"Le problème de l'équipe de France, c'est le traître qui est parmi nous." En juin 2010, Patrice Evra cherchait le "traître" dans le vestiaire de l'équipe de France de football au mondial. Aujourd'hui, c'est la taupe qui est recherchée pour avoir mis en lumière les désaccords entre Christiane Taubira et Manuel Valls au sein du gouvernement sur la réforme de la politique pénale.
Mardi 13 août, Le Monde révélait le conflit entre les ministres de l'Intérieur et de la Justice, en publiant d'une part une note critique de Manuel Valls sur la future réforme pénale, demandant l'arbitrage de François Hollande, de l'autre une lettre de Christiane Taubira répondant aux critiques de son collègue.
Deux prises de position qui auraient dû rester dans les discussions internes à l'exécutif mais qui se sont retrouvées dans la presse. Ce qui fait dire au Premier ministre qu'il s'agit d'une "phase normale d'échanges préalables aux arbitrages".
"Qu'il y ait des divergences d'appréciation entre les ministres de la Justice et de l'Intérieur, cela n'est pas anormal," a fait savoir Matignon, qui cible clairement la fuite dans la presse comme quelque chose "d'anormal".
"Une fuite est toujours quelque chose d'anormal, surtout sur ces sujets sensibles mais on est dans une phase normale d'échanges préalables aux arbitrages.
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Résultat, ce mercredi 14 août Manuel Valls, invité de RTL, a été questionné sur cette fuite. "Ce n’est pas vous qui avez fait fuiter la lettre ?". Réponse immédiate du premier flic de France :
"Bien sûr que non.
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Sur France Inter, Jean-Jacques Urvoas avait affiché son indignation que ces divergences soient dévoilées dans la presse.
"Ce qui choque, ce n’est pas tant les arguments qu’échangent les ministres de l’Intérieur et de la Justice, que le fait que ce soit dans la presse. (...)
Ce qui fait polémique, c’est que quelqu’un a cru bon de donner ça à l’un de vos confrères. C’est ça qui est dommage.
- D’où vient la fuite ?
Si je le savais, ce n’est pas à vous que je le dirais et les mots que je choisirais pour lui en parler ne seraient pas d’une élégance absolue.
"
Même discours la veille sur BFM TV pour le président de la Commission des lois, qui jugeait "parfaitement scandaleux" que ces courriers aient été publiés. Pour lui, cette fuite va contre l'intérêt général :
"Je ne sais pas quel est l’individu qui a pris la responsabilité de les diffuser à la presse mais il ne sert pas du tout l’intérêt général. Je trouve noble les deux courriers qui ont été écrits car ils discutent de problèmes de fond !
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La députée socialiste Clotilde Valter, sur Twitter, approuve aussi ce discours pointant la fuite de la lettre comme principal problème :
Effectivement “@f_inter: C’est la fuite à la presse qui est le problème, pas la divergence d’opinion entre deux ministres selon @JJUrvoas” — Clotilde VALTER (@ClotildeVALTER) August 14, 2013
De son côté, Luc Chatel, vice-président de l'UMP, a trouvé le coupable : Manuel Valls. Invité de RMC ce mercredi, il s'interroge sur à qui profite le crime :
"On n'attend pas d'un gouvernement qu'il débatte en public. A qui sert cette lettre, si ce n'est au ministre de l'Intérieur ?"
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[Edit 15 août] Invité de BFMTV, Florian Philippot n'y va pas par quatre chemins. Pour le numéro 2 du FN, Manuel Valls est "évidemment" la taupe car il suit "un plan de carrière" :
"Derrière cette affaire, il y a le déroulement d’un plan de carrière de Manuel Valls. Car comment est sortie cette lettre dans la presse ? C’est évidemment Monsieur Valls ou ses équipes qui l’ont fait sortir.
L’objectif c’est de se valoriser aux yeux de l’opinion, d’apparaitre comme le musclé, comme le fort, celui qui tape du point sur la table.
Son objectif est éminemment personnel, je pense qu’il a l’objectif d’être le candidat de son camp en 2017, il doit flatter l’opinion publique, saturer l’espace médiatique et marginaliser François Hollande.
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