Les cinq moments clés du discours de Manuel Valls à La Rochelle

Publié à 14h32, le 31 août 2014 , Modifié à 16h07, le 31 août 2014

Les cinq moments clés du discours de Manuel Valls à La Rochelle
Manuel Valls à La Rochelle, le 31 août 2014. (Capture d'écran LCP)

CAMARADES - Il était attendu au tournant. Invité de l'université d'été du Parti socialiste à La Rochelle, Manuel Valls a pris la parole dimanche midi pour défendre la ligne de l'exécutif.

Accusé d'être trop "social-libéral" par une partie de l'aile gauche du parti, Manuel Valls devait faire aussi bien qu'au Medef, où il a été applaudi debout mercredi par le patronat, sous peine de donner raison à ses contempteurs.

L'entourage du Premier ministre avait prévenu : Manuel Valls "ne veut pas se laisser enfermer dans les mots comme social-libéral, social-démocrate, au moment où la France est dans cette situation difficile. Il connaît les pièges de ces débats."

Le Lab vous synthétise les quelques 45 minutes de discours en 5 moments clés :

#1 - Dur dur de se lancer

Alors qu'il a déjà entamé son discours, Manuel Valls doit s'interrompre et appeler au calme une partie de la salle, qui continuer à crier "Vive la gauche !", le cri de ralliement (et nom du courant de l'appel des 100) des "frondeurs". D'autres militants scandent "Tous ensemble, tous ensemble, socialistes".

"Ce qui nous unit doit être plus fort que nos différences", lance alors le Premier ministre, qui se dit ému de s'exprimer à La Rochelle "pour la première fois en tant que Premier ministre". Avant de filer la métaphore de la famille :

Ce qui fait une famille, c’est une histoire partagée, c’est la solidité des liens. C’est la capacité à se rassembler. Car ce qui nous unit doit être plus fort que nos différences. C’est aussi la capacité à se retrouver, pour se parler et envisager ensemble l’avenir, le réinventer.

Et de mettre les "frondeurs", notamment, face à l'image renvoyée aux Français :

Qu’au sein d’un parti, il y ait des interrogations, des débats, c’est normal. C’est sain. C’est utile. c'est indispensable. Mais faisons attention aux choix des mots, à nos attitudes, à nos comportements, à la manière dont nous nous adressons les uns aux autres. Les Français nous regardent. Si nous ne montrons pas l’exemple, nous tous, comment pourraient-ils comprendre, retrouver confiance, avoir le sentiment que leurs efforts ont un sens?

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#2 Patriotisme économique

Le Premier ministre rappelle les chefs d'entreprises à leurs engagements, en échange des baisses de charges (inclues dans le pacte de responsabilité) consenties par les gouvernements Ayrault puis Valls de François Hollande :

La Nation a consenti un effort nécessaire et c'est donc maintenant aux chefs d'entreprise, parce que nous créons un début de confiance, de faire preuve de patriotisme économique, sur les salaires, en embauchant, en formant, en investissant.

Critiqué pour avoir martelé mercredi qu'il "aimait l'entreprise", Manuel Valls persiste :

La Nation a consenti un effort sans précédent. Cet effort était nécessaire. Il va se mettre progressivement en oeuvre. J’assume que la gauche fasse ce qui est nécessaire pour renforcer l’économie et donc les entreprises qui créent de la richesse et de l’emploi. Et nous le faisons dans le dialogue, en associant les syndicats aux réformes conduites. Et nous sommes vigilants, exigeants sur les engagements qui ont été pris.

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#3 Pas de changement de ligne économique

Non, non, non, nous on ne fait pas l'austérité. C'était le message principal du discours de Manuel Valls, qui a répondu à ses détracteurs de gauche par une épiphore (comme une anaphore, mais à la fin) selon laquelle "nous ne faisons pas l'austérité". Ce qui donne :

Quand nous créons 60.000 postes dans l’Education nationale pour refaire de l’école une priorité, nous ne faisons pas de l’austérité.

 

Quand nous préservons les missions du budget de la Culture pour la création et le spectacle vivant, nous ne faisons pas de l’austérité.

 

Quand nous créons des postes de policiers et de gendarmes, pour garantir la sécurité des Français sur tout le territoire –dans les quartiers populaires, dans les zones rurales– nous ne faisons pas de l’austérité.

 

Quand nous créons des postes dans la Justice, la pénitentiaire, et pour mettre en oeuvre la réforme pénale, nous ne faisons pas de l’austérité.

 

Quand nous agissons avec les emplois d’avenir pour permettre aux jeunes de débuter dans la vie, nous ne faisons pas de l’austérité.

 

Quand nous augmentons le RSA de 10%, quand nous mettons en place un grand plan de lutte contre la pauvreté, nous ne faisons pas de l’austérité.

 

Quand nous augmentons l’allocation de rentrée scolaire que viennent de toucher des milliers de familles, nous ne faisons pas de l’austérité.

 

Quand nous augmentons les bourses pour les étudiants, nous ne faisons pas de l'austérité.

"Sachons expliquer, valoriser ce que nous faisons ! Soyons-en fiers !", a conclu Manuel Valls. "Nous faisons des choix calibrés, équilibrés. Ils visent à préserver notre modèle social."

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#4 Love Love

"J'aime les socialistes" : c'était "LA" formule du discours de Manul Valls, faisant écho à son "j'aime l'entreprise" :

Je connais bien les débats qui peuvent agiter notre parti, je les respecte pour y avoir moi-même participé. Et c’est pour tous ces débats, ces discussions, ces confrontations, ces universités d'été qui font que la rentrée en France est un peu particulière, c'est pour toutes ces raisons... que j’aime les socialistes.

En creux, le Premier ministre réitère l'argument développé au #1. Pas de division, du rassemblement :

Je connais nos réflexions permanentes sur nos positionnements, ou notre ligne idéologique : Parti socialiste, parti social-démocrate...Elle est utile. Mais avoir des débats entre nous ne doit jamais nous détourner des Français. Car la gauche n’est jamais si grande que quand elle s’adresse au plus grand nombre.

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#5 Big Up et remerciements

Comme dans tout bon discours, il y a eu le temps des hommages et des remerciements. Manuel Valls cite pêle-mêle Jean-Marc Ayrault, Arnaud Montebourg, Benoît Hamon, a fait applaudir Najat Vallaud-Belkacem :

J'aurais aimé qu'à l'unisson, nous nous félicitions que la République ait su reconnaître les compétences, le travail, l'engagement. Et notamment en confiant pour la première fois, à une femme, elle aussi jeune, Najat Vallaud-Belkacem, cette lourde tâche d'être à la tête du ministère de l'Education nationale.

Surtout, Manuel Valls a réussi à faire lever une salle pas franchement favorable au chef de l'Etat pour proclamer "soutien et affection" à François Hollande :

Le chef de l'Etat mérite le respect de tous, il mérite notre affection, il mérite notre loyauté, il mérite notre soutien parce que c'est grâce à lui, c'est grâce à son engagement, c'est grâce à son élection, que nous pouvons aujourd'hui gouverner, que nous pouvons assumer nos responsabilités et si les socialistes ne sont pas au premier rang pour le soutenir, qui pourrait alors le faire ? Alors je vous demande, au-delà des questions naturelles, au-delà des débats, de dire et de proclamer, oui, notre soutien et notre affection au chef de l'Etat. C'est notre devoir d'être à ses côtés !

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# Réactions

Interrogé à la sortie du meeting par des journalistes de La Chaîne Parlementaire, Christian Paul, député de la Nièvre et l'un des chefs de file du mouvement des "frondeurs" a mis en garde contre le "grand écart" entre ce que Manuel Valls a dit aux socialistes, et ce qu'il avait auparavant annoncé aux chefs d'entreprise :

Quand il parle de la République, du maintien de la durée légale du travail, de Najat Vallaud-Belkacem, bien sûr tout le monde l'applaudit. (...) Il faut faire attention au grand écart. On voit bien qu'il y a une confrontation d'idée au sein du Parti socialiste, il faut essayer de trouver le bon chemin.

Et de détailler l'objectif des "frondeurs" à La Rochelle :

Le but ici c'était avant tout de montrer que nous avions des propositions. Qu'on pouvait être à gauche, efficace, sans renoncer à ses valeurs.

[Edit 16h00 avec réaction de Christian Paul]

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