Délinquance des mineurs : malaise à l'UMP

Publié à 11h21, le 30 novembre 2011 , Modifié à 16h54, le 30 novembre 2011

Délinquance des mineurs : malaise à l'UMP
Jean-François Copé à Villeurbanne (Rhône), novembre 2011 (Reuters)

Mardi soir, lors de sa convention à Villeurbanne (Rhône), l’UMP a proposé de réformer le code pénal pour mineurs. L’idée est de faire passer de treize à douze ans l’âge de responsabilité des jeunes délinquants. Un sujet hautement sensible, même au sein de la majorité. Pourquoi une telle proposition ? Que prévoit la loi aujourd’hui ? Et que se passe-t-il dans les autres pays ? Le Lab vous propose un tour d’horizon sur une question qui pourrait peser lors de la campagne présidentielle.

  1. L'UMP veut sanctionner les mineurs délinquants dès 12 ans

    Sur France 3

    Lundi sur France 3, Jean-François Copé, le secrétaire général de l'UMP a exprimé sa volonté de créer un "code pénal spécifique pour mineurs".

    EXTRAIT

    "

    Dans le domaine de la sécurité, de la justice, on voit bien qu'il y a eu d'énormes progrès accomplis par rapport à l'époque Jospin (...) mais sur la délinquance des mineurs, qui sont aujourd'hui devenus de plus en plus violents et, hélas, de plus en plus jeunes, l'idée, c'est d'avoir un code pénal qui soit spécifiquement adapté à la situation des mineurs délinquants.

    "

    Il souhaite ainsi que les enfants puissent être sanctionnés dès l'âge de douze ans, en rendant possible la réalisation de "travaux de réparation" avec l'accord des parents.

    L'élaboration de ce code pénal pour mineurs avait déjà été 

    La présentation de ce projet mardi, lors de la convention UMP à Villeurbanne n’a d'ailleurs pas été chaudement accueillie, même par les membres de la majorité.

  2. Des voix discordantes au sein de la majorité

    Sur lemonde.fr

    Nadine Morano a été l’une des premières à renier la position de son parti. L’ancienne secrétaire d’Etat à la famille a déclaré mardi sur LCI que lorsque des enfants de 12 ans commettent des délits, "ce sont les parents qu’il faut éduquer, aider, accompagner."

    EXTRAIT

    "

    On ne va pas descendre à douze, neuf ou huit ans !

    "

    Christian Estrosi a également émis quelques réserves. Le député-maire de Nice a notamment déclaré mardi à l’AFP qu’il ne fallait pas "stigmatiser ceux qui sont encore des enfants".

    Quant à Bernard Accoyer, le président UMP de l’Assemblée nationale a estimé que si la jeunesse devenait de plus en plus précoce, abaisser l’âge du code pénal pour mineurs à douze ans paraissait "quand-même un petit peu jeune".

    Le secrétaire d’Etat chargé du Commerce extérieur, Pierre Lellouche a également fait part de son désaccord mercredi matin sur Europe 1.

    EXTRAIT

    "

    On ne peut pas traiter les enfants comme des adultes.

    "
  3. Copé tente de dédramatiser...

    Sur metiers.justice.gouv.fr

    Jean-François Copé a minimisé mercredi les critiques venues de l'UMP sur la proposition du parti majoritaire de sanctionner les délinquants dès 12 ans, ironisant sur le fait qu'il ne s'agissait pas "d'envoyer des enfants de 12 ans au bagne de Cayenne". 

    Le numéro 1 du parti reste prudent, parlant de "pistes" de travail.

    EXTRAIT

    "

    Il n'est pas question de stigmatiser, mais d'essayer de trouver des solutions face à un phénomène nouveau, la délinquance des mineurs de plus en plus jeunes, de plus en plus violents.

    "
  4. Un code qui faisait déjà polémique en 2008

    Sur leparisien.fr

    Le projet de code pénal pour mineurs était déjà cher à Nicolas Sarkozy en 2007. En 2008, une commission en charge de la réflexion sur la justice des mineurs avait rendu un rapport aux conclusions très controversées.

    Ces experts préconisaient déjà d'abaisser l'âge de la responsabilité pénale de 13 à 12 ans, alors que la moyenne est plutôt de 14 ans en Europe. Sous la pression des syndicats de magistrats, Rachida Dati , alors garde des Sceaux, avait dû remiser le projet au placard.

  5. La France est déjà l'un des pays les plus répressifs en Europe

    Sur justice.gouv.fr

    En France, l'âge de la responsabilité pénale est l'un des plus bas d'Europe.

    Mais attention à ne pas confondre responsabilité pénale et majorité pénale...

    En effet, l’âge de la responsabilité pénale est "celui auquel le mineur peut être considéré comme responsable de ses actes et donc passible de sanctions pénales."

    Tandis que la majorité pénale, elle, "recouvre deux aspects :

    • L’âge à compter duquel le délinquant ne comparait plus devant une juridiction spécialisée pour mineurs.

    • L’âge à compter duquel il ne bénéficie plus d’une présomption d’atténuation de responsabilité."

    Ainsi, l’âge de la responsabilité pénale varie d’un pays à l’autre en Europe. Or, avec une limite fixée à 13 ans, la France se positionne dans la moyenne "basse" de l'Europe, loin derrièrela Belgique et le Luxembourg dont l'âge est fixé à 18 ans, mais devant la Suisse et l'Angleterre où le seuil se situe à 10 ans.

  6. Une mesure infructueuse voire néfaste

    Sur Le Monde

    La proposition de Jean-François Copé, en plus d'être inutile, pourrait même s'avérer désastreuse. 

    • Une proposition inutile. Mercredi matin, Catherine Sultan, juge pour enfants, a critiqué "cette proposition confuse", rappelant qu'il existe déjà "tout un panel de réponses éducatives" au micro de Bruce Toussaint sur Europe 1, 

    EXTRAIT

    "

    Des enfants de 12 ans poursuivis au pénal, c'est très rare. Au niveau national, c’est 3%. (...) Ce qui est un peu surprenant dans cette proposition, c'est qu'aujourd'hui déjà, si un enfant de 12 ans a le discernement suffisant pour avoir commis une infraction, il est possible de demander une mesure de réparation. 

    "
    • Le droit pénal ne suffit-il pas ? En effet, le droit pénal prévoit déjà des mesures pour les mineurs de 10 ans. Comme le rappelait la magistrate, il permet notamment des sanctions éducatives. Pour les mineurs de 13 à 16 ans, le principe est toujours l’application de mesures ou de sanctions éducatives. Cependant, le juge peut prononcer une peine d’emprisonnement. Abaisser l’âge de responsabilité pénale de 13 à 12 ans pourrait donc amener les juges à incarcérer des enfants de 12 ans.
    • Une mesure qui serait inefficace. Une infographie du Monde (voir ci-dessus) laisse entrevoir les liens qui existent entre la proportion des mineurs dans le nombre de délinquants et l'âge de responsabilité pénale. Ainsi, en comparant la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne, l'Autriche, la Finlande, la Suède et la Norvège, on constate que plus l'âge de la responsabilité pénale est élevé, moins grande est la part des mineurs dans la criminalité globale.
  7. Cet article se construit avec vous !

    Vous avez vu des articles ou des vidéos intéressants sur la délinquance des mineurs ? Envoyez-nous vos liens et nous les intégrerons dans le sujet.

Du rab sur le Lab

PlusPlus