"Je ne dis pas tout ce que je pense mais je pense ce que je dis" La formule est signée Najat Vallaud-Belkacem et pourrait résumer à elle seule l'exercice délicat qui est le sien: répondre sincèrement aux journalistes, sans trop en dire non plus.
Dans un long article publié dans M, le magazine du Monde la porte-parole du gouvernement s'exprime sur sa fonction, ses risques, ses inconvénients. Ses prédécesseurs également. Et font même quelques commentaires sur les performances de leur jeune homologue.
Najat Vallaud-Belkacem commence par reconnaître qu'elle "tourne quatorze fois [s]a langue dans [s]a bouche avant de parler au nom d'un collectif et de faire sens". Et raconte la fois où sa langue a justement été un peu imprécise, en novembre dernier :
Après l'assassinat de deux journalistes de RFI, j'ai dit qu'il fallait renforcer notre présence au Mali sans préciser au Nord-Mali. Ça a mis la diplomatie en émoi. On a dû rattraper le coup en faisant le tour des médias.
Et Najat Vallaud-Belkacem de confier que, toute porte-parole qu'elle est, il lui arrive d'avoir, comme tout le monde, des coups de mou :
En fait, le risque est autant de se tromper que d'être mal compris quand chaque mot est scruté, relayé, commenté.
Or, d'une heure à l'autre, on n'est pas forcément au top de sa forme et de sa clarté d'expression. Un mot trop rapide, mal choisi... Et c'est parti pour les interprétations.
Des risques bien connus par Valérie Pécresse, qui porte la parole du gouvernement Fillon pendant plusieurs années, et qui raconte au Monde le jour de la passation de pouvoir, et les conseils qu'elle a pu lui donner :
Najat était anxieuse. Elle prenait conscience de la solennité de la fonction. Je lui ai conseillé de ne pas hésiter à fermer ses réponses. Il vaut mieux dire: 'cette question n'a pas été évoquée en conseil des ministres' que de répondre une bêtise.
Même s'il ne faut pas trop en abuser, sinon à force tu passes pour une buse: si on ne connaît pas la parole du gouvernement, mieux vaut faire autre chose.
Porte-parole du gouvernement Juppé en 1995 puis, en 2011, François Baroin reconnaît à Najat Vallaud-Belkacem des progrès depuis son arrivée au gouvernement :
La tâche de Najat est difficile. C'est sans doute le gouvernement de la Ve République qui a le plus de désaccords. Je n'aimerais pas être à sa place. Mais sincèrement, elle fait bien le job.
Oui, je suis indulgent mais il y a une sorte de confraternité, entre anciens.
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