Affaire Fillon : Virginie Calmels reprend l'intox sur Le Canard Enchaîné qui "reçoit des subsides de l'État"

Publié à 10h04, le 08 février 2017 , Modifié à 16h10, le 09 février 2017

Affaire Fillon : Virginie Calmels reprend l'intox sur Le Canard Enchaîné qui "reçoit des subsides de l'État"
Virginie Calmels © MEHDI FEDOUACH / AFP

ALTERNATIVE FACTS - François Fillon n'avait pas attendu l'affaire des emplois fictifs présumés de son épouse et ses enfants pour taper sur la presse. Il n'est pas non plus, loin de là, le seul responsable politique à le faire. Mais devant le "lynchage" voire "l'assassinat" dont il dit faire l'objet de la part du "tribunal médiatique", le candidat à la présidentielle a redoublé d'ardeur dans ce domaine. Et ses soutiens lui emboîtent le pas.

Sur LCP mercredi 8 février, Virginie Calmels est à son tour invitée à s'exprimer sur cette affaire, révélée par Le Canard Enchaîné. Première adjointe (LR) au maire de Bordeaux et dauphine désignée d'Alain Juppé, l'ancienne candidate aux régionales admet certes que les sommes touchées par l'épouse de François Fillon en tant qu'assistante parlementaire et salariée de la Revue des deux mondes peuvent "choquer"... mais tout autant que les aides à la presse que recevrait selon elle l'hebdomadaire satirique. Elle dit :

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- Virginie Calmels : Une fois encore, je comprends que les montants choquent, a fortiori quand ils sont cumulatifs, on sent bien qu'on cherche l'exceptionnel.



- Journaliste : Mais même en net, c'est bien supérieur à la moyenne des collaborateurs parlementaires.



- Virginie Calmels : Mais là encore, 'Le Canard Enchaîné' est un journal qui reçoit des subsides de l'État et si on les cumulait sur 20 ans, on dirait que ça fait 10 millions d'euros, je pense que ça choquerait aussi les Français.

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Voilà donc mis sur le même plan 1) les rémunérations accordées par un parlementaire à ses proches, dont il est suspecté qu'elles n'aient pas été versées en échange d'un travail réel, et 2) un mécanisme qui vise à "défendre le pluralisme" et "la liberté de la presse", comme le précise le ministère de la Culture et de la Communication. Et pour Virginie Calmels, si l'on est choqué par l'un, on doit nécessairement l'être par l'autre. Ou plutôt : puisque l'on n'est pas choqué par les aides à la presse, alors il ne faudrait pas l'être des émoluments reçus par la famille Fillon.

Sauf qu'au delà de la pertinence de l'argumentation, cette présentation des choses est mensongère.  Le Canard Enchaîné ne touche en effet pas d'aides directes de la part de l'État. Le journal s'en explique d'ailleurs dans son édition du 8 février, dénonçant un "mail anonyme", "aussi faux que malveillant", qui circule à ce sujet [à voir par ici, par exemple] : "Le palmipède n'a jamais reçu la moindre subvention directe de l'État. Ni sous les gouvernements de gauche ni sous ceux de droite. Et ce depuis sa création", peut-on lire. En revanche, le journal précise qu'il bénéficie bien, comme de très nombreux autres titres de presse, d'une aide indirecte versée à La Poste pour la distribution des publications papier :

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'Le Canard', comme 200 autres journaux, permet à La Poste de recevoir une subvention chaque année, au titre de sa 'mission de service public de transport postal de la presse'. [...] [Cette somme est calculée] en fonction du nombre d'abonnés de chaque titre. 'Le Canard' en comptant 74.000 par semaine et ayant un faible poids, La Poste a ainsi reçu pour l'acheminement du palmipède une aide de 413.922 euros. Soit 0.02 euro par exemplaire.

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Mais le journal ne touche aucune aide lui-même. Et de fait, on ne trouve nulle trace du Canard dansle tableau des titres de presse aidés en 2015 disponible sur le site du ministère de la Culture. Contacté par Le Lab, un journaliste de l'hebdomadaire répond à ces attaques : 

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C'est un fake grossier, une intox pour discréditer le journal

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Après publication de cet article, Virginie Calmels a précisé sur Twitter qu'elle parlait bien de "subventions indirectes" :

Depuis trois semaines et la publication de ses premières informations, l'hebdomadaire satirique multiplie les révélations sur la famille Fillon. Il n'est pas le seul : Mediapart, Le Monde, France 2 (Envoyé Spécial) et Le Parisien ont aussi sortis leurs propres éléments.

D'autres élus fillonistes ont choisi, eux aussi, d'attaquer la presse dans cette affaire. Mardi 7 février au soir, le patron des sénateurs LR et président de la région Pays-de-la-Loire Bruno Retailleau félicitait ainsi la journaliste de BFMTV Ruth Elkrief pour sa "prise de distance"... tout en demandant au reste de la presse "d'arrêter" avec ces révélations :

[Edit 11h05 : ajout précisions article et journaliste du Canard.]



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