Les retours fugaces de Dominique Strauss-Kahn, Tariq Ramadan ou Dominique de Villepin dans la campagne présidentielle ? La faute à sa vacuité, pour Delphine Dumont, blogueuse Le Lab, qui la compare à Speakers' Corner, ce coin d'un parc londonien où n'importe qui peut prendre la parole... et dire n'importe quoi.
Des débats faiblards ouvrent la voie à qui veut revenir sur le devant de la scène
Chaque campagne électorale est composée de divers ingrédients, des programmes des candidats aux boules puantes. Il y a aussi les pique-assiettes, ceux que la presse pointe en disant qu'ils "s'invitent dans la campagne".
Pour cette présidentielle 2012, le débat d'idées est un peu faiblard. Au PS, on peut résumer le discours à : "Sarkozy, il est tout vilain, il a tout fait mal, il vous fait du mal, venez voir Papa Hollande, il est normal, lui". À droite, Nicolas Sarkozy rappelle que "il a tout donné, il s'est parfois trompé, nobody's perfect, mais il s'est amélioré et il sait, lui, ce qu'il va falloir affronter dans les cinq ans à venir". Ce qui est vrai, d'ailleurs.
Cependant, ces lignes ne permettent pas trop la discussion, les échanges sont souvent réduits à du "même pas vrai". Forcément, ça ouvre des boulevards pour ceux qui veulent s'inviter dans la campagne. Cette année, ça a été un festival et il reste six jours pour ceux que ça tenterait...
Nous avons eu, par exemple, Tariq Ramadan qui a rebondi sur la polémique de l'appel des 700 mosquées à voter François Hollande. Au départ, il y a un article de Marianne2 avec du conditionnel à foison. À l'arrivée, on ne sait plus ce qui est vrai, mais ça a permis à Tariq Ramadan de faire parler de lui.
On a eu aussi Dominique de Villepin qui est venu nous livrer sa précieuse analyse totalement dénuée de la moindre intention de nuire à Nicolas Sarkozy, bien sûr. On a admiré le style soigné, le verbe élégant et le maintien de la cheminée. Ça a un peu buzzé sur la toile, dans les télés et les radios, puis après ses trois petits tours dans la campagne, Villepin est retombé dans l'oubli.
Ensuite, on a eu le doublé DSK. D'abord, la vraie-fausse interview qu'aurait eue Edward Epstein avec l'ex-directeur du FMI relance cette affaire sans rien nous apprendre de plus sauf la sortie du livre du journaliste américain. Non, je n'ai pas dit "coup de pub". Là-dessus, Julien Dray a l'idée géniale d'inviter des acteurs, des membres du PS et des Verts à fêter un anniversaire. Pour que la soirée soit vraiment réussie, il choisit un invité-mystère de prestige, DSK himself, et un lieu approprié, un restaurant installé dans un ancien sex-shop, rue Saint-Denis à Paris. Quel farceur, ce Julien ! Tout le monde n'a pas apprécié la plaisanterie et quelques invités sont repartis sitôt arrivés. Dire qu'il y a un an seulement, DSK était le sauveur du PS, voire de la France...
Bref, il y a tant de vacuité dans cette campagne qu'elle s'est transformée en Speakers' Corner, ce coin de Hyde Park où n'importe qui peut prendre la parole pour dire n'importe quoi.