Pour le Front national, présenter des candidats "partout" ou "dans chaque circonscription" a toujours été un motif de fierté. Un argument électoral même, la preuve que le parti n'était plus aussi repoussant qu'avant et parvenait à recruter de nouvelles ouailles. Mais cette quête de respectabilité et cette ambition d'occuper le terrain ont aussi conduit le Front à investir beaucoup de novices en politique, de simples sympathisants pas forcément formés aux campagnes électorales et à la gestion des pouvoirs publics locaux. Et on ne parle ici même pas des candidats "à problèmes" ayant tenu des propos racistes, antisémites, homophobes ou sexistes, dont certains ont été investis par le FN en toute connaissance de cause.
À tout cela, il faut par ailleurs ajouter les séquelles des élections présidentielle et législatives de 2017 : deux gros échecs qui jouent forcément sur le moral des troupes du parti d'extrême droite, en particulier des militants - qui se sont, en outre, récemment divisés entre frontistes canal historique et "Patriotes" derrière Florian Philippot. Dans ce contexte un tantinet compliqué, le FN doit-il présenter des listes partout aux prochaines élections municipales, ou se concentrer sur les villes gagnables ? Le scrutin n'aura pas lieu avant deux ans, mais la question agite déjà les principaux cadres frontistes, comme le rapporte Le Monde lundi 15 janvier. Et Steeve Briois est totalement favorable à la seconde option, qui consistuerait donc un revirement stratégique majeur pour le mouvement co-fondé par Jean-Marie Le Pen.
Dans les colonnes du quotidien le soir, le secrétaire général du FN fait ainsi part de son point de vue, indiquant la solution qu'il privilégierait s'il avait "les pleins pouvoirs" à Nanterre (indice chez vous : la personne actuellement dans cette position se nomme Marine Le Pen). Celui qui est aussi maire d'Hénin-Beaumont déclare :
"Si j’avais les pleins pouvoirs au FN, je me concentrerais sur les villes où on est certains de gagner, plutôt que de monter des listes partout.
"
"Je me suis rendu compte que beaucoup de candidats n’étaient pas formés, ne savaient pas mener campagne, et ne savaient pas quoi faire une fois élus au conseil municipal", ajoute Steeve Briois pour appuyer son propos. Nos confrères précisent qu'il commence même "à cocher, sur la carte des Hauts-de-France, les dominos qui pourraient tomber, selon lui, dans l’escarcelle frontiste".
Le député frontiste Sébastien Chenu semble sur la même longueur d'onde, ajoutant un autre argument : les "ennuis" causés par le passé par cette volonté de constituer des listes partout, à tout prix. Ce proche de Marine Le Pen le dit au Monde avec une formule, disons imagée :
"Finies les listes avec un centenaire, un clochard et un mort. Il faut être crédible.
"
Sympa pour tous ceux qui ont défendu les couleurs frontistes ces dernières années...