SPIN DOCTOR - Gilles Boyer est le plus proche conseiller d'Alain Juppé. Son directeur de campagne. Son "bras gauche", comme il se surnomme lui-même sur Twitter (où il est très actif et incisif). Homme de l'ombre, il parle très peu publiquement dans les médias. Son interview à France Inter, mardi 9 février, a donc un petit quelque chose d'exceptionnel.
Lors de cet entretien, Gilles Boyer est notamment interrogé sur divers éléments marquants de la communication de son champion, candidat à la primaire de la droite et du centre. Entre théorisation du silence mesuré dans un paysage médiatico-politique saturé et justification des jeux à boire avec des jeunes dans des bars.
# "Parler quand on a quelque chose à dire"
C'est un grand classique de la "compol" : raréfier la parole pour la rendre plus audible, plus précieuse. Hormis quelques séquences médiatiques particulièrement denses (notamment à l'occasion de la publication de ses divers livres programmatiques), Alain Juppé est plutôt dans ce registre. Gilles Boyer le justifie :
"Vous savez, il y a 400 interviews politiques par mois en France. 400 interviews politiques. Quelqu'un m'a dit ça, ce chiffre m'a marqué, parce que comment voulez-vous exister, comment voulez-vous surnager, comment voulez-vous vous distinguer, si ce n'est par la rareté de la parole et une parole forte ?
"
D'autant que contrairement à d'autres politiques moins connus, le maire de Bordeaux n'a pas besoin de se montrer à tout bout de champ, selon son conseiller : "Alain Juppé a une notoriété très forte, on le connaît - je crois que 99% des Français le connaissent, par conséquent sa notoriété n'est plus à faire." Il ajoute :
"Ce qui est intéressant, c'est de parler quand on a quelque chose à dire et quand quelqu'un écoute.
"
# Danse avec les seniors
La photo est rapidement devenue un mème, partagée et détournée à l'envi sur les malicieux internets. Alain Juppé embarqué dans une danse endiablée, lors d'une visite dans une maison de retraite pour une galette des rois début janvier :
Allez c'est bon, 2016 s'arrête ici pour moi. pic.twitter.com/PS2IbOccrp
— Freezze (@Freezze) 9 Janvier 2016
Pas forcément un véritable choix de com' cette fois, plutôt un candidat qui accède aux demandes de son public, selon Gilles Boyer :
"Quand Alain Juppé passe des heures dans les clubs seniors de sa ville et que les personnes qui sont là lui demandent d'esquisser un pas de danse, il le fait de bonne grâce et peut-être qu'elles, elles sont contentes. Peut-être que vous, ça vous désarçonne, mais peut-être qu'elles, elles sont contentes, d'avoir leur maire qui est là dans des moments particuliers de l'année.
En tous cas, elles lui ont demandé. Je sais pas si c'est ce qu'elles attendent ou si ça nourrit leurs rêves les plus fous. Il n'empêche que c'est ce qui s'est passé.
"
Alors si c'est pour faire plaisir...
# Bois, bois, bois
Autre élément remarqué de la campagne d'Alain Juppé ces derniers jours : une partie de beer-pong, un jeu à boire, avec des jeunes militants réunis autour de lui dans un pub irlandais parisien, fin janvier. Le sous-entendu *J'ai 70 ans mais je reste jeune dans ma tête* est évident et le coup de com' réussi, abondamment commenté et relayé, réalisé qu'il était devant toute une floppée de journalistes, comme de par hasard.
Mais il s'agit d'un coup plus ou moins unique, là encore pas si calculé que ça, à en croire Gilles Boyer :
"On avait réuni 500 jeunes, il faut imaginer ce que ça peut représenter, dans un bar du 18e arrondissement [de Paris] qui est l'arrondissement historique de l'action politique d'Alain Juppé [il en a été conseiller municipal et député, ndlr] et c'est un bar où traditionnellement des beer-pongs ont lieu. Donc on lui a proposé de participer, aux côtés de Pierre-Yves Bournazel [conseiller LR de Paris et récent soutien du maire de Bordeaux, ndlr] qui était là. Voilà, ça relève de l'anecdote, on fera pas ça tous les jours.
"
Si vous rêvez de voir Alain Juppé s'adonner à ces petits réjouissements, il faut donc être au bon endroit au bon moment. Et SURTOUT lui demander gentiment.