"La France en 2025" : les perles des copies des ministres

Publié à 18h21, le 15 août 2013 , Modifié à 18h28, le 15 août 2013

"La France en 2025" : les perles des copies des ministres
Lors du premier conseil des ministres du gouvernement Ayrault, le 17 mai 2012 (photo MaxPPP)

Ah, qu’il est difficile l’exercice de la prospective et de la prise de hauteur …

L’exercice d’anticipation "La France en 2025", sur lequel les ministres de François Hollande ont été priés de plancher cet été, et qui fera l’objet du séminaire de rentrée du gouvernement, lundi 19 août à 10 heures, à l’Elysée, n’échappe pas à l’écueil premier de ce genre risqué : l’énonciation de grands concepts et de belles idées, pas toujours très maîtrisés.

Ainsi, dans plusieurs des contributions ministérielles, publiées sur le site internet du Point, ce jeudi 15 août, Le Lab a relevé disons quelques "flottements" dans la maîtrise des concepts.

Petite revue des approximations ministérielles.

1. Chez Manuel Valls : les gars, et si on mettait du "3.0" dans notre contribution ?

Il fut un temps où, pour être moderne, il fallait mettre du 2.0 partout. Le "2.0", ou ce terme utilisé pour qualifier le web dit "social" - comprendre celui qui permet à tout internaute de créer et diffuser, par lui-même, des contenus, et d'échanger autour de ces contenus.

Visiblement pas très inspiré, le cabinet de Manuel Valls imagine donc un passage vers des "forces de l’ordre 3.0"à l’horizon 2025 … mais sans que la vision décrite ne diffère en aucune manière de la définition du "2.0". 

Voilà donc les concepts énoncés par Manuel Valls et son équipe :

Une police et une gendarmerie 2.0 – et demain 3.0 – , grâce à une présence marquée et au développement d’outils sur Internet, ont l’occasion de renforcer le lien de proximité avec la population.

En gros, en 2025, policiers et gendarmes auront des contacts sur les internets avec la population, et ça fera manifestement d’eux des "forces de l’ordre 3.0".

Ce n'est pas très raccord avec l'utilisation "classique" du terme 3.0 : en futurologie, le web 3.0 correspond plutôt au web des objets ou au web sémantique.

2. Chez Manuel Valls (encore) : "les étudiants étrangers dans le monde"

OK, on chipote un peu car, cette fois, on a réussi à comprendre ce que la plume de Manuel Valls a voulu dire. Mais quand même, on a tiqué devant cette drôle de formule employée par Manuel Valls dans son paragraphe sur l’immigration et l’intégration.

Voici la formule :

Le nombre d’étudiants étrangers dans le monde devrait doubler d’ici 2020.

"Etrangers dans le monde" : un concept un poil étonnant à comprendre. 

Manuel Valls veut évidemment parler des étudiants qui effectuent une partie de leur scolarité hors de leur pays natal / d’origine – et, en la matière, Manuel Valls veut que la France devienne une "destination privilégiée" de ces étudiants mobiles à l’international.

3. Chez Arnaud Montebourg : les "smart-greed" vous connaissez ?

Oups, excusez-moi, j’ai voulu employer un terme un peu compliqué, mais je me suis trompé.

Non, vraiment, nous ne voyons pas d'autre explication à cela :

Pour rappel, les smart grid, et non les smart greed, c’est ça.

En revanche, le Lab n'a toujours pas compris ce que veut dire "cobo-management".

4. Chez Arnaud Montebourg (toujours) : bingo bullshit

Alors là, on ne résiste pas : cette phrase est tout simplement … merveilleuse : enchaînement de tous les termes en vogue dans la filière du numérique, mais sans aucune précision, pour aucun d’eux. 

 

A vrai dire, c’est même un brin contradictoire avec la volonté affichée dans l’ensemble de la contribution d’Arnaud Montebourg, qui plaide pour la construction de filières d’excellences : là, en citant pêle-mêle à peu près tous les termes en vogue dans l’industrie numérique, il est sûr de n’en oublier aucun … mais de se spécialiser dans aucun.

Quel point commun entre les réseaux sociaux, dont la France n’est aujourd’hui pas particulièrement spécialiste, et l’industrie du cloud, soit la construction de centres de stockage des données ?

5. Chez Pierre Moscovici : deux parties, trois sous-parties (et plan apparent)

Pierre Moscovici qui, souvenez-vous, n’avez pas de mots assez durs pour critiquer son ancien élève de Sciences Po, Benjamin Lancar, livre une contribution au classicisme qui frôle le cliché : un bon vieux plan en deux parties "menaces / opportunités", à chaque fois déclinées en trois sous-parties.

Grossièrement résumé, le plan donne à peu près ça :

1. Menaces

a. le péril macro-géo-économique

b. le péril démographique et social

c. le péril micro-économique et technologique

2. Opportunités et objectifs à moyen terme

a. le plein emploi

b. une solidarité renouvelée

c. la France doit reprendre l'initiative en Europe

Créativité maximale du côté de Bercy, donc.

Pour aller plus loin :

Les cinq contributions d'ores et déjà publiées sur le site internet du Point

>> La contribution d'Arnaud Montebourg

>> La contribution de Manuel Valls

>> La contribution de Cécile Duflot

>> La contribution de Christiane Taubira

>> La contribution de Pierre Moscovici

>> Si vous avez repéré d’autres pépites, n’hésitez pas : on mettra volontiers à jour notre article. Un petit mail (lelab@europe1.fr) ou un message sur twitter (@leLab_E1)

 

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