"Je propose qu’on soit dans une démarche unitaire". Ce 1er octobre sur Canal Plus, François Bayrou a fait un pas de plus vers Jean-Louis Borloo en acceptant que les militants puissent faire partie à la fois du MoDem et de l’UDI, si l’UDI en fait de même.
Une concession qui n’allait pas de soi. Depuis sa cinquième position à la présidentielle et la perte de son mandat de député, François Bayou oscille entre rejet de l’UDI – qui se veut un allié privilégié de l’UMP – et tentation de ne plus la jouer en solitaire.
Le Lab revient sur ses différents signaux de fumée.
Refus - Danse du ventre - Espoir
[PHASE 1] Le refus de l’UDI
Au départ, lorsqu’on lui demande son avis sur l’initiative de Jean-Louis Borloo, François Bayrou ne cache pas son désaccord. Ainsi le 11 septembre, dans le Journal du Dimanche, il lance :
Si c’était le centre, ce serait intéressant, mais pour eux, ce n’est pas le centre, c’est le centre "droit". Cela ne fait donc qu’ajouter un troisième parti à droite, et, à long terme, ça ne marchera donc pas.
Par essence, l’UDI refuse la ligne du "ni-ni" de François Bayrou. Jean-Louis Borloo veut clairement devenir un nouveau mouvement allié à l’UMP. Le président du MoDem, lui, insistait encore le 30 juin sur son indépendance lors du Conseil national de son parti :
Je suis de ceux qui refusent de glisser, de ceux qui veulent au contraire renforcer notre liberté et ainsi notre enracinement dans la vie politique française.
Si on se rallie, on perd sa liberté.
Avec une telle différence de posture, le rapprochement semble presque impossible. Mais François Bayrou va peu à peu mettre de l’eau dans son vin.
[PHASE 2] La danse du ventre
Si c’est vraiment l’unité, faisons-la ensemble.
On est le 23 septembre sur Europe 1 et François Bayrou fait son coming out. Finalement, être tout seul n’est pas la solution la plus tentante. Celui qui n’est plus que conseiller municipal à Pau commence à défendre un rapprochement et même la pluralité au sein des centristes :
Ceux qui sont plus à droite défendront leur position à l'intérieur d'un ensemble, ceux qui veulent un centre indépendant le feront aussi... La ligne politique, nous la définirons ensemble.
Mais Jean-Louis Borloo, en position de force, ne se laisse pas conter fleurette aussi facilement. Il reconduit François Bayrou en rappelant que le combo UDI-UMP est non négociable :
Ce n'est pas une coalition avec les gauches, c'est une coalition du centre avec la droite républicaine.
Donc, tout membre du MoDem qui est sur cette ligne politique claire peut venir.
François Bayrou est tiraillé. Le 30 septembre devant les militants, il réitère son offre d’unité :
Le mouvement démocrate affirme son offre de dialogue, de coopération, de travail en commun, de rapprochement, de démarche unitaire, d’unité avec tous ceux qui s’inscriront dans la reconnaissance des vertus du centre.
Mais ne peut pas s’empêcher de donner à Jean-Louis Borloo une petite leçon d’histoire :
Ceci est un message personnel: il y a au moins une personne en France qui ne devrait pas prétendre que le centre doit être à droite, c'est le président du Parti radical [Jean-Louis Borloo ndlr]. (…)
Cette histoire du Parti radical s'est déroulée, pour l'essentiel, non à droite, mais à gauche, et c'est nier l'histoire du Parti radical que de prétendre qu'il faut effacer, rayer d'un trait de plume la grande histoire républicaine française pour la projeter uniquement sur la droite.
Aie. Mais dès le lendemain matin sur Canal Plus, il tente de se montrer plus conciliant. Il prouve à Jean-Louis Borloo qu’il sait mettre en valeur les centristes de droite et oublier les centristes de gauche:
Il faut que tous ceux qui se réclament de ce courant politique et qui ont pour les uns été depuis 10 ans à l’UMP, ceux qui pendant dix ans on été au centre droit et puis comme moi dans un centre qui veut être indépendant… Il faut que tous ceux là soient ensemble.
Il faut qu’on soit tous ensemble sans devoir se renier.
Il fait même un effort supplémentaire en acceptant que ses militants MoDem puissent être encartés en même temps à l’UDI, si l’UDI accepte d’en faire de même :
Quand on fait un geste d’ouverture, il faut qu’en retour il y ait des gestes d’ouverture.
[PHASE 3] L’espoir
Et si l’UDI, finalement, se rassemblait autour de … lui ? Jean-Louis Borloo, en rassemblant la dizaine de petits partis gravitant dans la sphère centriste, a réussi là où François Bayrou a échoué. Mais ce dernier n’a pas l’intention de s’effacer derrière le nouveau chef de file.Il l’a fait comprendre lors de la clôture de l’université de rentrée du MoDem le 30 septembre : il propose des primaires pour départager tous les centristes en vue de la présidentielle. "Il n’y a que les faibles qui craignent la compétition !", a-t-il même lancé.
Sur Canal Plus ce 1er octobre, il laisse même entendre que le nouveau parti de Jean-Louis Borloo n’a rien de définitif, surtout dans sa forme :
D’abord, ce mouvement politique n’existe pas encore. Ils ont dit qu’ils le créeraient au mois d’avril.
Il y a des gens qui veulent faire un parti politique unique et d’autres qui veulent rester avec un très grand nombre de partis dans le même ensemble.
De fait, si l’UDI a déjà signé son pacte fondateur, son premier Congrès statutaire aura lieu au printemps 2013. François Bayrou espère sans doute d’ici là avoir réussi à y creuser son trou.