COPIÉ-COLLÉ – C’est un exemple flagrant de lobbying. La même copie d’un amendement à la loi Macron a été déposée 32 fois par des députés de tous bords, de l’UMP au PS en passant par le PCF ou les radicaux de gauche, mi-janvier.
Comme l'a repéré le collaborateur écologiste Pierre Januel , l’exposé de l’amendement – qui vise à supprimer un dispositif de la Loi Macron prévoyant la redistribution d’un partie des revenus des notaires les plus riches pour financer l’aide juridictionnelle d’Etat- est identique à la virgule près d’une proposition à l’autre, sans que ses dépositaires ne se soient même donnés la peine d’en modifier la formulation.
Et pour cause. Aucun d’entre eux n’est véritablement à l’origine de la proposition d’amendement. Celle-ci a été directement rédigée par le Conseil supérieur du Notariat, comme le prouve un mail que le Lab a pu se procurer :
Ces "suggestions" sont monnaie courante dans le travail parlementaire. En décembre, le JDD révélait ainsi que deux députés avaient déposé le même amendement à la demande du fabricant de Tabac Philip Morris. Ces 32 amendements soufflés par les notaires en apportent un exemple encore plus évident.
En préambule de son mail, le Président du Conseil Supérieur du Notariat, Pierre Luc Vogel, exprime ses inquiétudes après l’adoption du texte de la loi sur la croissance et l’activité en commission. Il note que :
"Bien des améliorations doivent être apportées au texte adopté par la commission spéciale pour permettre la survie de structures bien fragiles qui ne seront pas en mesure de faire face à une telle réforme.
"
Avant de proposer clés en main, les amendements qu’il souhaite voir déposés:
"Je me permets de vous adresser des propositions d’amendements, que vous trouverez en pièces jointes ainsi qu’une note synthétique de présentation de ces derniers, en prévision de l’examen en séance publique de ce projet de loi.
"
En pièce-jointe du mail, figurent effectivement deux documents dont l’un correspond au mot près à la proposition faites par les députés :
Contacté par le Lab, le député UMP du Nord Sébastien Huygues, un des parlementaires qui a déposé l’amendement en question, explique ne pas avoir participé à sa rédaction. Mais il reconnaît qu’il peut très bien avoir été rédigé par un groupe de représentants des professionnels. Il explique :
"Nous nous sommes prononcés contre cet aspect de la loi Macron. Après, le travail de rédaction c’est autre chose. Moi je n’y ai pas participé. Dans ces cas là, on peut faire appel aux services de l’assemblée comme aux représentants des professionnels.
"
Autre parlementaire à avoir déposé l’amendement, le député radical de la Charente Jérôme Lambert dit simplement avoir participé "par solidarité" à l'initiative d'un collègue de son groupe et ne pas s'être intéressé à sa rédaction.
Quand bien même l’amendement aurait été rédigé par le Conseil Supérieur du notariat, comme le lui suggère le Lab, Jérôme Lambert ne voit pas de problème et se justifie en évoquant les compétences naturelles de l’organisation sur ce sujet :
"Ce ne serait pas un problème parce que je trouve leurs propositions assez pertinentes sur le sujet. De toute manière, on ne peut pas sortir un texte de notre chapeau. Nous ne sommes pas des praticiens du droit. Une majorité des cas que l’on défend on nous les apporte.
"
Le lobbying du conseil supérieur du notariat est en tout cas une nouvelle preuve de la mobilisations des notaires. Et de leurs nombreux moyens d'action. En décembre, ils s'étaient déjà offert une campagne de publicité contre la loi Macron dans plusieurs quotidien nationaux.