ÉLECTION RÉFÉRENDAIRE - Les demandes de référendum, selon différentes modalités, fusent de partout en France depuis celui sur le Brexit qui a acté la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne. Si le Front national promettait depuis longtemps l'organisation d'une telle consultation sur la sortie de l'Euro en cas de victoire en 2017, d'autres responsables se sont depuis déclarés favorables à la chose. Parmi les candidats à la primaire de la droite, par exemple, chacun a sa petite proposition sur le sujet. Mais tout le monde s'est pris un stop très officiel de la part de Manuel Valls, mardi 28 juin.
Lors du débat sur les conséquences du Brexit, organisé à l'Assemblée nationale, le Premier ministre a en effet évoqué les nombreuses "propositions [qui] sont aujourd'hui sur la table". "Certains suggèrent une nouvelle convention, ou une commission, ou un travail avec des sages. Il faudra sans doute choisir l'une de ces voies", a estimé le chef du gouvernement. Avant d'aborder la question du référendum, pour mieux la balayer :
"D'autres n'ont que le mot de référendum à la bouche. Bien sûr, qu'il faut donner la parole au peuple, mais soyons clairs, ne trompons pas les Français. Un référendum ne peut pas être le moyen de se débarrasser d'un problème, encore moins un moyen détourné de régler des problèmes de politiques internes. On a vu ce que cela donne de jouer aux apprentis sorciers.
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Sous-entendu : les conséquences immédiates du Brexit, et notamment les tergiversations et l'impréparation des leaders britanniques du camp "Leave", devraient calmer les ardeurs de tout le monde. S'en prenant ensuite directement au Front national, Manuel Valls a ajouté :
"Je veux être encore plus clair : par le référendum, le Front national ne poursuit au fond qu'un seul objectif, qui est désormais dévoilé : faire sortir la France de l'Union européenne et donc de l'histoire. Quelle étrange ambition pour notre pays et quelle vision dévoyée du patriotisme.
Notre rôle de responsable politique n'est pas de suivre mais d'éclairer, de montrer le chemin, d'être à la hauteur. Oui, d'être à la hauteur. La question qui se pose à la France n'est pas de sortir de l'Europe, n'est pas de sortir de l'Union européenne, mais de refonder le projet européen.
Et l'élection présidentielle sera aussi l'occasion de trancher ces débats.
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L'exécutif n'est donc pas du tout chaud quant à la possibilité d'un référendum sur l'avenir lié de la France et de l'Europe. D'autant plus, selon Manuel valls, que c'est la prochaine présidentielle qui fera office de consultation des citoyens sur le sujet, amenés qu'ils seront à départager les différents candidats et leurs propositions sur l'Europe.. Une idée déjà avancée par le secrétaire d'État Thierry Mandon.
Depuis l'annonce du Brexit, François Hollande défend la nécessité d'une nouvelle "initiative" franco-allemande sur ce front, vantant une Union européenne porteuse d'un "projet" politique. Le chef de l'État a notamment dit vouloir de la simplification et moins de "procédures", "pour que l'Europe se concentre sur l'essentiel" et n'empiète plus sur les compétences régaliennes des "États-nations".
# La droite divisée
Soit peu ou prou la même position que Nicolas Sarkozy. Sauf que le patron de LR et ancien chef de l'État n'est pas du tout opposé à l'idée d'un référendum portant sur "un nouveau traité" européen (contrairement à ce qu'il disait il y a un mois, d'ailleurs...).
Les autres candidats à la primaire sont divisés sur le sujet. François Fillon propose ainsi une "nouvelle Europe forgée dans un nouveau traité (qui) serait soumise, en France, à référendum." Bruno Le Maire, lui aussi, porte la proposition d’un référendum sur l’Europe et souhaite consulter uniquement les Français sur "les modifications des traités nécessaires à de nouvelles orientations européennes".
Alain Juppé, en revanche, s'oppose à un référendum limité à la France, ce qui reviendrait selon lui à "offrir une victoire sur un plateau à Madame Le Pen". Le maire de Bordeaux est favorable à une consultation "en même temps et partout dans l'Europe".
Jean-François Copé, lui, défend l'idée selon laquelle le référendum n'est pas "le vote d'une grande démocratie". "Ce n'est pas le pouvoir de décider. C'est, au mieux, le pouvoir de s'opposer", argumente le député-maire de Meaux, selon qui le peuple consulté de la sorte ne répond jamais vraiment à la question. "La vraie légitimité du vote, c'est de choisir ses dirigeants sur la base d'un programme", fait-il encore valoir, sur la même ligne que Manuel Valls donc.
Quant à Nathalie Kosciusko-Morizet, elle a qualifié Bruno Le Maire et Nicolas Sarkozy de "démagogues", lors d'une réunion à Boulogne-Billancourt ce 24 juin. La députée de l'Essonne a martelé qu'il ne fallait "évidemment pas un référendum tout de suite en France".
# Et Macron ?
Emmanuel Macron, enfin, est plutôt favorable à un référendum commun à l'UE et qui serait l'aboutissement d'un "processus" de réflexion sur la refondation de l'Europe. Le ministre de l'Économie, qui n'a toujours pas clarifié ses ambitions personnelles pour 2017, souhaite en tout cas que le projet européen soit au cœur de la campagne de la prochaine présidentielle.
Partant du constat que les pays membres ont "trahi le projet européen initial", Macron plaide pour qu'il "y ait dans les 27 États-membres un débat organisé, des conventions démocratiques pour réfléchir ensemble, de manière complètement ouverte, sur le projet que l'on veut pour l'Europe". Le leader d’En marche a alors proposé d’"articuler un nouveau projet européen qui ensuite sera soumis au vote des peuples".