, Sarkozy critiquait cette méthode

    Au pouvoir, en tant que Président comme de ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy a donc souvent utilisé cette méthode : un fait divers, une loi. Pourtant, il critiquait ce reflèxe en 2003. LePost.fr a compilé une vidéo une belle démonstration de ce changement de position. 

  5. Cet article se construit avec vous !

    Que pensez-vous de la méthode "un fait divers, une loi" ? Si vous avez des liens intéressants sur la question, partagez-les avec nous, nous enrichirons cet article ! 

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