APARTHEID - C'est la phrase qui aura marqué ses vœux à la presse ce 20 janvier : selon Manuel Valls, il existe en France un "apartheid territorial, social et ethnique". Aussitôt, des dépêches AFP et Reuters reprennent la formule, dépêches elles-mêmes reprises par beaucoup des médias . L'expression est loin d'être nouvelle chez Manuel Valls qui s'est inquiété du même phénomène à plusieurs reprises, notamment depuis 2005.
Comme l'a constaté le journaliste de l'AFP Guillaume Daudin , le député-maire d'Évry Manuel Valls s'est exprimé sur cette question en 2005 dans son ouvrage La laïcité en face. Il est alors interrogé sur l'utilité de la discrimination positive :
"La discrimination positive ou la ségrégation positive ne sont qu'un élément d'un tout : la refonte d'un pacte national d'intégration. La ségrégation territoriale, sociale, ethnique, voire religieuse s'aggrave. J'ai même parfois parlé d'apartheid car c'est vraiment le sentiment que l'on peut avoir dans certains endroits.
"
Une expression employée de nouveau en juin 2009 dans une émission de D8, Politiquement parlant. Son interlocutrice est alors la journaliste ... Valérie Trierweiler. C'est lors de cette émission qu'un reportage le montre déambulant sur un marché de sa ville d'Evry et lançant à son chargé de com' : "tu me mets quelques blancs, quelques whites, quelques blancos".
De retour en plateau, il développe :
"Évidemment avec les stands qu’il y avait là, [j’avais] le sentiment que la ville, tout à coup, ça n’est que cela, (...) ça n’est que cette brocante, alors que j’ai l’idée au fond d’une diversité, d’un mélange, qui ne peut pas être uniquement le ghetto. On peut le dire ça ? (...)
On a besoin d’un mélange. Ce qui a tué une partie de la République, c’est évidemment la ghettoïsation, la ségrégation territoriale, sociale, ethnique, qui sont une réalité. Un véritable apartheid s’est construit, que les gens bien pensants voient de temps en temps leur éclater à la figure, comme ça a été le cas en 2005, à l’occasion des émeutes de banlieues.
"
Comme l'a repéré Le Scan , lors d'un débat organisé en mars 2009 par l'université Paris Dauphine, il revient également sur les émeutes de 2005 en ces termes :
"Les politiques en général, et notamment les responsables du Parti socialiste étaient muets. Ceux qui parlaient à la télévision, c'était les maires, dont j'étais, parce qu'ils étaient confrontés à cette réalité. Nous pouvions parler des problèmes que nous connaissons, notamment de l'apartheid territorial, social, ethnique et religieux qui existe dans nos quartiers. Ce qui s'est passé en 2005 peut se passer demain en puissance dix parce qu'on n'a pas réglé les problèmes de fond.
"
Ce 20 janvier 2015, en réaction aux attentats terroristes subis par la France en début d'année, c'est donc logiquement que le désormais Premier ministre a lancé :
"Ces derniers jours ont souligné beaucoup des maux qui rongent notre pays ou des défis que nous avons à relever. A cela il faut ajouter toutes les fractures, les tensions qui couvent depuis trop longtemps et dont on parle peu (...) la relégation péri-urbaine, les ghettos, ce que j'évoquais en 2005 déjà, un apartheid territorial, social, ethnique, qui s'est imposé à notre pays.
"