Ancien ministre de l’Intérieur, ancien magistrat, Jean-Louis Debré ne badine pas avec le respect des principes républicains. Le président du Conseil constitutionnel n’a-t-il pas déjà fermement critiqué Nicolas Sarkozy pour avoir mis en cause la probité de certains juges ? Ou mis en garde François Hollande contre la tentation de l’exécutif de prendre des libertés avec la Constitution ?
Ce mercredi 4 février, au tour de Roland Dumas de faire les frais du courroux de Jean-Louis Debré. Le chiraquien n’a pas du tout apprécié que son prédécesseur à la tête du Conseil constitutionnel admette, vingt ans après, l’irrégularité des comptes de Jacques Chirac et Edouard Balladur pour la campagne présidentielle de 1995. Un grave accroc au secret des délibérés, a-t-il dénoncé sur le plateau de "Questions d’info-LCP-France Info-Le Monde-AFP" :
Vous prêtez un serment de ne dire en aucun cas, même par allusion, la teneur du délibéré auquel vous avez participé. Or, M. Dumas était président, il a présidé cette séance et, par conséquent, il ne devait rien dire.
À la question de savoir si l’ancien ministre de François Mitterrand aurait dû se taire à jamais, Jean-Louis Debré a lâché, définitif : "Je pense".
Une réponse d’autant plus sévère, sans doute, que Roland Dumas s’est targué d’avoir "sauvé la République" en avalisant des comptes de campagne qu’il savait, à l'époque, irréguliers. "Annuler l’élection de Chirac aurait eu des conséquences terribles. J’ai pensé à mon pays", s’est-il justifié dans une interview au Figaro le 28 janvier.
Un argument pour le moins troublant. Comme le note le Canard Enchaîné dans son édition de mercredi, le Conseil constitutionnel n’a pas le pouvoir d’annuler une élection présidentielle au motif de comptes de campagne irréguliers. Une seule menace pèse sur le candidat : le non-remboursement de ses frais de campagne.