Jean-Vincent Placé et François De Rugy visés par un mail d'exaspération interne à EELV

Publié à 17h31, le 09 février 2015 , Modifié à 19h02, le 09 février 2015

Jean-Vincent Placé et François De Rugy visés par un mail d'exaspération interne à EELV
Jean-Vincent Placé et François De Rugy © Montage Le Lab via AFP

ON EN A GROS - Ça ne vous aura pas échappé, ce n'est pas exactement l'amour fou entre Jean-Vincent Placé et toute une partie d'Europe Écologie - Les Verts. Le chef de file des sénateurs écolos s'est récemment fendu de plusieurs attaques très virulentes à l'égard de ce qu'il nomme la frange "gauchiste", "immature" et "irresponsable" de son parti. Tout en militant activement, aux côtés notamment de François De Rugy, pour un retour des Verts au gouvernement "dès cette année".

Et ça a fini par sérieusement énerver certains écolos. Depuis dimanche 8 février, un mail circule en interne à EELV ; le texte, signé par 27 secrétaires ou co-secrétaires régionaux du parti, ainsi que par une membre du bureau exécutif, appelle au soutien des candidats aux prochaines élections départementales et régionales et à la défense de l'action d'EELV, plutôt qu'à la multiplication des "petites phrases" et des "déclarations intempestives" dans les médias.

Jean-Vincent Placé et François De Rugy ne sont pas nommés mais expressément visés. Tout comme le porte-parole du parti Julien Bayou, qui a récemment proposé l'organisation d'une primaire ouverte aux "socialistes déçus du hollandisme" en vue de 2017, ou encore Cécile Duflot, qui envoie quelques signes très visibles de rapprochement avec Jean-Luc Mélenchon.

Le Lab s'est procuré ce mail, envoyé à un grand nombre de destinataires sur diverses listes de discussion (les listes du Conseil Fédéral, des listes régionales, une liste de débat général commune aux militants, la liste du Bureau exécutif) ainsi qu'aux parlementaires.

On y trouve d'abord ce rappel :

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La motivation principale de tou-tes ceux-elles qui ont accepté de se porter candidat-e est de défendre nos valeurs, nos idées, notre projet. [...] Ils-elles ont droit à toute notre reconnaissance, à tout notre soutien. Chacune et chacun mérite, pour les deux mois qui viennent, quelle que soit la configuration politique, que le mouvement soit uni et rassemblé derrière ses candidat-es.

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Les deux paragraphes suivants se font plus fermes :

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Pour cela, il est nécessaire que se tarisse, le temps de ces élections, la source des 'petites phrases' ; que se ferme le robinet des déclarations intempestives et 'individuelles' ; bref, qu’on débranche la machine à perdre et ses effets mortifères.



Nous demandons, en cette période d’élection, que celles et ceux qui représentent l’écologie auprès du grand public et des médias fassent preuve d’une responsabilité à la hauteur de leur mandat. Nous leurs demandons d'exposer et de défendre les positions et les décisions du mouvement plutôt que leur ressenti personnel.

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Des termes somme toute relativement cordiaux, mais qui traduisent une véritable exaspération des cadres locaux du parti. Contacté par Le Lab, l'un des signataires, Jean-Sébastien Herpin, fait les sous-titres :

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C'est un peu comme dans la série Kaamelott. On tape à la porte du château, on demande ce que font les grands seigneurs. Et on leur dit : 'On en a gros !'

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Pour vous faire une idée, ça donnerait quelque chose comme ça :



Alors bien sûr, dans la série, ceux qui "en ont gros" ont rarement gain de cause et récoltent surtout de jolies bordées d'injures de la part du roi Arthur. Les signataires de ce texte espèrent évidemment une autre issue.

Jean-Sébastien Herpin, co-secrétaire régional EELV Centre, fait valoir qu'après réception de ce mail, des militants ont répondu par des "ouf", "merci", "enfin". Il poursuit :

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C'est destiné à ceux qui causent constamment dans le poste. Tous les ténors, et même quelques sopranos, se mettent à parler de tout et n'importe quoi : de 2017, d'alliance, etc. Les militants ressentent une certaine pollution, pour faire un jeu de mots. Ils les trouvent hors-sujet.

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Il rappelle que "les priorités, pour les militants, ce sont les départementales, les régionales et la COP21", grande conférence sur le climat qui se tiendra à Paris fin 2015.

Auprès du Lab, François De Rugy estime que ce texte est tout autant dirigé contre lui que contre d'autres figures d'EELV. "Moi, je préfèrerais qu'il n'y ait pas de déclarations sur les primaires de l'autre gauche ou sur les chantiers de l'espoir de Jean-Luc Mélenchon", explique-t-il, visant Julien Bayou et Cécile Duflot. Le co-président du groupe EELV à l'Assemblée considère par ailleurs qu'il s'agit d'un "grand classique" :

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C'est un vieux ressort : la base qui serait pure contre le sommet qui serait à deux doigts de la trahison et pétri de mauvaises intentions et de petits calculs. Si ce n'était que de la faute des gens qui ont accès aux médias, comme on dit, ça se saurait. Ce sont des débats politiques très structurants, très lourds, qui traversent notre parti depuis la sortie du gouvernement.

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Et s'il juge que son parti ne peut pas "fermer les yeux et faire comme si les divergences n'existaient pas", il désapprouve donc la méthode : "Le mouvement écologiste ne pourra pas s'en sortir par une fuite en avant sur le thème : c'est la faute des parlementaires ou du national." Le député rappelle enfin, avec force sous-entendus, que les cadres locaux du parti "ont à gérer une situation délicate vis-à-vis des élections départementales" :

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Il y a un déficit manifeste de candidatures, à un mois et demi des élections et à une semaine de la date de dépôt des candidatures.

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[EDIT 18h50] Après la publication de cet article, Jean-Vincent Placé explique au Lab qu'il trouve que tout cela n'est "pas très passionnant", jugeant que les auteurs du texte "ne sont pas tropénervés".

Du rab sur le Lab

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