Dans le documentaire de France 3 Marine Le Pen, la dernière marche ?, diffusé au mois de janvier, Florian Philippot minimisait les révélations sur des propos racistes de certains candidats du Front national, s’amusant de voir les médias faire le tri à leur place. Ce mardi 6 juin, Nicolas Bay se montre un peu moins serein pour défendre les 97 candidats FN (sur 573) épinglés par une enquête de BuzzFeed News pour des propos ou l’approbation de propos racistes, antisémites ou homophobes sur leur compte Facebook et/ou Twitter.
Sa défense s’organise en six étapes sur franceinfo :
#Étape 1 : Circulez, y’a rien à voir
Le secrétaire général du parti frontiste commence par réfuter ces accusations, assurant que les candidats investis par son parti "disent la vérité" :
"Non, c’est totalement mensonger. Vous savez, vous êtes pas mal placés pour savoir que les médias ont scanné méthodiquement tous nos candidats et qu’ils ont rien trouvé. Nos candidats, ce sont pour immense majorité des élus, des cadres solidement implantés et évidemment, ils disent la vérité sur l’immigration, ils disent la vérité sur l’islamisme, ils disent la vérité sur l’insécurité mais ils tiennent pas du tout des propos racistes.
"
#Étape 2 : Les propos sont sortis de leur contexte
Bon, ok, peut-être qu’il y a des propos éventuellement problématiques, mais a-t-on regardé le contexte dans lequel ils ont été tenus ? C’est ce que demande Nicolas Bay :
"On peut pas, comme ça, sortir de leur contexte de tels propos. Faut regarder ce qui a été dit exactement ou ce qui a été relayé.
"
On voit mal en revanche comment des pages Facebook ou des tweets likés pourraient être remis dans leur contexte.
#Étape 3 : Regardez chez les autres
Nicolas Bay recourt ensuite à la traditionnelle méthode de *la meilleure défense, c’est l’attaque* en suggérant à ses intervieweurs d’enquêter sur des candidats investis par LREM et LR :
"Je vous invite à faire ce travail sur nos concurrents parce que, dans mon département de Seine-Maritime, dans la quatrième circonscription de Seine-Maritime, le candidat suppléant qui porte les couleurs d’Emmanuel Macron, il fait ouvertement partie de la mouvance islamiste. Il participe à des réunions au siège de l’UOIF. Il soutient les candidats d’Ennahdha, qui est le parti islamiste tunisien et manifestement, ça l’a pas empêché d’avoir l’investiture d’Emmanuel Macron.
"
Un peu plus tard, Nicolas Bay mentionne également le cas de Jean-Sébastien Vialatte, candidat LR dans la 7e circonscription du Var et condamné en 2014 pour "provocation à la haine raciale" :
"Ça vous choque, monsieur Aphatie, que le candidat, député sortant d’ailleurs, dans le Var, des Républicains, monsieur Vialatte, qui a été condamné par la justice pour avoir dit 'Les casseurs sont des descendants d’esclaves et c’est pour ça que Taubira les défend', il est soutenu par monsieur Baroin, il est officiellement candidat des Républicains. Ça, ça vous dérange pas ? Et quand vous avez un dirigeant des Républicains qui vient sur votre antenne, vous lui posez pas la question ? C’est très révélateur.
"
#Étape 4 : Décrédibiliser l’enquête
Nicolas Bay décrédibilise ensuite l’enquête de BuzzFeed en insinuant que le travail de vérification n’a pas été effectué :
"Excusez-moi, mais BuzzFeed, c’est pas un juge d’instruction. C’est l’appréciation que fait un média de nos candidats, mais moi, j’indique que nos candidats respectent la loi et disent un certain nombre de vérités que les Français veulent entendre et que nous sommes peut-être les seuls à dire.
"
"Je crois qu’on essaie surtout de nous chercher des poux dans la tête", ajoute-t-il.
#Étape 5 : C’est pas si grave
Concernant le cas d’Agnès Marion, candidate dans la 10e circonscription de la métropole de Lyon et qui a liké des tweets homophobes et racistes, Nicolas Bay explique qu’il y a un fond de vérité. Il n’aurait "pas exprimé de cette manière" un tweet qu’elle a liké sur le ramadan, "ce moment de l’année où les dealers ne sont pas disponibles avant 22h", mais estime qu’il dresse tout de même un "constat" :
"- Nicolas Bay : Il s’agit pas de critiquer tous ceux qui font le ramadan ou tous les musulmans. Il s’agit simplement de faire, en fait… c’est peut-être maladroit mais il s’agit de faire le constat qu’évidemment, il y a un lien entre l’insécurité et l’immigration et que l’immigration provenant principalement, et pas exclusivement d’ailleurs, de populations musulmanes, eh bien elle amène aussi l’insécurité sur notre sol. C’est une évidence. Vous avez qu’à aller voir les prisons, vous verrez qu’il y a un lien évident entre insécurité et immigration. [...] Elle veut simplement dire qu’il y a, parmi les dealers, un certain nombre de personnes de confession musulmane, mais ça, c’est une évidence. [...] Je pense que, parmi les délinquants en France, il y en a beaucoup qui sont d’origine immigrée, voilà. Oui, oui, je crois. Et d’ailleurs, vous avez qu’à vous rendre, monsieur Aphatie, dans les tribunaux correctionnels, vous avez qu’à aller voir dans les prisons, vous pourrez difficilement dire le contraire après.
- Jean-Michel Aphatie : Le ramadan, ça concerne pas que les immigrés. Ce sont des amalgames qui ne reposent… qui brouillent tout raisonnement.
- Nicolas Bay : C’est exactement pour ça que je vous dis que je l’aurais pas exprimé de cette manière.
"
#Étape 6 : Rooooh ça va, on peut rire
Précisément sur Bernard Sironneau, candidat FN dans la 1ère circonscription de la Drôme qui a partagé un photomontage mettant sur le même plan Christiane Taubira et la publicité Banania "Y’a bon", Nicolas Bay demande à ce qu’on "vérifi[e] si c’est bien un compte qui lui appartient".
"Si c’est bien lui et si c’est bien son compte, c’est de l’humour de mauvais goût, voilà", balaye-t-il, alors que l’abbé Beauvais avait été condamné pour injure raciale pour avoir fait la même *blague*.
"Je sais qu’on les passe au peigne fin mais [les candidats FN] mènent campagne de façon exemplaire", conclut Nicolas Bay.
Sur France Inter, David Rachline a lui aussi décrédibilisé l’enquête en assurant à tort que les candidats incriminés n’avaient pas "la parole" :
"J’ai regardé cette enquête de près. D’abord, si c’était une véritable enquête de journalistes, peut-être que ceux qui sont mis en cause auraient pu avoir la parole, ça n’est pas le cas. C’est un travail qui a été réalisé pour les candidats du Front mais qui n’a jamais été réalisé pour les autres.
"
Le sénateur-maire de Fréjus a assuré que certains groupes Facebook avaient "changé de nom en cours de route" mais que, s’il y avait "des propos inacceptables avérés, ces gens-là ser[aient] traduits devant des commissions de conflit qui les verr[aient] probablement exclus" du Front national.