La France peut-elle se passer de la droite ?

Publié à 16h21, le 07 décembre 2011 , Modifié à 18h51, le 08 décembre 2011

La France peut-elle se passer de la droite ?
Nicolas Sarkozy à Bordeaux le 15 novembre 2011 (Reuters).

François Baroin, Bernad Accoyer, Jean-François Copé... Les appels à l'unité nationale se multiplient à droite. Sous couvert de vouloir défendre l'intérêt de la France, il s'agit pour la majorité de faire croire que si elle tombe la France tombe avec elle. La droite utilise la stratégie des banques d'affaires en 2008, "too big to fail". 

  1. Too big to fail

    La manœuvre avait commencé dès cet été avec l’offensive gouvernementale autour de la 'règle d’or" ; elle connaît, avec le couperet des agences de notation qui se rapproche du triple A, un nouveau regain. C’est l’appel – bien entendu dans l’intérêt supérieur de la Nation – de la droite à la gauche sur le thème de l’unité nationale, du Grand Pardon budgétaire pour mieux se plier aux diktats des marchés et des agences.

    • François Baroin :" L'union nationale, ce serait vraiment bien en France […] Que ce soit avant les présidentielles ou après, les socialistes seront dans l'obligation, je l'espère, dans l'opposition, d'assumer leurs responsabilités". 
    • Bernard Accoyer :" Quand un Etat est confronté à une telle situation, l'unité nationale est souhaitable". 
    • Last but not least, Jean-François Copé : "Les socialistes français sont tellement irresponsables qu'ils sont capables de privilégier l'intérêt politicien et de refuser de voter cette règle d'or […] Les voilà de nouveau invités à la table des responsabilités. Est-ce que, oui ou non, compte tenu de l'urgence et de l'importance de la situation, M. Hollande peut accepter de dire enfin : 'On arrête avec ces propos germanophobes ridicules et déshonorants' et dire que l'intérêt supérieur de la France et de l'Europe l'exige : 'Nous allons voter la règle d'or'". 

    On serait presque ému, et flatté, de temps d’égards, d’un tel désir de rapprochement. Mais si c’est un gant de velours qu’on nous tend, il peine à faire oublier la main de fer qu’il contient : le rappel, permanent, de l’impossibilité de faire autrement, de sorte que pour les socialistes, l’alternative serait entre la responsabilité (voter la règle d’or) et la folie déshonorante (s’y refuser).

    Le tout sur la foi d’un raisonnement très simple : si Nicolas Sarkozy et son gouvernement chutent sur cette manœuvre politique, ils emporteront la France avec eux. Pile ils gagnent, face nous perdons tous. Cela ne vous rappelle rien ?

    Remontons de quelques mois, de quelques années dans le temps. Des institutions qui ont construit les conditions d’une impasse politico-économique, ou du moins qui y ont contribué, et qui se sont enrichies sur le dos de la collectivité. Avant de venir, quand elles se sont retrouvées le dos au mur, réclamer à cors et à cris son aide. En expliquant que si elles tombaient, alors tout le monde en pâtirait. Too big to fail. Cela ne vous dit toujours rien ? Banco, si j’ose dire : les banques et la finance !

    Le président et son parti se comportent aujourd’hui exactement comme les "banksters" qu’ils critiquent (parfois). Après avoir prospéré électoralement sur des promesses puis des réalisations ineptes (les heures supplémentaires, le bouclier fiscal), ils viennent, quand celles-ci finissent par porter leurs fruits amers, réclamer l’aide de leurs opposants pour éteindre l’incendie. Cela porte un nom : la privatisation des bénéfices, et la socialisation des pertes.

    Il faut reconnaître aux sarkozystes le mérite de la cohérence : de même qu’ils n’ont exigé aucune réforme structurelle digne de ce nom de la part du secteur bancaire et financier en échange du soutien de l’Etat, ils ne proposent, aujourd’hui, aucune modification de leur projet politique en échange du soutien de la gauche et des socialistes. Bien au contraire, Nicolas Sarkozy a profité de son deuxième discours de Toulon pour repasser la charrue et réaffirmer ses dogmes personnels, comme je l’écrivais la semaine dernière.

    C’est donc plus que jamais le moment, pour la gauche, de refuser ce chantage au sabordage, et de laisser la majorité assumer toutes seules ses responsabilités. Too big to fail ? Chiche !

  2. Lire aussi sur Le Lab : pourquoi il faut un gouvernement d'union nationale à la France

    Sur Le Lab

    Jean-Louis Borloo, François Bayrou et Dominique de Villepin ont tous les trois appelé de leur voeux la création d'un gouvernement d'union nationale. Alors que la situation économique de la France inquiète et que les appels à l'unité de l'UMP restent lettre morte, l'idée est séduisante. Réunir la gauche et la droite pour combattre la crise ? Le Lab affûte ses arguments. Démonstration

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