Marine Le Pen : "Si j'étais habitante d'un pays en guerre, je me battrais"

Publié à 09h16, le 15 septembre 2015 , Modifié à 12h18, le 15 septembre 2015

Marine Le Pen : "Si j'étais habitante d'un pays en guerre, je me battrais"
© SYLVAIN THOMAS / AFP

SI J'ÉTAIS NÉ EN 17 À LEIDENSTADT - Ah, ces hommes et ces femmes qui fuient leur pays en guerre... C'est pas Marine Le Pen qui laisserait tomber la patrie comme ça. Qu'on se le dise : confrontée à une telle situation, la présidente du Front national, ELLE, resterait pour se battre et défendre la Nation. C'est en tous cas ce qu'elle a affirmé avec applomb sur France Inter, mardi 15 septembre. 

Après son interview un brin tendue face à Patrick Cohen, la présidente du parti d'extrême droite a répondu aux questions des auditeurs de la radio publique. Parmi eux, un certain Christian, de Saône-et-Loire. Au bout du fil, celui-ci l'interroge : "Si vous étiez vous-même habitante d'un pays en guerre, est-ce que vous ne seriez pas contente d'être accueillie par un pays en paix ?" La réponse de Marine Le Pen fuse, certitude inébranlable assénée sans ciller :

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Non monsieur, si j'étais habitante d'un pays en guerre, je pense que comme beaucoup de Syriens d'ailleurs le font contre l'État Islamique, je me battraisJe me battrais contre ceux qui sont en train de détruire mon pays, je me battrais contre ceux qui sont en train de semer le chaos, le meurtre de masse et les tortures, je ne partirais pas dans un autre pays.

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En ce qui la concerne, la fameuse question "aurais-je été meilleur ou pire que ces gens" que se posait notre Jean-Jacques Goldman national a donc trouvé sa réponse. Et elle ne laisse aucune place au doute, contrairement à "JJG" qui ajoutait : "On saura jamais ce qu'on a vraiment dans nos ventres, cachés derrière nos apparences".

Avant d'assurer la France de sa détermination en cas d'éventuel conflit armé, Marine Le Pen avait déjà évoqué la question des réfugiés de guerre qui viennent chercher l'asile en Europe. Quelques minutes plus tôt sur France Inter, elle avait notamment affirmé que les Syriens qui quittent leur pays aujourd'hui "fuient l'État islamique" et non pas le régime de Bachar El-Assad. Est-ce à dire qu'ils ont "de bonnes raisons d'émigrer, de tenter de sauver leur peau et celles de leurs familles hors de leurs frontières", l'avait alors relancée alors le journaliste Patrick Cohen. Et telle la Nadine Morano des grands jours (remember), la présidente du FN avait lancé :

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Chacun a de bonnes raisons de fuir la guerre mais il y en a aussi qui combattent. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il y avait sûrement énormément de Français, croyez-moi, qui avaient de bonnes raisons de fuir les Allemands et pourtant ils sont allés se battre contre les Allemands.

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Toutes les "bonnes raisons" du monde ne suffisent donc pas vraiment, selon elle, à justifier leur exode. D'autant plus qu'elle considère que ces migrants syriens ne sont pas persécutés dans leur pays. Et que ces "jeunes hommes", qui sont pour une "ultra-majorité" des "migrants économiques" (voir en fin d'article), sont par ailleurs "peut-être en âge de combattre".

Rappelons, tout comme cela était vrai pour Nadine Morano, que cette référence aux Français restant en France durant l'invasion allemande est pour le moins *hasardeuse*. Près de huit millions de Français ont justement fui le Nord pour rejoindre le Sud en 1940 et échapper ainsi à l'avancée de l'Allemagne nazie. Il s'agit de l'exode de 1940, un mouvement de masse affectant un quart de la population française. Si les frontières n'ont pas toujours été traversées, il s'agissait bien de fuir la zone occupée pour chercher la sécurité dans la zone libre.

Qu'importe pour Marine Le Pen, qui déroule la suite de son argumentaire bien rôdé sur le sujet : "Si l'on accueille l'enssemble des peuples qui sont en guerre - c'est ce que propose Nicolas Sarkozy avec sa proposition de statut de réfugié de guerre - eh bien, en l'état mais ça peut bouger, c'est 260 millions à peu près de personnes que nous devrions pouvoir accueillir. Ça n'a pas de sens !"





[BONUS TRACK] Auto fact-checking

La patronne du parti d'extrême droite le martèle : tous ces candidats à l'entrée en Europe ne sont pas des "réfugiés", mais des "immigrés clandestins" et surtout des "migrants économiques". Seulement, elle révise ses chiffres. Le 8 septembre, se basant sur "les images qu'[elle voit] à la télévision", elle affirmait à tort que "99%" de ces migrants étaient des hommes ; à son sens, le fait qu'il ne s'agisse pas de familles prouve qu'une "toute petite minorité d’entre eux sont réellement des réfugiés politiques", la majorité venant donc sur le vieux continent "pour des raisons économiques".

Selon les chiffres de l'Agence des Nations unies pour les réfugiés (UNHCR), il y a en réalité, parmi ces quelque 350.000 personnes, 72% d'hommes, 13% de femmes et 15% d'enfants. Sur France Inter, la présidente du FN révise d'elle-même ses propres chiffres, donnant cette fois-ci un ordre de grandeur correct, en citant les chiffres des "institutions internationales" :

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Je crois que ce sont des migrants économiques. Bon, j'ai dit 98%, on m'a fait un débat là-dessus. Mais lorsque, comme le disent les institutions internationales - hein, je me mets derrière le paravent des institutions internationales -, il y a 75% d'hommes et 25% de femmes et d'enfants, excusez-moi mais évidemment ce sont des jeunes hommes en âge de travailler et accessoirement d'ailleurs peut-être en âge de combattre, qui quittent leur pays parce qu'ils pensent qu'ils auront une meilleure vie ailleurs, et notamment le 'ailleurs' c'est dans l'Union européenne et c'est en France. Sinon, cette proportion serait inversée.

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Si elle corrige son erreur, Marine Le Pen n'en maintient donc pas moins son analyse. 

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