Comment Guillaume Peltier encense Najat Vallaud-Belkacem pour mieux la dézinguer

Publié à 10h30, le 13 mai 2015 , Modifié à 12h22, le 13 mai 2015

Comment Guillaume Peltier encense Najat Vallaud-Belkacem pour mieux la dézinguer
© JEAN CHRISTOPHE MAGNENET / AFP

UN PAS EN ARRIÈRE, DEUX PAS EN AVANT - La contestation autour de la réforme du collège et de celle des programmes se cristallise de plus en plus autour de la personnalité de la ministre de l'Éducation nationale. Notamment du fait de Nicolas Sarkozy, qui a jugé que "dans le combat effréné pour la médiocrité, Christiane Taubira est en passe d'être dépassée par Najat Vallaud-Belkacem." Mais aussi de Jean-Christophe Cambadélis, qui a en retour jugé que le président de l'UMP tenait là des propos "légèrement xénophobes". Pour éviter cet écueil, Guillaume Peltier a semble-t-il trouvé la parade ultime : chanter les louanges de la ministre pour ensuite l'attaquer plus férocement encore.

Invité de RFI mercredi 13 mai, le secrétaire national de l'UMP en charge des fédérations professionnelles commence par estimer que "Nicolas Sarkozy a mille fois raison. Quelle est cette idée de la gauche française, qui est tellement faible dans l'argumentaire, qu'on ne peut plus attaquer les politiques insupportables, qui visent le pacte et l'ordre républicain, menées par madame Taubira comme madame Belkacem ?"

Une fois ce préambule posé, cet ancien sarkolâtre légèrement déçu déroule son argumentaire en deux temps.

# Étape 1

Premier temps : reconnaître tous les mérites de celle qui est devenue l'une des figures centrales du gouvernement de Manuel Valls. Peltier se fait admiratif :

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Ce qui m'étonne le plus, [c'est qu']elle incarne probablement, si on sort de la politique quelques instants, l'un des plus beaux symboles de la méritocratie et de la promotion républicaines. Je parle d'elle parce que [...] son histoire personnelle, sa capacité à porter des idées, à s'engager politiquement, ont fait d'elle aujourd'hui l'un des grands ministres de notre République.

 

"

Bigre, voilà un éloge auquel on pouvait difficilement s'attendre. L'un de ceux qui incarnent l'aile droitière de l'UMP rendant hommage à Najat Vallaud-Belkacem ? Comme vous vous en doutez, cela ne va pas durer.

# Étape 2

Car immédiatement, Guillaume Peltier embraye avec des mots extrêmement durs contre les réformes en cours. C'est le second temps :

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Et elle est en train de saper progressivement ce qui fait le fondement de notre État, c'est l'école du mérite et de la République. Elle est en train d'abîmer, voire même d'assassiner, l'âme de l'école républicaine, en y inoculant le poison de l'égalitarisme, de la repentance, de l'ignorance. L'école de la République, c'est une idée extraordinaire, grâce à laquelle des millions de Français depuis des décennies ont pu, malgré leur origine sociale modeste, progresser, grandir et acquérir des responsabilités immenses dans notre pays.



[...] On abaisse, à travers l'autoflagellation et la repentance, la belle histoire de France.

"

Voilà qui est moins surprenant. Et ce n'est pas fini. Souvenez-vous : il y a quelques secondes, Guillaume Peltier estimait que la ministre était "l'un des plus beaux symboles de la méritocratie et de la promotion républicaines". Sans craindre la contradiction, il affirme maintenant qu'elle est "l'anti-Marianne" :

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Moi je souhaite qu'on réhabilite l'école de la République et aujourd'hui, oui, Najat Vallaud-Belkacem, c'est l'anti-Marianne. Elle est en train de saper progressivement les fondements de l'école républicaine.

 

"

Et voilà comment Guillaume Peltier peut se prémunir de tout procès en malfaisance : encenser avant de dézinguer de plus belle. Il fallait simplement y penser... À vitesse réelle, ça donne ça :



Mais tous, à l'UMP, ne sont pas aussi virulents que l'ancien membre du Front national de la jeunesse. Quelques minutes plus tard, sur Radio Classique et LCI, le juppéiste Benoist Apparu explique certes qu'il a "quelques interrogations" quant à cette "réformette". Mais il ne "hurle pas", explique-t-il en minimisant l'impact de la réforme :

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- Benoist Apparu : Je sais pas s'il faut mettre de la politique partout, tout le temps, sur tous les sujets. C'est une réformette, pas une réforme fondamentale du collège. On est en train de nous dire qu'on bouleverse le collège dans tous les sens, c'est faux. Quand on regarde le contenu, il n'y a pas grand chose. Il y a une petite dose d'autonomie pour les établissements, mais quand je dis une petite dose...



- Guillaume Durand : Il y a un énorme soupçon, c'est ça le problème...



- Benoist Apparu : Elle est porteuse de risque, c'est un autre débat. Première chose, c'est pas une réforme, c'est une petite évolution du collège. C'est pas une restructuration profonde du collège français.



- Guillaume Durand : Dans ce cas-là, ne hurlez pas... 



- Benoist Apparu : Laissez moi finir, vous allez voir pourquoi effectivement on a quelques interrogations et pour ce qui me concerne je ne hurle pas. Premier élément : réformette. Deuxième élément : il y a des éléments porteurs de risque. Qu'est-ce qui se passe ? Dans toute réforme de l'Éducation nationale, pour montrer que vous faites quelque chose, vous avez besoin de récupérer des postes et de dire 'regardez, j'ai une réforme importante, j'y mets 4.000 postes'. Et pour trouver ces 4.000 postes, comme vous avez pas l'accord de Bercy pour créer des postes supplémentaires, vous gratouillez par-ci par-là des postes pour les récupérer. Et donc on supprime un peu de grec, un peu d'allemand, un peu de latin, on fait une tambouille de tout ça, ça fait 4.000 postes, et hop ! On peut dire que pour l'autonomie des établissements et pour l'accompagnement individuel des élèves, on met 4.000 postes. C'est ça la réalité technique de cette réforme. 

"

Il fallait, là encore, y penser.

Du rab sur le Lab

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