>> À droite, un homme UMP, à gauche, une femme PS.
Julien Aubert, député UMP, appelle la présidente de séance "Madame le Président", persiste et signe. Sandrine Mazetier, lui oppose les règles posées par l’Assemblée et exige d’être appelée "Madame la Présidente". L’affaire se solde par une sanction, la privation pendant un mois du quart de son indemnité parlementaire du député, soit 1.378€, ce qui paraît pour le moins disproportionné.
Dernier épisode d’une querelle qui, chez nous, dure depuis vingt ans.
>> À droite, l’Académie française, à gauche, le pouvoir socialiste.
En 1986, Yvette Roudy, ministre des droits de la femme, fait publier une directive sur la féminisation, au nom de l’égalité. L’Académie française s’y oppose par un arrêt rédigé par Georges Dumézil et Claude Lévi-Strauss dénonçant la profusion de barbarismes.
En 1998, l’Académie française publie une Lettre au Président de la République, campant sur ses positions. De son côté, le bureau de l’Assemblée nationale adopte une instruction faisant obligation de féminiser les fonctions exercées au Palais Bourbon par des femmes.
En 1999, le Premier ministre, Lionel Jospin, préface un Guide à l’aide à la féminisation des noms de métiers, titres, grades et fonctions. On peut y lire :
"L’expression 'Madame le Ministre' est contraire :
– à la logique : elle emploie un générique dans un énoncé spécifique ;
– à la grammaire : le genre est d’abord l’accord des déterminants ;
– à la civilité : elle impose un masculin à une personne féminine singulière."
L’Académie française maintient ses objections et son refus.
>> Une nouvelle querelle des Anciens et des Modernes ?
Les batailles esthétiques ou linguistiques constituent une grande tradition française. La première querelle des Anciens et des Modernes oppose, au XVIIème siècle, les tenants du respect des règles de l’Antiquité, derrière Boileau, à ceux de l’innovation littéraire, derrière Perrault. Les Modernes remportent une victoire avec la décision que les Monuments du règne seront désormais gravés en français et non en latin.
La deuxième, au début du XVIIème, porte sur la légitimité d’une traduction et adaptation de l’Iliade d’ Homère. La troisième mit face-à-face partisans et adversaires de Marivaux et son théâtre dans le langage de la conversation. La quatrième se déploya en 1830, lors de la représentation de la pièce de Victor Hugo Hernani, les classiques s’en prenant aux romantiques.
On pourrait allonger la liste avec, le moderne Benjamin Constant, contre les partisans de l’Empire. Ou, aujourd’hui, le pourfendeur de la technologie Alain Finkielkraut contre l’apologiste du numérique Michel Serres…
Féminisation ou non ? La querelle peut paraître secondaire, voire, parfois, ridicule. Elle n’en oppose pas moins, comme toujours, les tenants de la tradition à ceux de la modernité.